La bataille américaine – retour sur les enjeux d’une lutte à mort

Georges Clément, président du Comité Trump France, a bien voulu répondre à ces quelques questions de Liberté politique autour de l’élection présidentielle américaine et de la candidature de Donald Trump à sa succession. L’occasion de faire le point sur la campagne et ses multiples rebondissements.

Liberté politique : Présentez-nous en quelques mots le Comité Trump France : qui rassemble-t-il, quels sont les profils des adhérents qui soutiennent l’élection de Trump aux Etats-Unis ? Pourquoi est-il important, en France, de soutenir cette candidature, alors même qu’il s’agit d’un scrutin étranger sur lequel nous n’avons a priori, en tant que Français, pas de prise ?

 

De façon dispersée, nous sommes plusieurs (rares, trop rares) Français à nous être retrouvés autour de la candidature de Donald Trump aux présidentielles américaines, et cela dès 2015. Son programme nous a tout d’abord séduits : un souverainisme décomplexé, autour du slogan America first, sa façon d’assumer les idées de puissance de la nation, de limitation drastique de l’immigration, d’un nécessaire retour à l’industrie pour les Etats-Unis. Voilà quel était le fond de son programme, qui n’a fondamentalement pas changé. Nous estimions alors qu’il apportait une réponse crédible à notre inquiétude,  face à la situation géopolitique mondiale. Il faut reconnaître qu’aucune formation occidentale ne proposait alors un programme politique crédible de ce type. Le Rassemblement national, fût un temps, répondait à ces impératifs, mais il ne s’en soucie aujourd’hui que de manière partielle, avec des mutations vers la gauche loin de son ancrage originel.

L’autre raison de l’attrait de la candidature Trump alors reposait dans le personnage : une personnalité connue de longue date aux Etats-Unis, depuis plus de quarante ans, sur le plan économique, médiatique, avec une réelle envergure, et disposant des moyens de son envergure.

Il nous apparaissait clairement qu’en cas de victoire de Trump, si les Etats-Unis réussissaient à appliquer ce programme, cela donnerait une grande force à ceux engagés dans cette voie en Europe. Les positions qui sont les siennes sont sur le continent européen difficiles à défendre : recevoir un encouragement américain serait de ce fait décisif.

Par ailleurs, nous étions à une période où l’interventionnisme militaire américain devenait inutile, coûteux, contre-productif. En regard, l’anti-américanisme devenait hystérique. Nous pensions que la division du monde européen entre Etats-Unis et Russie était néfaste pour l’idéal européen ; le regard porté par Trump sur Poutine était donc une bonne chose.

En France, les voix tenant ce discours étaient très éparpillées, voire isolées au sein même de la droite. Je me souviens des échos défendus par Alain de Benoist ou Bernard Antony, par exemple, qui ne voyaient en Trump rien de plus qu’un clown entrant en politique. Notre avis était que l’on ne peut foncièrement pas être un clown quand on a réussi à construire sur le long cours un empire immobilier (l’un des secteurs les plus difficiles qui soient), et que l’on s’y maintient, y compris à l’échelle internationale.

A partir d’avril 2016, puis de sa victoire acquise aux primaires républicaines, le comité s’est définitivement constitué, tandis que sortaient les signes d’une communication favorable à Trump, sur Radio Courtoisie ou TV Libertés par exemple.

 

Après l’élection de 2016, nous avons pu opérer des rapprochements avec de nombreuses personnalités, y compris aux Etats-Unis. Le 20 janvier 2017 se tenait à Paris au Grand Hôtel une grande soirée rassemblant  des soutiens variés, France 24, généraux et diplomates…

Depuis, nous avons suivi la politique menée par Trump au plus près. Aujourd’hui, grâce notamment au travail de Vivien Hoch, le compte Twitter du Comité Trump France est l’un des seuls (avec le site de dreuz.info) à proposer du quasi heure par heure sur la campagne américaine. Un travail d’expertise reconnu, puisque nous frôlons les 30 millions d’impressions.

