A l'orée de l'élection présidentielle, Liberté Politique a recensé pour vous les propositions des différents partis quant à la justice. Presque uniquement sociale à gauche, elle se veut plus ferme à droite et plus indépendante partout. En voici l’état des lieux.
Front National
« La justice est le fondement de toute société. » Sans elle, le monde sombre – est en train de sombrer, selon Marine Le Pen – dans la violence et la peur. « Pour corriger cette réalité, il faut de la justice et des juges respectés, que le pouvoir ne réduit pas au statut de petits pois… ».
Or le budget de la Justice se réduit comme peau de chagrin (37ème budget de l’Etat) à la différence de la délinquance ; les magistrats et procureurs sont moins nombreux, proportionnellement, qu’en Slovénie ou en Bulgarie ; les affaires traînent ; les prisons sont surpeuplées (56 000 places de prison contre 64 000 écroués) et les crimes impunis. Le Front National conteste la politisation du juge et se préoccupe de la situation des mineurs.
Si elle est élue, Marine Le Pen affirme, en substance, que :
- le budget de la Justice sera revalorisé de 25% en cinq ans ;
- en conséquence, le nombre de magistrats sera revu à la hausse afin de rendre la Justice plus rapide, et donc plus juste : la France doit viser le ratio de 20 magistrats pour 100 000 habitants en 2017, contre 12 pour 100 000 aujourd’hui ;
- le rattachement de l’administration pénitentiaire au ministère de la Justice sera sanctuarisé, dans un objectif de cohérence ;
- un vaste plan carcéral sera adopté afin de créer, dans les plus brefs délais, 40 000 nouvelles places de prison ;
- elle fera évoluer la formation et le parcours des magistrats en remplaçant l’Ecole Nationale de la Magistrature par une filière universitaire des carrières judiciaires, formation commune aux avocats et aux magistrats proposant une spécialisation en fin de cursus ;
- elle fera assurer l’application des peines de prison en supprimant les remises automatiques de peine ;
- elle fera redresser le taux d’élucidation des affaires en réformant la garde à vue : la réforme Sarkozy de la garde à vue est un échec selon tous les acteurs du monde judiciaire ; cette réforme sera retirée et remplacée par un système soucieux d’équilibrer droits des victimes et des mis en cause (afin d’assurer le contrôle des gardes à vue, il sera créé un corps de contrôleurs des droits civiques) ;
- les enquêtes seront facilitées, rendues moins onéreuses et donc plus efficaces par l’obligation qui sera faite aux entreprises de vidéosurveillance de communiquer gratuitement les images pouvant intéresser l’enquête ;
- l’indépendance et la neutralité de la Magistrature seront garanties par la suppression du droit d’être syndiqué, de la possibilité de s’engager politiquement ou d’être candidat, d’écrire ou de témoigner au sujet d’une quelconque affaire ayant trait à leur fonction ;
- un traitement énergique et efficace sera réservée à la délinquance des
- la victime retrouvera une vraie place dans le processus judiciaire ;
- la présence des victimes dans les commissions de décision de remise en liberté conditionnelle sera prévue et obligatoire ;
- l’accent sera porté sur l’application réelle des mesures de réparation ;
- un corps d’agent d’accompagnement sera créé afin d’accueillir les victimes et de les accompagner tout au long du procès ;
- la responsabilité personnelle des magistrats en cas d’erreur judiciaire, ou de faute, pourra être engagée, sur le fondement de l’article 1382 du code civil, nonobstant les poursuites disciplinaires ;
- des tribunaux pénaux de proximité seront créés pour traiter les amendes de 5ème catégorie et les délits
- les délinquants étrangers condamnés seront renvoyés chez eux ;
- le soin d’accorder ou pas la libération conditionnelle sera confié à un jury de cour d’assise, après un vrai procès, pour les condamnés à des peines de réclusion criminelle assorties de période de sûreté ;
- la correctionnalisation des affaires criminelles sera soumise à des conditions strictes ;
- le secret de l’instruction sera renforcé ;
- un système de nullité de procédure sera organisé ;
- le principe de l’inamovibilité des membres du parquet à fin d’assurer leur indépendance sera lui aussi organisé.
Debout La République
En porte-à-faux avec Nicolas Sarkozy et son ministre de l’Intérieur, Claude Guéant ; Nicolas Dupont-Aignan prétend que la « réalité demeure sombre » : les violences aux personnes ont augmenté de 70% depuis 2001 et ce sont d’abord les plus jeunes et les plus faibles qui « trinquent ».
Le candidat de Debout La République a pris la violence comme un des principaux chevaux de bataille de sa campagne. Pour la faire reculer, il faut « rétablir l’ordre de juste » et donc recruter 10 000 policiers (pour déjà, combler les départs à la retraite), construire 20 000 places de prison supplémentaires (pour une application plus réelle mais aussi plus décente des peines), supprimer les remises de peine automatiques (en appliquant au moins deux tiers des peines) et restaurer la perpétuité.
