À Johannesburg, les dirigeants de la planète travaillent à formaliser les grands axes du " développement durable "; en Afrique, les chefs d'Etat signataires du Nepad (Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique) veulent se prendre en main.
Mais la plaie du continent demeure l'instabilité chronique qui meurtrit les populations.
En Afrique centrale, pourtant, une tentative de paix voit le jour.
Le 30 juillet dernier un accord de paix a été signé à Pretoria (Afrique du Sud) par les présidents Joseph Kabila de la République démocratique du Congo (RDC, ex-Zaïre) et Paul Kagame du Rwanda. Cet accord met peut-être fin à l'une des plus terribles guerres africaines. La prise de pouvoir au Rwanda par Kagame et les Tutsi venus d'Ouganda, à la suite du génocide de 1994, avait entraîné la fuite à l'étranger, et principalement au Congo-Zaïre, de plus de 1 million de Rwandais. En 1996, le Rwanda lance sur l'Est du Congo une opération militaire de récupération de ses "réfugiés" et entame, sous couvert d'un mouvement anti-mobutiste, la conquête du pays. Le régime de Mobutu s'effondre et Laurent Kabila prend le pouvoir à Kinshasa, entouré de "conseillers" rwandais. Cette situation est rapidement insupportable pour les Congolais. En 1998, Kabila se débarrasse de ses conseillers mais Kagame lance ses troupes à l'assaut de Kinshasa. Il échoue devant les Angolais et les Zimbabwéens appelés à la rescousse par Kabila. Depuis, les armées ougandaise et rwandaise occupent l'Est et le Nord-Est du pays où d'ailleurs elles finissent par s'opposer : Kisangani sera quasiment détruite lors de ces affrontements. Angolais et Zimbabwéens stationnent dans les provinces minières du Katanga et du Kasaï. Amis ou ennemis, les uns et les autres vivent sur le pays. L'état de guerre fait directement de nombreuses victimes mais plus encore la division du pays, sa désorganisation : on estime à 2,5 millions les morts dus à cette situation.
Janvier 2001 : Laurent Kabila est assassiné par des inconnus. Son fils Joseph, 29 ans, est porté au pouvoir et manifeste aussitôt une volonté d'ouverture. La France suscite diverses interventions de l'ONU qui aboutissent à un cessez-le-feu et à la mise en place d'une force de surveillance. La population congolaise aspire à retrouver la paix et l'unité du pays. Les occupations étrangères sont de plus en plus mal supportées ; diverses tentatives sont lancées aussi bien pour en terminer avec les interventions extérieures que pour mettre en place le dialogue "inter-congolais".
Le Rwanda prend prétexte de la présence sur le territoire congolais de militants "génocidaires" pour maintenir sa présence militaire. L'accord de Pretoria prévoit le regroupement et le désarmement de ceux-ci dans un délai de 90 jours, l'Afrique du Sud ayant 120 jours pour vérifier l'opération. Ces délais sont trop courts et font douter de son application. Le Conseil de sécurité de l'ONU a délibéré à ce sujet le 8 août : "La communauté internationale a l'obligation de fournir toute l'aide nécessaire pour assurer le succès de cette initiative", a déclaré le secrétaire général des Nations unies, Koffi Annan.
Au même moment, le président soudanais El Béchir et son adversaire sudiste John Garang se sont rencontrés à Kampala en conclusion de négociations menées au Kenya. Un protocole d'accord laisse entrevoir une perspective de paix dans un conflit féroce ouvert il y a 20 ans par l'application de la loi islamique, la Charia, à toutes les populations du Soudan. L'accord prévoit une période d'autonomie de six ans pour le Sud, avant un référendum d'autodétermination, et l'abandon de la Charia comme base législative. Le régime de Khartoum subit depuis le 11 septembre une très forte pression des États-Unis pour se démarquer des islamistes radicaux qu'il a protégés un moment. De plus, le Soudan est devenu producteur de pétrole et ses réserves semblent importantes. Le pétrole est l'un des enjeux de la guerre, les gisements se situant dans la partie sud du pays. L'état de guerre en empêche l'exploitation optimale aussi bien que la pression d'opinions publiques occidentales alertées par diverses ONG.
Au Burundi, où une guerre civile à base ethnique sévit depuis 1993, un espoir se fait jour. Un premier accord, garanti par l'Afrique du Sud, a permis le retour de politiciens hutus exilés et leur participation au pouvoir. Mais les mouvements armés n'y avaient pas pris part. Des conversations viennent de s'ouvrir en Tanzanie entre le gouvernement et les rebellions armées sur fond de combats, chacun voulant arriver à la table des négociations en position de force. L'espoir est mince pour une population de plus en plus misérable, acculée à de très difficiles problèmes de développement.
Mais la fin des combats ne signifie pas pour autant une vie heureuse : l'Angola en donne le triste exemple. La mort de Jonas Savimbi en février dernier a mis fin à la plus cruelle des guerres, ravageant l'un des pays les plus riches d'Afrique centrale depuis plus de 20 ans. La famine a succédé aux violences pour des milliers d'ex-rebelles et pour bien d'autres populations de l'intérieur du pays. Le gouvernement de Luanda est pourtant riche d'importants revenus pétroliers...
La famine sévit aussi au Zimbabwe où le président Mugabe a décrété la guerre aux fermiers blancs sous prétexte de réforme agraire. Le Zimbabwe était jusqu'à présent non seulement autosuffisant du point de vue alimentaire mais aussi la "bouée de sauvetage" de ses voisins en proie à la guerre ou à la sécheresse. Le pouvoir dictatorial et népotique de Mugabe fait de son peuple une nouvelle victime de l'irresponsabilité qui caractérise tant de gouvernements africains.
La guerre reste active sur bien d'autres terres africaines : Congo-Brazzaville, Somalie, Libéria, Algérie, Sénégal (Casamance). Des incidents violents apparaissent sporadiquement sur les frontières de la Centrafrique et du Tchad. Les combats ont cessé entre l'Erythrée et l'Ethiopie, mais est-ce la paix ? Le Nigeria est secoué par les luttes religieuses qui suivent l'application de la Charia dans les états du Nord du pays.
Mais la plus meurtrière des guerres est celle que fait le Sida à l'Afrique : déjà 16 millions de morts et 25 millions de personnes séropositives.
"L'Afrique est un continent où d'innombrables êtres humains sont étendus [...] sur le bord de la route, malades, blessés, impotents, marginalisés et abandonnés. Ils ont un extrême besoin de bons samaritains qui leur viennent en aide... L'homme blessé doit retrouver toutes les ressources de son humanité" (Eccesia in Africa, 1995).
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