Source [Causeur] Admirable dans sa vie, formidable par son œuvre simple et profonde, Albert Camus est de ces écrivains qui ont touché la réalité de leur temps en plein cœur et deviennent par là-même intemporels.
La gauche, qui l’a longtemps mis au banc des anti-révolutionnaires, tente de s’approprier un homme dont la liberté de ton leur aurait pourtant bien déplu (notamment l’analyse acharnée contre les pleurs et les hurlements). La découverte en ce début d’année d’un texte exclusif de l’auteur dans les archives du général de Gaulle manifeste un héritage politique plus complexe de l’auteur de l’Homme révolté.
En dépit d’une tendance libertaire que l’on aurait tort d’associer aux imbéciles pourfendeurs du « jouir sans entrave » ou d’un libéralisme économique, Camus donne des clefs philosophiques profondes pour résister à notre modernité, et s’opposer à elle par simple amour de ce que la nature humaine a de plus ancré.
Penseur que toutes les misères indignaient, il refusait de s’acheter avec d’autres la belle conscience de gauche qui soutenait les massacres et les calomnies pourvu qu’elles se fassent au nom de la libération de l’homme. L’Algérie était sa terre natale, et après avoir déclaré qu’entre la justice et sa mère, il choisirait sa mère, il se désolidarise aussi bien de l’action violente du FLN que de la colonisation française, et aurait abhorré nos actuels « décoloniaux » qui professent la haine du Français blanc.
Lui qui déclarait, dès l’Envers et l’endroit : « Tout est simple. Ce sont les hommes qui compliquent les choses » aurait conspué la fausse « complexité » revendiquée par une grande partie de la classe politique. Amoureux de la finitude humaine, Camus invite à épouser le tragique contre les prophètes qui voudraient bouleverser la nature de l’homme et en faire advenir une nouvelle. Cette philosophie qui traverse Le Mythe de Sisyphe se retrouve dans L’Homme révolté, car la vraie révolte ne se fait que par amour pour le monde ou l’humanité. Ce retour du tragique va à rebours du transhumanisme comme tentative d’extraire l’Homme de sa finitude. Homme à femmes incorrigibles, sûrement aurait-il subi les foudres du mouvement #metoo et porté le fardeau du patriarcat blanc.
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