Nicolas Dupont-Aignan a pris en grippe les mafias qui contrôlent les réseaux de drogue et à la délinquance financière qui aide à blanchir cet argent. Les infractions financières les plus graves seront criminalisées. Ses adversaires n’ont qu’à bien se tenir.
Union pour la Majorité Populaire
Le communiqué de l’Union pour la Majorité Populaire est lapidaire :
« Première des libertés, la sécurité des Français est une priorité pour notre majorité. C’est un combat permanent que nous poursuivons sans trêve en nous adaptant aux nouvelles réalités et aux évolutions de la délinquance et de la criminalité. Malgré les progrès sensibles, il ne faut pas relâcher l’effort. Au contraire… De la prévention à l’application des peines, consolidons la chaîne de la sécurité qui ne doit avoir aucun maillon faible ! »
Le bilan seul du Président nous permet d’envisager l’avenir or il s’agit sans doute du domaine où il est le plus unanimement contesté.
Mouvement Démocrate
La réforme de la carte judiciaire, parce qu’inégalitaire, gêne François Bayrou ; le malaise de la Justice l’inquiète. Sa priorité est sans doute de rendre à la justice toute son indépendance. Le ministre de la Justice aurait un statut particulier. Sa nomination, proposée par le duo exécutif, devrait être soumise à l'approbation d'une majorité qualifiée du Parlement, devant qui il serait individuellement responsable et par qui il pourrait être censuré. C'est lui qui conduirait au nom du gouvernement la politique pénale de la nation.
Cette indépendance serait d’ailleurs saluée par l’Union Européenne.
Parti Socialiste
Le programme de François Hollande se cristallise autour de ses deux élans pour la justice :
« Je veux donner à la police et à la justice les moyens de nous protéger »
« Je mettrai en œuvre une nouvelle sécurité de proximité assurée par la police dans nos quartiers et la gendarmerie dans les territoires ruraux. Je créerai des zones de sécurité prioritaires où seront concentrés davantage de moyens. Je doublerai le nombre de centres éducatifs fermés pour les mineurs condamnés par la justice en les portant à 80 durant le quinquennat. Je créerai, chaque année, 1000 postes supplémentaires pour la justice, la police et la gendarmerie. »
« Je veux donner un nouvel élan à notre démocratie »
« Je garantirai l’indépendance de la justice et de tous les magistrats : les règles de nomination et de déroulement de carrière seront revues à cet effet ; je réformerai le Conseil supérieur de la magistrature. J’interdirai les interventions du gouvernement dans les dossiers individuels. Je remettrai à plat la procédure pénale pour la rendre efficace dans le respect des principes fondamentaux de l’Etat de droit. L’accès à la justice de proximité pour tous les litiges portant sur des aspects essentiels de la vie quotidienne des Français sera facilité. Les peines prononcées seront toutes effectivement exécutées et les prisons seront conformes à nos principes de dignité. »
Europe Ecologie Les Verts
En plus de vouloir instaurer une police et une justice spécialisées contre les « délits environnementaux » (sic), Eva Joly prône une justice plus équitable, plus accessible et plus efficace.
Les écologistes proposent donc :
- une augmentation du budget de la Justice ;
- une justice équitable ;
- une justice accessible ;
- la lutte contre les délits environnementaux ;
- le développement de la justice réparatrice ;
- la défense les principes de la Justice des enfants.
Le Parti de Gauche
A l’instar des écologistes, Mélenchon veut créer un Tribunal international de justice climatique sous l’égide de l’ONU.
En France, il veut abroger la RGPP (Révision générale des politiques publiques), terrible au ministère de la Justice, et « réparer » la réforme du Président par la création d’emplois publics (dans la justice et la police notamment). Cependant, la répartition sera revue : ce sont d’abord les communes qui en souffrent. La place de la police de proximité sera redorée.
Comme la plupart de ses collègues, il veut « humaniser » l’univers carcéral et garantir l’indépendance de la justice (en instaurant un Conseil supérieur de la justice à la place du Conseil supérieur de la magistrature, pour moitié élu par les magistrats, pour moitié nommé par le Parlement).
Retrouvez tous les articles de la présidentielle sur la justice dans notre dossier :
- Santé en 2012
- Égalité, parité et discriminations en 2012
- La solidarité en 2012
- Urbanisme, ruralité et aménagement du territoir...
- L’immigration en 2012
- La justice en 2012
- Le programme des partis pour l'Europe
- Un bref bilan financier
- Gouvernance mondiale : les programmes
- Un genre de politique : la théorie du gender en...