Dissolution : le cynisme intégral du président Macron

En annonçant la dissolution de l’Assemblée nationale dans la foulée de l’écrasante défaite de la majorité lors des élections européennes, Emmanuel Macron a réussi à se mettre une nouvelle fois au centre du jeu politique. En prenant au dépourvu les oppositions, il tente un sérieux coup de poker.

L’inconnue comme horizon : l’irresponsable cynisme de l’Élysée

 

Plus de 15 points d’écart séparent la liste macroniste de celle du Rassemblement national. Le président qui se présentait comme un rempart face à la montée du RN est en échec. Il aura beau avoir utilisé toutes les ficelles pour tenter de faire grimper la liste de la majorité aux européennes (détournement de commémoration, squat de plateaux télévisés…), la sauce ne prend plus. Talonné par un candidat socialiste assez médiocre (Raphaël Glucksmann), ses troupes n’ont jamais vraiment convaincu lors de la campagne.

Désormais, avec la dissolution, les cartes sont rebattues. À droite, les LR vont peiner à mobiliser après un score assez moyen au scrutin continental quand le parti d’Éric Zemmour n’a aucune chance d’exister dans ces élections à deux tours… d’autant que la scission annoncée (par nous et par d’autres) pourrait être imminente entre la tête de liste Marion Maréchal et la tribu Zemmour.

À gauche, les tractations vont aller bon train pour tenter de faire une union, rejouer le coup de la Nupes. Pour y parvenir, les partis devront mettre de côté leurs querelles notamment sur la question palestinienne… Une partie de la gauche socialiste qui a réalisé un bon score semble aujourd’hui irréconciliable avec les mélenchonistes.

A l’inconnue électorale s’ajoute une inconnue sécuritaire. Le président admet un hypothétique changement de gouvernement à la veille des Jeux Olympiques ce qui revient à changer les acteurs quelques minutes avant l’entrée en scène. La sécurité des Français et des centaines de milliers de personnes qui seront et viendront à Paris cet été sert de variable d’ajustement pour le président.

 

L’euthanasie c’est fini ? 

 

Une bonne nouvelle est cependant à signaler : l’abandon du projet de loi sur l’euthanasie. Divine surprise qui devrait repousser une telle réforme au moins de quelques années et permettra aux défenseurs de la vie de fourbir leurs armes et de faire la promotion des soins palliatifs.

La menace euthanasique pourrait cependant repointer le bout de son nez en cas de coalition, peu probable, entre la majorité macroniste sortante et une partie du PS favorable à la ligne de Raphaël Glucksmann.

Il sera d’ailleurs intéressant de constater dans quelques semaines que de nombreux évêques de France appelleront à faire barrage au RN qui s’oppose à l’euthanasie et feront la promotion de partis hostiles aux principes non négociables. Déjà pour les européennes, des évêques s’étaient prononcés à demi-mot en faveur des partis libéraux pourtant pas franchement en accord avec les principes non-négociables de l’Eglise catholique. Du côté des catholiques, ils sont autant que le reste de la population à avoir voté pour les listes RN (32 %). Par ailleurs, ils sont 10 % à avoir voté pour la liste de Marion Maréchal soit plus que la moyenne nationale. Ajoutons à cela les votes Bellamy et nous avons un spectre électoral catholique ancré à droite. Il sera par ailleurs intéressant de consulter l’âge des électeurs catholiques de gauche… Élément intéressant : les aspirations des catholiques votant RN semblent rejoindre celles de la majorité des ouvriers qui donnent leurs suffrages au parti de Marine Le Pen à plus de 50 %.

 

La meilleure chose, ou la moins pire, qui se dessine pour le pays peut se produire dans quelques semaines : il s’agit de la mise en place d’un gouvernement technique sans majorité avec un Parlement qui ne légifère pas et un président avec une faible marge de manœuvre.  En cas de blocage des institutions, les plus inquiets estiment que le président pourrait démissionner et tenter sa chance pour rempiler pour cinq ans et ainsi contourner la limite de deux mandats présidentiels de 5 ans…

 

Olivier Frèrejacques

Président de Liberté politique