Source [Boulevard Voltaire] L’année dernière, Marine Le Pen en rêvait et c’est en Italie que l’alliance des populistes des deux rives s’est accomplie avec le gouvernement formé ce lundi par la Ligue de Matteo Salvini et le Mouvement 5 étoiles de Luigi di Maio.
En démocrate vigilant, Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, ne pouvait que se ridiculiser, lui (et la France, au passage), avec ces propos tenus ce dimanche dernier sur Europe 1 : « Les Italiens doivent comprendre que l’avenir de l’Italie est en Europe et nulle part ailleurs ! Il y a des règles à respecter… » Bref, c’est l’Europe punitive. Et le même de poursuivre, passant du registre de la menace à celui de l’apocalypse annoncée : « Si le nouveau gouvernement prenait le risque de ne pas respecter ses engagements sur la dette, le déficit, mais aussi l’assainissement des banques, c’est toute la stabilité financière de la zone euro qui serait menacée. »
Ce qui inquiète Bruno Le Maire, grand sensible devant l’éternel ? Cette déclaration, peut-être : « Nous entendons revoir, avec les partenaires européens, le cadre de la gouvernance économique », ce qu’exigeaient, précisément, Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon durant la campagne présidentielle de 2017. La réponse de Matteo Salvini, qui n’a pas tardé, vaut son pesant de prosciutto :
« Je n’ai pas demandé les votes et la confiance pour continuer sur la route de la pauvreté, de la précarité et de l’immigration : les Italiens d’abord ! » Voilà qui a, au moins, le mérite d’une indubitable clarté.
D’ailleurs, si Bruno Le Maire connaissait mieux l’Europe, il saurait que, pour jovial qu’il puisse souvent paraître, le Ritalien peut aussi se révéler susceptible, surtout lorsque chatouillé de trop près ; ce qui lui aurait sûrement évité cette autre réplique cinglante :
« Que les Français s’occupent de la France et ne se mettent pas à casser les pieds chez les autres. […] Il y a ce ministre français [Bruno Le Maire, donc, NDLR] qui dit que “le prochain gouvernement devra continuer à faire ce qu’ont fait tous les autres avant lui”. Qu’il se mette le cœur en paix : nous ferons l’exact contraire de ce qu’ont fait les gouvernements qui nous ont précédés. »
Au fait, ce programme qui donne des sueurs froides à notre ministre, qu’a-t-il de si proprement scandaleux ? On y trouve des mesures sociales – de gauche ? – et des mesures sécuritaires – de droite ? – parmi lesquelles : abaissement de l’âge de la retraite, instauration d’un salaire minimum et d’un revenu de citoyenneté de 780 euros par mois. Mais aussi des baisses d’impôts significatives et des mesures musclées quant à l’immigration de masse et un islam de plus en plus envahissant. Soit un programme qu’on pourrait tenir pour être à la fois de « gauche » et de « droite » ; ce qui est une assez bonne définition du populisme. Il n’y a donc pas tromperie sur la marchandise.
On y trouve même des mesures sociétales assez intéressantes en matière de « moralisation de la vie politique », telle cette interdiction faite aux francs-maçons de devenir ministres. Mesure qui, dit-on, pourrait déclencher un peu plus l’ire des instances européennes, mais qui s’explique assez bien, étant donné le contexte local : le souvenir du scandale de la loge P2, avec ses implications au sein du Vatican, de la Mafia et de la CIA, est encore largement présent dans les mémoires.
Cette alliance des populismes, Marine Le Pen l’appelait de ses vœux l’année dernière. Jean-Luc Mélenchon n’a pas osé franchir le Rubicon, préférant céder devant ses ouailles immigrationnistes pratiquant un gauchisme d’un autre temps. Dommage. Car une alliance du peuple, celui du « non » au référendum sur la Constitution européenne, celui qui souffre de la mondialisation, celui des invisibles et de la France périphérique aurait eu un peu plus d’allure que cette fantasmatique union des droites dont un Laurent Wauquiez ne veut à aucun prix et que réclame en vain un Front national aujourd’hui passablement déboussolé.