Nous sommes peu nombreux, mais très actifs. Nous avons pu compter sur le soutien de personnalités comme Yves Pozzo di Borgo, Serge Federbusch, ou encore comme Olivier Pichon, avec l’Alliance pour la Souveraineté de la France. Le comité rassemble plus largement des amis des Etats-Unis, des juifs parisiens amis d’Israël inquiets des évolutions géopolitiques en cours, et tout simplement des amoureux de la liberté de la nation, du souverainisme, croyant en l’avènement d’une société de libertés (en particulier d’une véritable et saine liberté économique).

 

Liberté politique : La malhonnêteté et le biais pro-démocrate des médias, en France comme aux Etats-Unis, ne sont pas nouveaux… Il suffit de se rappeler la bataille lors de l’élection Bush-Gore en 2000, mais plus récemment, la victoire annoncée d’Hillary Clinton en 2016. Qu’est-ce qui a changé en 2020 ? Pourquoi la situation s’est-elle aggravée ?

 

D’une certaine manière, on pourrait dire qu’il n’y a pas de nouveauté cette année. On est dans la continuité parfaite d’avec ce qui s’est passé dès l’instant où Trump a été en lice. Dès 2016-2017 on a assisté au début des écoutes illégales : le FBI a tout simplement trafiqué des documents pour avoir le droit d’écouter l’entourage de Trump alors même qu’Obama et Biden étaient encore au pouvoir.

Des attaques de ce type ont émaillé tout le mandat ; l’hystérie dont on sortait à peine en janvier 2020, avec la fin du scandale de la tentative de destitution de Trump (rejetée au Sénat), sur la base de dénonciations notamment de fonctionnaires du Conseil national de Sécurité, a repris de plus belle avec le coronavirus, largement instrumentalisé par les démocrates dans les Etats tenus par eux. L’hystérie a duré jusqu’au mois d’août. On peut dire qu’en quatre ans, pas un seul mois ne s’est écoulé sans que les adversaires de Trump ne tentent d’imposer une nouvelle affaire, de dénoncer un prétendu scandale. Il est même impossible de tous les dénombrer… Donald Trump Jr. a avoué, en 2018, avoir caché à son père certaines informations rendues publiques, pour tenter de l’épargner tant la pression était à la limite de l’humainement acceptable.

Maintenant, ceci étant dit, oui, il y a eu du nouveau en 2020. Dans ce climat d’hystérie générale et continue, le coronavirus a été une aubaine. Les Etats démocrates en ont profité pour imposer des confinements plus durs là où ils avaient pouvoir pour le faire, et ils ont fait adopter par les Etats concernés le vote par correspondance comme premier mode de scrutin (ce qui a eu pour conséquence de le faire pratiquer par plus de 53 % des votants, contre 2 à 3 % des votants habituellement).

Si l’on prend encore un peu plus de hauteur, il est certain que le phénomène d’aggravation sur 20 ans est absolu. Jusqu’à Kennedy, on peut considérer que démocrates et républicains n’étaient pas dans l’idée de la mise à mort de l’adversaire. Il y a un vrai point de bascule avec l’expérience Clinton. Jusque là, la différenciation entre les partis se faisait sur des questions essentiellement économiques, et surtout fiscales. Il existait un consensus à l’international, ou sur les valeurs. Aujourd’hui, les choses ont changé. Le politiquement correct est devenu une véritable doctrine, qui est la colonne vertébrale des grandes universités produisant les élites. Nous avons aujourd’hui, en face à face, deux sociétés proprement irréconciliables : l’autre détruit ce que vous êtes. Prenons un exemple : une famille lambda, un père, une mère, des enfants, l’attachement à l’Amérique, est devenue tout simplement une réalité insupportable aux yeux des démocrates libertaires. Sans structure d’attachement au pays, refusant même purement et simplement la notion d’attachement, ils sont dans une logique destructrice. Le fossé est tel entre les deux mondes qu’il n’y a plus de possibilités de réconciliation. Les partisans de Trump espèrent pouvoir gagner 4 ans de plus avant une conflagration générale… et même pour le cas où Biden serait finalement élu, la situation serait très délétère. Si le président n’est pas soutenu par les institutions, il bénéficie de très peu de pouvoir direct (moins qu’un président de la République française en tout état de cause).

 

Liberté politique : Pouvez-vous résumer l’état des recours juridiques contre les fraudes électorales ? Les preuves fournies sont-elles suffisantes ?

