Source [Portail de l'IE] : En novembre 2023, à Séville, la réunion de la dernière chance prenait place pour le secteur spatial européen. En pleine crise des lanceurs, l’UE se demandait quel modèle choisir pour le futur de cette industrie si stratégique. Face aux géants chinois et américains dans l’espace, l’Europe doit-elle rentrer pleinement dans l’ère du New Space et faire de la compétition le moteur de l’innovation de la croissance ? Ou doit-elle, au contraire, conserver son modèle historique de coopération, qui fit le succès d’Ariane 5 ? Pour essayer de conserver sa souveraineté, les pays-membres semblent vouloir trouver un chemin entre les deux.
La crise des lanceurs
En 2023, l’Agence spatiale européenne (ESA) a signé avec SpaceX un contrat de lancement des derniers satellites du système de navigation Galileo. Cette constellation de satellite jugée hautement stratégique était pourtant censée n’être tirée que depuis le sol européen, et ce n’est qu’avec l’accord express des pays membres que le partenariat a pu être signé. Cette affaire met en relief la crise des lanceurs qui touche l’Union Européenne depuis la guerre en Ukraine. Celle-ci trouve son origine dans l’imbrication de plusieurs facteurs. Le premier relève de la nature même d’Ariane 5. Autrefois lanceur phare européen, celui-ci a fait son tout dernier décollage en juillet 2023 à Kourou. Il s’agissait d’un lanceur puissant conçu pour mettre en orbite les satellites lourds géostationnaires, alors les plus utilisés. Ariane 5 n’est pas adaptée aux constellations de satellites aujourd’hui en plein développement, mais présentant un coût important. C’est pourquoi l’UE a décidé de mettre fin à son exploitation, après 27 années de services.
En parallèle, venant des États-Unis, de nouveaux acteurs aux modèles économiques différents ont pris forme. Space X, avec Falcon 9, a participé à démontrer à quel point la fusée conçue par le Centre national d’études spatiales (CNES) et Ariane appartenait à une époque révolue. C’est en partie avec le souci de leur répondre que le début du développement d’Ariane 6 a commencé en 2015, sous l’égide d’ArianeGroup (50% Airbus, 50% Safran), qui coordonne 550 entreprises européennes (dont 100 petites et moyennes entreprises).
En attendant son arrivée, le lanceur moyen russe Soyouz était censé assurer la capacité de l’UE à mettre en orbite ses constellations de satellites. Malgré son nom, Ariane 6 lui succède davantage du point de vue technique qu’à son aînée Ariane 5. Elle doit être moins chère, plus légère, mais surtout plus adaptée au marché mondial. Cependant, deux évènements vinrent gripper les plans de l’ESA. Le premier est la crise du Covid, qui contribua entre autres à la prise de retard du développement d’Ariane 6. Le second, plus grave, est la guerre en Ukraine. Celle-ci met non seulement fin à la possibilité pour l’UE d’exploiter Soyouz, mais prive aussi ses industriels de composants russes, clouant au passage le lanceur léger italien Vega-C au sol. C’est pour l’ensemble de ces raisons que l’ESA s’est tournée vers l’entreprise d’Elon Musk pour finir la mise en orbite de Galileo, le GPS européen ultra-performant. Face à cette crise, le Sommet pour l’espace de Séville de 2023 était organisé fin octobre afin de trouver une voie de sortie pour l’industrie spatiale européenne, et assurer la capacité de l’UE à maintenir son importance dans un secteur toujours plus stratégique.
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