No pasarán ! La comédie de la « résistance » journalistique contre Vincent Bolloré

Source [Elements] : Le Landerneau médiatique est sens dessus dessous depuis la nomination de Geoffroy Lejeune à la tête du « Journal du dimanche ». L’empire du mal – celui de Bolloré – étend son emprise sur des médias centraux pourtant largement acquis au gauchisme culturel. « In-ac-cep-ta-ble », rétorquent les sociétés de journalistes avec l’unanimité troublante de la pensée unique. Le 24 juin, Reporters sans frontières a organisé l’une de ces soirées typiquement parisiennes dites « de résistance » qui ressemblent à un cocktail mondain. Enquête au cœur de l’entre-soi journalistique avec les reporters de l’école de journalisme d’« Éléments » (promotion 2023), réalisée en partenariat avec l’OJIM, l’Observatoire du journalisme. À la manœuvre, nos deux Routetabille : Romain Sens et Julien Destrago.

Au théâtre ce soir

« Théâtre libre », au 44 boulevard de Strasbourg à Paris. Une foule inhabituelle piétine au milieu du boulevard de l’Afrique. Des hommes soja brandissent des pancartes aux couleurs arc-en-ciel « Soutien au JDD contre Bolloré », « Pour l’indépendance des médias ». Tous arborent fièrement leur carte de presse : ce sont des journalistes français.

Jean-Marc Dumontet, propriétaire d’une bonne demi-douzaine de salles de théâtre parisiennes et conseiller de Macron à ses heures perdues, a mis gracieusement à disposition de Reporters sans frontières l’ancien Eldorado pour un grand meeting contre l’arrivée de Geoffroy Lejeune, ancien directeur de la rédaction de l’hebdomadaire Valeurs actuelles à la tête du Journal du Dimanche. Il y a péril : « C’est un acte civique », assure le producteur de Nicolas Canteloup au journal Le Monde.

La gauche lib-lab est en émoi

Du Figaro à L’Humanité, plus de trente sociétés de journalistes soutiennent la grève des journalistes du JDD. Dans la salle, des jeunes ouvreuses distribuent des caricatures de la dessinatrice Coco : Bolloré et Lejeune saucissonnant le JDD d’une corde, avec pour slogan « La liberté de la presse selon Bolloré… on n’en veut pas. » Dans le hall, la cohue des quinquagénaires aux cheveux gris et aux visages pâles contrastent avec la population du quartier.

Visiblement satisfait de l’affluence, Christophe Deloire, président de Reporters Sans Frontières (RSF), félicite l’assistance : « C’est bien. Vous êtes tous là. » Côté ambiance, c’est Jean Massiet, animateur d’une émission sur Twitch qui joue le Monsieur Loyal. Après une brève introduction, la rédaction du JDD est longuement applaudie. C’est au tour de Christophe Deloire de présenter son documentaire « Méthode B ». Pendant vingt minutes, des vidéos de Pascale Clark, Arié Alimi, Patrick Cohen tournent en boucle sur fond de musique qui fait peur. Clark lance le prêche : « Le journalisme est l’information et non pas l’opinion. » Cohen abonde, à moins que ce soit Arié Alimi, l’avocat de Jean-Luc Mélenchon : « Le journalisme est la Vérité. Pas la recherche de la vérité. » Christophe Deloire reprend la parole et assure la main sur le cœur : « La liberté de la presse n’est ni de droite, ni de gauche, ni du centre. » Enfin, elle est surtout de gauche et libérale, vu les invités politiques « transpartisans » : la secrétaire nationale d’EELV Marine Tondelier, les députés LFI Alexis Corbière, Clémentine Autain, Raquel Garrido et Éric Coquerel, le sénateur PS David Assouline, les macronistes Laurent Esquenet-Goxes et Violette Spillebout. Les syndicats se pressent eux aussi en rangs serrés pour la défense de la corporation : Antoine Chuzeville, secrétaire général du Syndicat national des journalistes (SNJ), Yohann Labroux Satabin, de la CFDT, et Sophie Binet, nouvelle secrétaire générale de la CGT. L’exposé de cette dernière sur « la propagande Bolloré » est très applaudi.

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