 

Il faut bien avoir en tête les étapes du processus des recours juridiques, menés par l’équipe d’avocats de Trump sous la direction de Rudy Giuliani. Il a fallu tout d’abord réunir des preuves : un travail complexe et délicat. Les preuves de fraudes sont difficiles à réunir ou à montrer à un tribunal : un tribunal a besoin de preuves écrites, visuelles, vérifiables, or là nous avons surtout des témoignages. Il est donc compliqué de les faire reconnaître. Un gros millier de témoignages ont été recueillis, mais ils doivent passer devant un homme de loi qui va devoir les rédiger, afin qu’ils puissent être authentifiés sous serment : ce sont les fameux affidavits.

 

Les Etats litigieux sont bien connus. Il s’agit principalement des Wisconsin, Michigan, Pennsylvanie, Georgie, Arizona et Nevada (pour ce dernier Etat, les fraudes seraient présentes au niveau présidentiel comme législatif). Le site du Comité Trump France liste l’ensemble des situations frauduleuses relevées, et il y en a de toutes sortes :

-          le cas des votes effectués par morts : 1 300 noms précis, principalement notés en Pennsylvanie ;

-          le cas des bulletins dont le tampon d’arrivée est antérieur au tampon de la poste (Pennsylvanie, Michigan) ;

-          le cas des bulletins apportés par sacs entiers de l’extérieur de l’Etat ;

-          le cas des bulletins comptés après la date du scrutin (comme en Pennsylvanie où la pratique a été autorisée par une loi électorale) 

Il s’git donc de problèmes de légalité divers : légalité de date, d’origine, de manière de remplir les bulletins…

L’équipe Trump rencontre des difficultés pour faire établir des preuves pour la fraude. A cela s’ajoute que des recours sont purement et simplement rejetés par les juges locaux : l’occasion peut être saisie pour remonter jusqu’à l’arbitrage de la Cour Suprême. C’est la stratégie actuelle de Rudy Giuliani. L’obstruction menée sur le terrain par certains démocrates est donc un jeu dangereux pour eux, car cela augmente les chances que les dossiers soient in fine traités par la Cour Suprême.

 

Dans ces affaires de fraude, le problème fondamental est un problème de délai. Il y a une véritable course contre la montre à l’heure actuelle. Le 14 décembre doivent se réunir les grands électeurs pour élire le nouveau président. La stratégie du camp Trump est, en multipliant les contestations, d’empêcher la certification des votes. Il faut tenir le cap jusqu’au 14 décembre. Si le jour J, aucun candidat n’est en mesure de remporter le bon nombre d’électeurs requis, les grands électeurs en prendront acte et renverront l’affaire devant le Congrès. L’élection se fera alors au moyen d’un vote à la Chambre des représentants. Chaque Etat disposera alors d’une voix ; or il y a 30 Etats républicains, qui seront en mesure de voter pour Donald Trump. La situation n’est pas fréquente, mais elle s’est déjà produite au XIXème siècle : en 1801 Jefferson fut élu de cette manière, ayant rassemblé autant de grands électeurs que son adversaire Burr. En 1825 ce fut le cas pour l’élection de John Adams, face à ses concurrents Crawford et Jackson. Il paraît manifeste que les deux partis vont au devant d’une crise majeure le 14 décembre prochain. La fraude massive ne fait plus de doutes pour grand-monde, et l’affaire risque de se terminer par une guerre au couteau…

Il est impossible ici de revenir sur tous les cas de fraude. Je n’en citerai qu’un, à titre d’exemple. Dans un comté du Michigan, le comté de Wyle, disposant d’un système de comptage informatique, 6 000 voix destinées à Trump ont été affectées à Biden par la machine. Le bug fut rectifié sur place. Dont acte. Mais nous savons tous que le bug isolé n’existe pas… et tous n’ont évidemment pas été rectifiés. Pression à la grève, menaces, avocats se menaçant les uns les autres, nous sommes dans un climat de guerre civile. Ou bien dans une atmosphère de mafia digne des années trente. Al Capone est battu !

En attendant, la ligne de Rudy Giuliani est claire : plus les démocrates joueront la carte de l’irrecevabilité des plaintes, plus l’on se dirigera avec assurance vers la Cour Suprême. Tout est donc, selon lui, pour le mieux.

