En avril dernier, le Parlement européen avait voté malgré notre opposition un VIe Programme-cadre de recherche et développement (PCRD 2002-2006) qui comprenait un financement de la recherche sur les cellules-souches humaines, non seulement provenant d'adultes (ce qui aurait été acceptable), mais provenant aussi, hélas, d'embryons tués.

Or aujourd'hui, c'est la majorité du Parlement européen qui est mis en échec : le conseil des ministres de la Recherche, utilisant les droits que lui accorde la procédure de codécision (décision prise conjointement par le Conseil européen et par le Parlement européen) vient de décider, fin juillet, un embargo temporaire sur le financement de la recherche sur l'embryon humain et ses cellules-souches, prévu au titre de divers programmes spécifiques du VIe PCRD. Cette décision du Conseil ne remet cependant nullement en cause le financement de la recherche sur les cellules souches d'humains adultes.

La position commune arrêtée au mois de mai dernier entre le Parlement européen et le Conseil était suffisamment floue pour que certains États réagissent, puisqu'elle stipulait que ces programmes spécifiques devaient respecter les principes éthiques de l'Union européenne — chacun pouvant comprendre ce qu'il voulait comprendre...

Ceci explique qu'à l'initiative de l'Italie et plus spécialement de son ministre des Affaires européennes, Rocco Buttiglione, connu pour ses convictions catholiques, plusieurs États membres aient refusé d'adopter ces programmes spécifiques si les recherches portaient sur l'embryon humain : l'Italie, l'Allemagne, l'Autriche, l'Irlande et le Portugal, pour lesquels "toutes les activités de recherche doivent être menées dans le respect des principes éthiques fondamentaux afin de fournir des orientations plus détaillées en matière de recherche communautaire, notamment en ce qui concerne la protection de la dignité humaine et de la vie humaine dans le domaine de la génomique et de la biotechnologie".

Au contraire, Claudie Haigneré, nouveau ministre français délégué à la Recherche, a refusé le moratoire en anticipant — c'est un comble ! — sur la révision des lois de bioéthique qui doit avoir lieu en France (sans être encore programmée).

Cependant le moratoire décidé par le Conseil prendra fin en décembre 2003. À cette date, le Conseil tiendra un débat sur la base d'un rapport présenté par la Commission européenne.

Lors d'une conférence de presse à Strasbourg, le 4 septembre 2002, quelques députés européens favorables à l'utilisation des embryons, ont critiqué la forme de la décision du Conseil, mais ont esquivé la question de fond : est-il légitime de faire des recherches sur l'embryon ? Est-il acceptable d'utiliser l'être humain comme matériau pour traiter des maladies incurables?

Les gouvernements favorables au moratoire ont voulu réaffirmer le respect et la dignité de tout être humain, si petit soit-il, et exclure du financement communautaire toute recherche qui porterait atteinte à ce principe. Il reste un an pour obtenir que cette décision temporaire devienne définitive.

Élisabeth Montfort est député au Parlement européen, vice-présidente du Conseil régional d'Auvergne, membre de la commission Industrie, recherche et énergie, membre de la commission temporaire de génétique humaine.