Source [Contrepoints] Pour Erdogan, tous les dérivatifs susceptibles de raviver la flamme idéologique de ses partisans sont les bienvenus.
« Nous ne renoncerons pas aux caricatures, aux dessins […] parce qu’en France, les Lumières ne s’éteignent jamais », a réaffirmé le Président Macron dans son hommage à Samuel Paty, cet enseignant décapité le 16 octobre dernier par un terroriste islamiste tchétchène pour avoir montré à ses élèves des caricatures du prophète Mahomet dans le cadre d’un cours sur la liberté d’expression.
Il n’en fallait pas plus au Président turc Recep Tayyip Erdogan pour entrer dans une violente fureur contre la France et contre Emmanuel Macron, taxant ce dernier de malade mental (vidéo ci-dessous, 01′ 27″) et appelant non seulement les Turcs mais tous les musulmans à boycotter immédiatement les produits français.
En cause, « l’islamophobie » entretenue par la France et plus généralement les pays européens, ainsi que leur traitement des musulmans qui rappellerait selon lui la façon dont les nazis ont traité les juifs pendant la Seconde Guerre mondiale.
Inutile de dire que les relations entre la France et la Turquie sont maintenant au plus mal. Elles étaient déjà extrêmement tendues avant l’été, Paris suspectant Ankara de briser l’embargo sur les armes à destination de la Libye, et elles s’étaient encore aigries avec le conflit du Haut-Karabakh qui a éclaté fin septembre. Avec ses dernières déclarations, Erdogan a fait déborder le vase à tel point que la France a rappelé son ambassadeur à Paris « pour consultation ».
Mais d’une certaine façon, on serait presque tenté de remercier le Président turc de faire étalage de tant d’outrance :
D’abord parce qu’il nous confirme une fois de plus qu’il est bien ce dirigeant autocratique qui rêve de s’imposer sur la scène internationale comme le « grand sultan » d’une Turquie réislamisée prenant sous son aile l’ensemble de l’oumma, en espérant au passage faire oublier dans un regain de nationalisme et de fondamentalisme religieux les graves difficultés économiques que traverse son pays depuis quelques années.
Et ensuite parce qu’il fait aussi apparaître par comparaison combien certaines réactions occidentales à l’assassinat de Samuel Paty déclinées sur le mode « oui, c’est horrible, mais les caricatures, ce n’est pas de la liberté d’expression, c’est une attaque de l’islam » sont en fait alignées sur la propagande de l’un des pires dictateurs de la planète.
Sur le plan économique, il n’est pas dit que les appels au boycott des produits français seront très suivis. Le marasme est tel que la Turquie pourra difficilement se passer des entreprises françaises et des nombreux emplois qu’elles assurent, notamment dans les grandes villes.
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