« Mariage gay » et PMA : danger maximal

Après avoir focalisé une grande partie des discussions ces dernières semaines, l’ouverture de l’assistance médicale à la procréation aux lesbiennes ne figurera finalement pas dans le projet de loi sur le mariage et l’adoption pour les couples homosexuels qui sera examiné à l’Assemblée le 29 janvier prochain. Du moins en apparence…

LE 9 JANVIER, le groupe socialiste de l’Assemblée a retiré son « amendement PMA » visant à étendre l’accès à l’assistance médicale à la procréation aux couples de lesbiennes. Certains commentateurs y ont vu un recul de la majorité quelques jours avant la manifestation du 13 janvier, à la fois pour éviter de provoquer, donc mobiliser un peu plus les opposants au texte de loi – ce qui est raté – et aussi tenter d’apaiser le débat parlementaire qui s’annonce houleux.

Ouverture de l’AMP pour les homosexuelles pacsées

Le danger de l’ouverture d’un droit à l’AMP pour les couples de femmes est en fait maximal même s’il est reporté de quelques semaines. En effet, le Premier ministre en personne s’est engagé devant les représentants parlementaires du PS à ce que le volet sur l’AMP figure dans le nouveau projet de loi sur la famille annoncé en mars, lourd de menaces sur la filiation et les droits de l’enfant.

Légiférer par amendement aurait certes pu autoriser l’accès des procréations artificielles aux couples de lesbiennes mariées. Mais de nombreuses voix au sein de la majorité veulent aller plus loin au nom de l’« égalité » et de la « non-discrimination ». Réserver l’AMP à deux femmes mariées génèrerait selon eux une rupture de traitement entre couples homosexuels et couples hétérosexuels, lesquels n’ont aucunement besoin de se marier pour y avoir droit. Depuis l’adoption de la loi du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique, il leur suffit même d’être pacsés pour y accéder. Une partie de la majorité (et du gouvernement) souhaite donc ouvrir l’AMP aux femmes homosexuelles ayant contracté un Pacs et souhaite inclure cette mesure dans le prochain texte sur la famille.

Procréation artificielle pour tous

De même, le Code de la santé publique autorise aujourd’hui le recours à l’AMP en cas de problèmes d’infertilité avérée, condition médicale qui n’existe évidemment pas pour des femmes homosexuelles a priori parfaitement fertiles. Certains parlementaires socialistes font valoir qu’il y aurait là aussi injustice à donner un droit à l’AMP aux femmes homosexuelles et à le refuser aux femmes hétérosexuelles.

Autrement dit, la majorité réfléchit sérieusement à l’idée d’ouvrir l’AMP à toutes les femmes, mariées ou non, homosexuelles ou hétérosexuelles, fertiles ou infertiles, en couple ou célibataires. La poursuite d’une forte mobilisation des opposants à la dénaturation du mariage et de la filiation pourrait éviter ce scénario du pire.

Un président déterminé

On a également beaucoup glosé sur le supposé malaise du chef de l’État vis-à-vis de cette mesure. Là encore, il convient de ne pas se laisser abuser. On cite souvent l’entretien qu’il avait accordé en mars 2012 au magazine Têtu dans lequel il s’était prononcé pour l’AMP en faveur des couples de femmes. Certains y voient ainsi une simple réponse à une question qui n’exprimait peut-être pas le fond de sa pensée à l’époque.

C’est oublier la lettre très officielle que le candidat Hollande avait envoyée au président du Comité consultatif national d’éthique lui faisant part de sa volonté ferme de donner droit aux « nouvelles parentalités » et d’autoriser l’ouverture de l’assistance médicale à la procréation aux couples de femmes. Il est étrange que ce document ne soit jamais cité par les médias.

Au passage, on remarquera que cette missive contient quasiment l’ensemble du programme « bioéthique » de François Hollande : libéralisation de la recherche sur l’embryon, autorisation de l’euthanasie ou du suicide assisté, apologie du diagnostic prénatal et du diagnostic préimplantatoire « qui ne doivent pas être considérés comme des techniques eugéniques comme certains propagandistes ont essayé de le faire croire »…

On y apprend même le peu de considération dont il entoure le débat public « qui ne saurait se substituer aux débats parlementaires ».

Fabrication artificielle d’enfants à adopter

Venons-en à présent au point le plus important. Amendement ou pas, le projet de loi, même en l’état, instaure de facto l’accès à la procréation artificielle pour les couples de lesbiennes mariées. En effet, il suffira que l’une d’elles se rende à Barcelone ou à Bruxelles pour s’y faire inséminer et que sa « conjointe » engage une procédure d’adoption plénière qui lui sera accordée de plein droit en étant « mariées ». Le rapporteur PS du texte, Erwann Binet, l’a lui-même reconnu : « Le projet de loi sur le mariage pour tous prévoit l’adoption dans un couple de lesbiennes de l’enfant conçu par insémination artificielle » (Le Figaro, 5 janvier 2012).

Allons plus loin. Il n’est même pas certain que le vote d’un dispositif AMP pour les femmes homosexuelles par le Parlement change quoi que ce soit au tourisme procréatif actuel.

En effet, en raison du manque de donneurs en France, se poserait immanquablement la question de la pénurie de paillettes de sperme pour satisfaire cette nouvelle demande. Le don de spermatozoïdes ne suffisant pas aujourd’hui à répondre au « projet parental » des couples hétérosexuels, on estime que le délai d’attente oscille entre dix-huit mois et deux ans. Moyennant des sommes plus que modiques par rapport à l’adoption internationale, les couples de lesbiennes ont donc tout intérêt à continuer à se rendre en Belgique ou en Espagne dont les cliniques privées tournent actuellement à plein régime.

La conclusion est imparable. Même dans sa formulation actuelle, le projet de loi promeut indirectement les délocalisations procréatives et la fabrication artificielle d’enfants adoptables pour les couples de lesbiennes.

 

P.-Ol. A.

 

 

Photo © JPB/LP.com

 

 

 

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