Source [Conflits] : Domaine des représentations, des symboles, des rapports de force et des occupations de l’espace, le sport s’inscrit dans la réflexion géopolitique. Il est aussi l’expression d’une forme de la puissance et un moyen de communication politique. Entretien avec Jean-Baptiste Guégan sur cette géopolitique du sport.
Qu’est-ce qui fait du sport un objet d’étude géopolitique ?
Si l’on considère que la géopolitique, c’est l’étude des relations de puissance, des rapports de force et des tensions sur un territoire que se partagent et se représentent différents acteurs, il n’y a rien de mieux que le sport pour la comprendre. Le sport permet de comprendre la géopolitique au sens large d’Yves Lacoste. En effet, qu’est-ce qui permet aujourd’hui à une population de se sentir concernée en tant que nation ? Le sport constitue une de ces occasions. Les sportifs et leurs supporters vont arborer leurs symboles nationaux via le sport. On va les entendre via le sport, ils vont littéralement donner un corps à la nation. Le seul autre exemple, c’est l’armée et le rapport au conflit.
Pour comprendre les relations internationales et la géopolitique, le sport est un excellent moyen de vulgarisation. Il permet de saisir tous les acteurs de la scène internationale et de les voir agir les uns avec les autres à toutes les échelles, dans leur diversité. Il permet aussi de considérer les actions et interactions de ces acteurs sur les territoires. S’ajoute à cela la question de la puissance, parce que s’il y a bien un endroit où on mesure la puissance et le rapport de force entre acteurs, c’est bien par le sport, que ce soit via les classements des médailles, les podiums obtenus, les trophées remportés et la mise en scène qu’en font les États et les pouvoirs en place, etc.
Ce que le sport permet de saisir aussi, c’est l’idée de représentation, l’une des notions centrales de l’approche géopolitique. Prenons l’exemple du Parc des Princes. Si vous êtes supporter du PSG, et notamment si vous êtes un supporter ultra, vous ne laissez pas entrer quelqu’un avec un autre maillot que celui du PSG. A fortiori, si vous êtes à Auteuil et membre du collectif Ultra Paris, “Ici c’est Paris” et rien d’autre. Pour les supporters les plus engagés, le virage leur appartient symboliquement alors que le stade n’appartient même pas au club. Il appartient à la mairie de Paris. Nous sommes au cœur de l’idée de représentation. Ici, c’est mon territoire, un espace approprié comme le définissent les géographes.
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