 

Liberté politique : Pourquoi Donald Trump n’a-t-il pu éviter les fraudes électorales alors qu’il les annonçait depuis des mois et qu’il avait très bien identifié le problème ?

 

Il est difficile d’anticiper. Et les moyens de lutte sont complexes à mettre en œuvre : les élections sont à la charge et à la discrétion des Etats. Le pouvoir fédéral n’a aucun pouvoir sur cela. Chaque Etat imprime ses bulletins là où il le veut. Le seul verrou possible est l’Union des Postes, mais elle a été saisie trop tard. La Poste est en bien mauvais état aux Etats-Unis… Trump a changé son directeur juste avant l’été. Mais la puissance syndicale intérieure est telle que le nouveau directeur n’a rien pu faire. Les cadres de la Poste, comme on l’a vu en Pennsylvanie, ont eu un rôle décisif.

 

Liberté politique : Que pensez-vous du rôle joué par l’avocate Sidney Powell ?

 

Sidney Powell est une avocate de très haut niveau. C’est un ancien procureur général. C’est aussi l’avocate du général Flynn, le chef des renseignements militaires de 2011 à 2014, nommé par Donald Trump comme conseiller dans son Conseil national de sécurité, et soupçonné de contacts avec la Russie au motif qu’il avait eu un contact avec l’ambassadeur de Russie à Washington début 2017, à une époque où le FBI cherchait des preuves de l’inféodation de Trump à une puissance étrangère, en l’occurrence la Russie. Flynn a fait l’objet d’écoutes illégales. Sidney Powell s’est battue pour le défendre, et a pu faire établir son innocence : elle bénéficie donc d’un prestige tout particulier. C’est elle qui a lancé aussi l’alerte sur le logiciel Dominion, et qui a établi l’existence de liens entre Soros et la mouvance de Soros, les Clinton et les actionnaires de Dominion.

Là où les choses se compliquent, c’est qu’elle poursuit plusieurs objectifs, et qu’elle s’attaque notamment à la corruption de gouverneurs et de dirigeants d’Etat, et en particulier, en Georgie.

Cela rentre en interférence avec les impératifs de l’équipe de campagne de Trump. En effet, le gouverneur de la Georgie est républicain, et le secrétaire d’Etat de Georgie, et le chef de cabinet du gouverneur également, et ce sont eux qui ont permis dans l’Etat l’utilisation de Dominion : ils ont même été commissionnés pour cela. Powell a eu raison de dénoncer cela. Son indignation est justifiée par ce qu’elle a vu : la fraude couverte par la corruption, et par la corruption de tout le monde, et non des seuls démocrates. Mais en dénonçant cela, elle pose un problème politique majeur à Trump. En effet, en Georgie, l’élection des deux candidats républicains sénateurs a été reportée à janvier car moins de 1 % des voix les séparaient de leurs rivaux. S’ils ne sont pas réélus, mais que les démocrates l’emportent, le Sénat sera partagé à égalité entre démocrates et républicains. Et si Biden est élu, c’est la vice-présidente démocrate, Kamala Harris, assurant constitutionnellement la présidence du Sénat, qui aura la voix prépondérante permettant de faire basculer la chambre haute dans le camp démocrate. Il est donc vital que les républicains puissent compter sur ces sénateurs georgiens. L’enjeu est énorme. La situation politique est inextricable et extrêmement compliquée à gérer pour Trump. En attendant, Sidney Powell poursuit son action, à l’extérieur de l’équipe juridique officielle, et bénéficie toujours du soutien de Flynn.

 

 

Liberté politique : Comment se dessine selon vous l’issue du scrutin ?

 

L’essentiel repose désormais dans les mains de la Cour Suprême.  Le débat va, de ce fait, redevenir beaucoup plus politique au sens strict du terme. Officiellement, la Cour Suprême dispose d’une majorité conservatrice. Mais rien ne permet d’affirmer avec certitude dans quel sens les juges vont faire pencher la balance ; l’histoire récente a montré, par exemple, que le juge Kavanaugh pouvait voter contre les conservateurs. Donc, plus que jamais, rien n’est joué.