Abbé Pierre : misère du désir à la gauche du père

Les révélations faites, à partir d’un rapport controversé, sur les agissements de l’abbé Pierre mettent en lumière une série de dysfonctionnements dans l’Eglise. Cette affaire impliquant un prêtre icône des gauches et médiatiquement canonisé offre un condensé de leçons pour les catholiques.

Tout a commencé avec une balle tirée dans le pied. L’auteur du coup de feu ? La très gauchère association Emmaüs fondée par l’abbé Pierre pour venir en aide aux déshérités et devenue au fil des années une officine au service des gauches sociétales et mondialistes.

Le rapport qui met en cause le prêtre évoque les gestes déplacés de ce dernier auprès de femmes majeures. Des comportements inappropriés supposés qui reposent sur un travail lui-même controversé.
Il est en effet l’œuvre de la militante féministe Caroline de Haas dont le cabinet a été sollicité par Emmaüs afin de faire la lumière sur les agissements de son fondateur.

Recourir au service de cette professionnelle du coup de com’ montre l’état de déliquescence de cette association alors même qu’il est de notoriété publique que les travaux de madame de Haas ne sont pas sérieux pour ne pas dire malveillants. Celle-ci a en effet déjà vu son travail pour le cabinet de conseil Egae remis en cause par l’appareil judiciaire.

Ce choix de Egae, une agence « experte de l’égalité entre les femmes et les hommes, de la lutte contre les discriminations, de la diversité et de la prévention des violences sexistes et sexuelles » n’est en tout cas pas anodin. L’association Emmaüs qui vit sous perfusion d’argent public pourrait subir de lourdes conséquences après une telle affaire. Ceux qui trinqueront ne seront pas à chercher du côté des cadres de cette organisation mais des petites mains et des bénéficiaires des aides.

 

L’incurie de la Conférence des évêques de France

 

La secousse médiatique après un rapport de seulement huit pages et dont la méthode n’a pas été remise en cause (comme pour la Ciase ici et ici) soulève des questions.

Par ailleurs, s’il était de notoriété publique que l’abbé Pierre n’était « pas un enfant de cœur », on admettra que sortir des affaires qui s’apparentent à du « pelotage » 17 ans après sa mort permet surtout de salir une personne sans qu’elle puisse se défendre et relève d’une méthode étonnante.

L’affaire à peine ébruitée, la Conférence des évêques de France (CEF) s’est sentie obligée de répondre en exécutant sine die la présomption d’innocence. Des évêques contemporains de l’abbé Pierre avaient pourtant mis en garde contre les démons qui pouvaient tourmenter le personnage. Un article du journal La Vie présente la genèse du malaise Abbé Pierre de manière assez équilibrée et nous ne pouvons que vous conseiller sa lecture.

Adulé par la gauche socialiste et une partie de l’Eglise catholique, fidèles et prêtres confondus, ce prêtre contemporain a été porté en icône pour ne pas dire en idole.

La canonisation médiatique et l’adoubement passé de la gauche n’empêchera pas l’Eglise catholique d’être mise en cause et de payer les pots cassés de cette affaire. Il s’agira peut-être désormais de se méfier de ceux qui plaisent au monde.

Plus généralement cette idolâtrie pour un homme et son traitement par les évêques de la CEF montre une fois de plus que lorsque l’Eglise se place en dehors du temps long, elle se trompe. Les canonisations express en vogue et la nécessité de mettre en avant des personnalités contemporaines jugées, parfois un peu vite, comme exemplaires (Tim Guénard, Jean Vannier…) relève d’une absence de discernement et probablement d’un manque de foi.

 

Abus dans l’Eglise : nettoyer les écuries d’Augias

 

Au-delà du cas particulier de l’abbé Pierre, c’est la question des abus dans l’Eglise qui est une nouvelle fois abordée. A ce propos il convient de considérer que de tels actes abjects ont existé dans l’ensemble des « sensibilités » qui forment l’Eglise : progressistes, traditionnalistes, conservateurs, catho de gauche… La même faiblesse a souvent été partagée par les responsables ecclésiastiques qui ont fait face à des cas d’abus sexuels. Répondre vigoureusement à de tels agissements est plus que jamais salutaire pour l’Institution.

Au sommet de l’Eglise les cardinaux Ouellet et McCarrick ont bénéficié d’un silence coupable.

Le pape François a lui-même la main qui tremble quand il s’agit de condamner certains… Le père Rupnick, coupable d’abus sexuels mais aussi d’avoir confessé une religieuse qui était sa maîtresse a ainsi prêché des retraites à la Curie ! Il a vu le pape lever son excommunication.

S’il convient de se méfier des accusations intempestives, il est du devoir de l’Eglise de faire le ménage en son sein, avec clairvoyance, de manière indépendante, et de punir le plus sévèrement ces brebis galeuses qui souillent le catholicisme.

Alors que des responsables ecclésiastiques font aujourd’hui de la chasse au latin dans les clochers de France, s’occuper des violeurs, des abuseurs et de leurs protecteurs pourrait s’avérer plus utile.

 

Olivier Frèrejacques

Président de Liberté politique