Fini le cordon sanitaire, bonjour le « champ républicain » ! Désormais, pour décrédibiliser un adversaire politique, il s’agit de dire qu’il n’est pas dans « l’arc républicain », c’est-à-dire qu’il ne correspond pas au credo imposé par l’Etat de droit, notion très fluctuante qui correspond aujourd’hui à un ensemble de critères qui intègrent ou non un pays dans le camp du bien (légifération progressiste, question migratoire…).
Mélenchon : l’arc rouge, Le Pen : l’arc bleu
La question du champ républicain revient à la mode depuis plusieurs mois pour discréditer La France Insoumise et faire imploser l’alliance des gauches. Les équipes de Mélenchon font en effet dans la provocation permanente à des fins électorales.
Ainsi, en se plaçant, sans aucune nuance, hier du côté d’un délinquant en refus d’obtempérer et aujourd’hui en cultivant une ambiguïté vis-à-vis des attaques du Hamas, le message est clair : entretenir une clientèle électorale dans le segment « banlieue ». Si le calcul est compréhensible de son point de vue, il expose LFI au risque de voir ses partenaires à gauche l’abandonner. La nouveauté est ici la diabolisation d’une formation politique, les Insoumis, avec les méthodes qui étaient jadis appliquées au Front National.
La mise au ban, très relative, de la gauche mélenchoniste ne signifie cependant pas l’intégration totale de Marine Le Pen dans le fameux champ républicain. Pour cela, chacun décernera les diplômes de respectabilité à sa manière. Ainsi le patron du Crif Yonathan Arfi s’est insurgé contre la présence du RN lors d’une marche contre l’antisémitisme organisé dimanche 12 novembre. De son côté, l’avocat Serge Klarsfeld qui a consacré sa vie à cette question estime qu’«il faut se réjouir » de la présence du RN à une telle marche….
Qui choisit la respectabilité ?
Le concert de jacasseries s’est poursuivi à propos de cette fameuse manifestation avec les présidents du Sénat et de l’Assemblée nationale (LR et majorité présidentielle) qui ont affirmé vouloir participer à la marche mais pas à côté du RN… Le journaliste Guillaume Tabard du Figaro est revenu pertinemment sur le bal des hypocrites que constitue les postures autour de ce rassemblement.
Chacun y va donc de son discours pour juger qui est digne de respect ou non.
Il conviendrait néanmoins de noter qu’au premier tour de la présidentielle en 2022, Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon ont obtenu à eux deux plus de 15 millions de voix contre moins de 10 millions pour Emmanuel Macron. Pour ce scrutin, il s’agit d’avoir à l’esprit que l’ensemble des voix du fameux « arc républicain » est inférieur à celui des partis diabolisés. En disqualifiant longtemps le FN puis RN, c’était une part importante et croissante des électeurs qui étaient visés. En ajoutant désormais LFI et ceux qui sortiraient du champ républicain (LO, NPA, Reconquête, DLF), c’est la majorité des électeurs qui est marginalisée. Un tel état de fait ne peut qu’entretenir la défiance à l’égard des institutions et donc renforcer les partis qui mettent en cause un système politique qui semble s’essouffler…
Olivier Frèrejacques
Président de Liberté Politique
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