Deux hommes sont là, près du tombeau, pour accueillir les femmes. Deux hommes ! Que font-ils là, ces hommes ? Pourquoi sont-ils là, au lieu de Jésus lui-même ? Au matin de Pâques, il ressuscite, et le meilleur qu'il trouve à faire est de s'en aller : à peine revenu, il part.
À peine vivant, il s'évanouit.
Ce n'est pas la pitoyable mise en scène de ces deux hommes qui fait illusion, même "en vêtement éblouissant". Pourquoi sont-ils en vêtements éblouissants ? Ils ne sont pas ressuscités, eux ! Jésus, au contraire, n'apparaît pas en vêtement éblouissant, mais en jardinier à Marie-Madeleine, tout au plus coiffé d'un chapeau de paille. L'impression est donnée d'un mauvais théâtre, où les personnages secondaires ne tiennent la scène que pour préparer l'entrée du personnage principal, qui ne vient pas.
Ces deux hommes, sans se démonter, parlent en même temps : "Pourquoi cherchez-vous le vivant parmi les morts ? Il n'est pas ici, il est ressuscité." Au fond, ils ont raison : Jésus est vivant, il n'a plus aucune raison de rester au cimetière. Un vivant va où va la vie. Ils ne sont là que pour le dire. Pourtant, ce matin, la vie se concentre autour d'un tombeau. Alors que le monde est encore prostré de sa forfaiture, quelques groupes, de femmes et puis d'hommes, sont venus ; ils sont venus vénérer celui qu'ils ont aimé. Ils sont venus vénérer, mais surtout vénérer un mort. C'est au tombeau qu'ils apprennent qu'ils sont venus pour rien. Celui qu'il croit mort est vivant.
Son absence est un appel
Soit, mais la question demeure : pourquoi sont-ce deux hommes qui sont là, au lieu de Jésus lui-même ? Pourquoi s'est-il échappé, au moment où, au contraire, il devrait se faire reconnaître ? Il s'est échappé, non pas parce qu'il est occupé ailleurs, mais pour disposer ses disciples à croire. Son absence est un appel. Elle est là pour les obliger à réfléchir, comme les y invitent les deux hommes : "Rappelez-vous ce qu'il vous a dit." Le rappel est la condition de l'appel. Tel est le message du matin de Pâques.
"Rappelez-vous" qu'il avait annoncé sa Passion, sa mort, et sa Résurrection, pour vous, pour vos péchés.
"Rappelez-vous" qu'il n'est venu sur terre que pour vous, pour vous reconduire au Père, si vous vous laissez faire.
"Rappelez-vous" qu'il vous a donné l'eucharistie, son propre corps sacrifié, pour que vous ayez la vie.
Le rappel ainsi battu est celui de la foi. Jésus ressuscité n'est compréhensible que pour celui qui l'accueille dans la foi. Jésus est bien là, corps et âme, mais il veut être accueilli dans la foi. C'est la foi qu'il demande à Marie-Madeleine, aux apôtres, puis à nous.
Il faut parler
S'il en est ainsi, si notre foi est exacerbée à défaut d'avoir vu, c'est pour que, à notre tour, nous parlions. Désormais, à compter du dimanche de Pâques, la foi va se répandre de bouche à oreille. Des oreilles, on en trouve ; des yeux, on en trouve encore plus ; des bouches pour parler, on en trouve moins. Il faut parler.
À qui ? À tout le monde, sans se soucier de sa propre indignité. Ce matin, c'est une prostituée qui a enseigné le premier pape.
Quand ? Tout le temps, le temps qui nous reste à vivre ; il est court.
Comment ? Il y a mille manières, pourvu que nos mots soient les mots du Christ, et que nous osions dire aux gens qu'ils sont sauvés et qu'ils ont à convertir leur vie, sans détours.
Que de temps perdu à s'occuper d'autre chose que de parler de Celui qui est ressuscité ! Plutôt que d'en perdre encore, nous voici invités à une parole vive, qui repose sur deux piliers : moins de mutisme, plus de silence. Du mutisme d'un tombeau, rien ne peut sortir. Du silence du Dieu Vivant, c'est la Parole qui jaillit. Jaillissons !
*Le Fr. Thierry-Dominique Humbrecht op est dominicain de la province de Toulouse.
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