Suite de notre réflexion sur la réforme : comment résoudre la contradiction entre la pression du volume de l’assistance offerte par l’État, et les nécessaires cures d’amaigrissement drastique de l’administration ?
La volonté réformiste et l’énergie dépensée pour améliorer le fonctionnement de l’administration durant le quinquennat de Nicolas Sarkozy manifestait sans complaisance les limites de l’exercice d’une réforme menée d’abord avec des œillères de comptable. Il en est en effet résulté :
- Une focalisation sur les économies rapides, qui peuvent à la fin se révéler ruineuses.
- Une absence de concertation et une confusion entre vitesse et précipitation.
- Une focalisation sur l’appareil étatique et sur chaque ministère pris isolément, sans prise en compte suffisante de l’interministériel et du rapport aux collectivités publiques et aux institutions de solidarité nationale.
Nouvel accroissement du pouvoir des grands corps
Comment apprécier la LOLF (loi organique relative aux lois de finances, 2001, appliquée depuis 2006) et la prolifération d’une « évaluation » dont nul n’est en mesure de clarifier les critères, de prouver le non-arbitraire et enfin de l’évaluer ?
L’unique résultat indiscutable d’une agitation compulsive assortie du montage de nombreuses « usines à gaz », semblait avoir été un nouvel accroissement du pouvoir de certains grands corps et de l’énarchie. C’est là un mal récurrent du réformisme de certains pays, un élément majeur dans le tableau clinique des dysfonctionnements.
Cette observation peut avoir pour avantage d’identifier les freins en cas d’échec continuel de la réforme.
La contradiction interventioniste
En outre, l’application de l’individualisme radical à l’économie globale produit une crise sociale effroyable dans de très nombreux pays, ce qui à la fois tend à y accroître le volume de l’assistance offerte par l’État, et à y exiger une cure d’amaigrissement drastique de ce même État.
Cette contradiction fatale accule tous les régimes concernés, soit à l’endettement indéfini, soit à la faillite, ou à la révolution sociale. De là le caractère aussi parfaitement odieux qu’inefficace des politiques menées sur la base de principes impolitiques, absurdes et immoraux.
Henri Hude est philosophe, ancien élève de l’ENS, directeur du Pôle Éthique des Écoles de Saint-Cyr Coëtquidan. Sur ce sujet, lire l'Ethique des décideurs (Économica, 2004).
Articles précédents :
Comment réformer ? (I) Réflexions préalables sur l’idée de réforme
Comment réformer ? (II) L’extension indéfinie d’un pouvoir judiciaire sans contre-pouvoir
Comment réformer ? (IV) Idées sur la réforme territoriale
Prochain article :
La réforme de l'hôpital public
En savoir plus :
http://www.henrihude.fr/approfondir/theme1/384-reformer-ladministration-sur-la-modernisation-de-lÉtat
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