Le CCNE a rendu lundi 1er juillet son rapport sur la fin de vie : non à l’euthanasie et au suicide assisté. Pourtant, selon le président de la Fondation Jérôme-Lejeune, les nuances ambiguës et le champ lexical plus que fourni en matière de "laisser" et de "faire mourir" impriment encore davantage la marque du double discours du Comité.
Liberté politique. — Vous parlez de « double discours » du CCNE dans son rapport sur la fin de vie. Ne s’est-il pas prononcé clairement contre l’euthanasie et le suicide assisté ?
Jean-Marie Le Méné. — Le CCNE reçoit des encouragements de toutes parts après la publication de son avis sur la fin de vie lundi dernier. Certains y voient un strict attachement à la loi Léonetti, d’autres son évolution. Les opposants à l’euthanasie, qui redoutaient un feu vert du Comité, sont soulagés quand ceux qui le réclamaient ne semblent pas déçus outre mesure, conscients que les barrières vers un changement de la loi tombent une à une dans l’entente générale.
Le président de la République, lui, sera très à l’aise pour s’appuyer sur cet avis n°121 et appeler de ses vœux un projet de loi avant la fin de l’année. Le CCNE est incapable de poser des limites éthiques. Il noie une fois de plus le sujet dans la sémantique et ouvre un boulevard aux interprétations partisanes.
Quelle est votre analyse de l’avis n° 121 du CCNE ?
Deux orientations émergent a priori de cet avis : le rejet de l’euthanasie et du suicide assisté d’une part, et l’attachement à la loi Léonetti d’autre part. Mais loin de donner des limites éthiques claires, le comité refuse même de se prononcer sur la définition de principes fondamentaux, comme celui de la dignité humaine. Pour le CCNE, celle-ci pourrait en effet se définir à la fois comme le respect de la vie jusqu’à son terme et comme la liberté de choisir de mourir.
En s’attachant uniquement à l’analyse des cas individuels et de procédures particulières, le CCNE multiplie les exceptions, qui deviennent la règle, alors que l’enjeu est la promotion du bien commun.
Pourtant, le CCNE semble attaché au respect de la loi Léonetti. N’est-ce pas là l’expression de son souci du bien commun ?
Tout au long de son rapport, le CCNE semble se ranger derrière la législation actuelle. À plusieurs reprises, il affirme l’existence d’un droit à la sédation profonde, soi-disant issu de la loi Léonetti. Mais il s’agit en réalité d’un glissement fondamental qui ne correspond pas à une lecture fidèle de la législation en vigueur.
En résumé, le CCNE ne donne pas de feu vert explicite à l’euthanasie, mais il introduit un droit à la sédation profonde, qu’il fait dériver d’une interprétation extensive de la loi actuelle. Celle-ci, de fait, n’a plus besoin d’être modifiée. L’avis n°121 s’inscrit à la suite du rapport Sicard et de celui de l’Ordre des médecins qui jouent sur les mots et font le lit d’une tendance bien nette : non à l’euthanasie, trop polémique aujourd’hui, oui à la sédation profonde, qui conduit au même effet.
Loin d’indiquer des limites éthiques nécessaires à la société, le CCNE est fidèle à sa pratique d’encadrement des dérives. Il s’agit toujours d’accommoder la transgression éthique au rythme d’acceptabilité de l’opinion. Le CCNE est un faux ami des professionnels et des usagers de la santé. Mais un vrai complice du pouvoir, comme l’indique son mode de recrutement : c’est un comité d’éthique étatique.
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