Comme prévu, Emmanuel Macron a pris tout le monde à contre-pied en nommant son chef de gouvernement. Face à une gauche qui s’en tenait à l’unique candidature de Lucie Castets, le président a pris l’option droite et tente d’imposer la culture du compromis en France comme elle peut exister en Allemagne.
Le parti Les Républicains est la force politique arrivée en dernière position aux élections législatives ; elle voit néanmoins l’un des siens prendre la tête du gouvernement en la personne de Michel Barnier.
Le refus de la gauche de voir arriver l’ancien socialiste Bernard Cazeneuve aux affaires et celui du Rassemblement national de voir débarquer l’ancien LR Xavier Bertrand auront prolongé les négociations de quelques heures.
C’est finalement un ancien qui hérite du trône de Matignon. Michel Barnier a commencé à militer dans les années 1960 à l’Union des Démocrates et Républicains, l’UDR, parti soutenant le président de l’époque… Le général de Gaulle. Ministre sous Mitterrand, Chirac et Sarkozy, il aura été l’homme de la candidature des Jeux Olympiques d’Albertville en 1992. Également commissaire européen et négociateur du Brexit, il est résolument favorable à Bruxelles.
Une nomination à contre-courant
En juin les électeurs ont majoritairement voté pour le Rassemblement national (RN) aux élections européennes.
En juillet, une très faible majorité a voté pour le Nouveau Front Populaire (NFP). Ces votes recouvrent une double-réalité : celle d’un certain euroscepticisme et l’inquiétude du déclassement économique.
Michel Barnier est un apôtre de l’Union européenne et mènera très vraisemblablement une politique dite de « rigueur ». Le double-choix des électeurs semble ainsi jeté aux orties. A la décharge d’Emmanuel Macron, il était difficile de concilier les désirs contradictoires des votes RN puis NFP. Ce sont donc Les Républicains et leurs 47 députés sur 577 qui se voient contraints de gouverner en coalition avec le centre macroniste. Point croustillant, ni LR ni Barnier n’avaient appelé au « barrage Républicain ». C’est donc une inversion du front républicain qui s’opère indirectement avec un président qui entend compter sur l’absence de vote de motion de censure du RN contre son nouveau Premier ministre. Les gauches entrent ainsi dans l’opposition alors qu’elles se voyaient déjà en haut de l’affiche avec pourtant moins d’un tiers des sièges à l’Assemblée.
Aujourd’hui, la situation est hautement paradoxale : le RN a été évincé des postes clefs à l’Assemblée où les gauches sont très bien installées. Et Emmanuel Macron compte sur le soutien, même indirect, d’un parti qu’il a hier mis au ban de sa « République ».
Un moindre mal ?
La perspective de voir arriver Xavier Bertrand ou Bernard Cazeneuve à Matignon avait de quoi inquiéter. L’un était un ancien ministre de François Hollande et aurait accéléré l’« agenda sociétal », l’autre est un gamellard sans convictions capable de tous les retournements de veste.
Avec Michel Barnier, on peut imaginer que l’euthanasie ne sera pas une priorité tout comme la lutte contre les écoles privées sous et hors-contrat honnies par les gauches anticléricales. Par ailleurs, l’arrivée de Barnier aux manettes devrait éviter le racket fiscal que proposait d’appliquer le NFP.
Autre atout du nouveau chef de gouvernement, il n’est pas un communicant incontinent. Les vidéos débiles et les formules toutes faites de Gabriel Attal devraient donc être remisées au placard. Un peu de sobriété dans le style et moins de coup de com’ après des mois de saturation ne feront de mal à personne. Le président, encore « jeune », imprévisible et colérique sera donc flanqué d’un grand flegmatique. Tant mieux.
Il s’agit désormais d’observer car l’exercice du pouvoir peut mener à toutes les trahisons ; et il convient de ne pas oublier que c’est sous le ministère de l’UMP Luc Châtel qu’a été introduite l’idéologie du genre dans les manuels scolaires. C’est probablement plus sur les questions d’immigration et de pouvoir d’achat qu’il sera suivi de près par le RN. Michel Barnier devra se montrer très diplomate s’il veut durer…
Olivier Frèrejacques
Président de Liberté politique
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