Bains de sang en Syrie, impuissance des islamistes « modérés » au pouvoir en Tunisie -harcelés par les salafistes- à contenir l’explosion du chômage et de la corruption, affrontements sanglants en Egypte ballotée entre les frères musulmans, les ultras et l’armée en embuscade, affrontements claniques et anarchie en Libye, combats sans merci entre chiites et sunnites en Irak, guerre civile au Yémen, tensions entre l’Iran et les Pays du Golfe (sunnites), guerre froide entre l’Iran, Israël, l’Amérique et ses alliés occidentaux, déroute de ces derniers en Afghanistan, collusion du Pakistan avec les talibans afghans… L’enthousiasme naïf de l’opinion occidentale pour la révolution démocratique du « printemps arabe » et l’espoir de sa propagation en « terre d’Islam » se sont beaucoup refroidis.
Désillusion et amertume
Mais ce désenchantement n’est rien auprès de la désillusion et de l’amertume des populations en proie au chaos, à l’insécurité et à la misère : sans parler des Irakiens et des Afghans, prétendument libérés depuis une décennie mais plongés au cœur des ténèbres, ni même de la Syrie ravagée par l’insurrection sunnite et la féroce répression du pouvoir, les pays du Maghreb qu’on croyait précurseurs du « printemps » s’enfoncent dans l’hiver. L’Egypte subit l’hémorragie de ses capitaux (9 milliards de dollars en quelques mois) et de ses touristes (14,7 millions par an à la veille de la Révolution), l’insécurité qui vient de coûter la vie à un touriste français suit la courbe ascendante de la misère et des frustrations (au moins 74 morts et 200 blessés graves dans un affrontement entre supporters d’un match de football le 1er février, sur fond de rivalité entre pro et anti Moubarak) ; quant au « miracle économique » de la Tunisie de Ben Ali, il paraît n’avoir été qu’un mirage ( les chômeurs sont passés de 500 000 à 700 000 sur 3,6 millions d’actifs). Ces deux pays attendent toujours -et attendront sans doute longtemps- les 35 milliards de dollars promis par les pays du G8 et les 10,5 milliards que les « frères arabes » destinaient à l’Egypte.
Bachar El-Assad, nouveau « Satan »
La désillusion de l’opinion publique vis-à-vis de l’ébullition démocratique dans les pays arabes trouve un dérivatif dans l’exécration du « dernier tyran » du Moyen Orient, Bachar El-Assad, auquel sont attribués les 6000 morts de la guerre civile syrienne. Oublié, feu Kadhafi qui, par comparaison, apparaît comme un dictateur de seconde zone et finalement « petit bras » ! Bachar El-Assad, bachelier français, médecin (ophtalmologiste) formé à Londres, l’homme timide et maladroit qui ne voulait pas se mêler de politique, est le nouveau « Satan ».
Naturellement, au Maghreb comme au Moyen-Orient, chaque pays a ses spécificités, et on ne sait qui sortira à son avantage des déchirements actuels : les islamistes, l’armée, un dictateur ? Et pourquoi pas une combinaison des trois, par exemple, en Egypte ? Difficile aussi de prédire qui marquera le plus de points dans l’affrontement entre sunnites et chiites. Quoi qu’il en sorte, cela n’aura qu’un très lointain rapport avec la démocratie !
Les minorités paient le prix fort
Une chose paraît malheureusement acquise : les minorités, et particulièrement les minorités chrétiennes (catholiques, orthodoxes, coptes, protestantes -évangéliques notamment au Maghreb) ont tout à redouter et paient déjà le prix fort de ce « printemps arabe », né d’une réelle aspiration à la liberté dans la population urbaine instruite mais vite récupéré par les «barbus » qui tiennent les masses incultes. Qu’il soit sunnite ou chiite, l’islam aux abois menace tous les « infidèles » qui n’ont rien de bon à attendre d’une « démocratie » islamique. Jusqu’alors, les minorités chrétiennes étaient relativement protégées en Irak et, surtout, en Syrie par le pouvoir dictatorial d’un clan minoritaire (les alaouites, hérétiques de l’islam, mais plus proches des chiites que des sunnites) dont la survie était assurée par un subtil jeu d’équilibre entre communautés.
Certes, il se trouve encore des experts -dont la vie et celle de leur famille est rarement menacée- pour croire à l’avènement d’une vraie démocratie dans les pays arabes après, concèdent-ils, une « cure » d’islamiste plus ou moins radical. C’est sacrifier le présent à un futur des plus hypothétiques, en passant pour profits et pertes les populations martyrisées. C’est surtout ignorer délibérément la nature totalitaire de l’islam, toujours et partout instauré et maintenu par le fer, et théologiquement réfractaire à la liberté d’opinion et a fortiori de religion, qui fonde la démocratie. Combien de chrétiens reste-t-il aujourd’hui dans l’ « exemplaire » démocratie turque ?
La Russie, ultime recours des chrétiens ?
Conforté par l’échec piteux de la mission d’observation de la Ligue arabe en Syrie, le véto russe à une condamnation du régime de Bachar El-Assad par l’ONU, réinstalle de facto la Russie dans son rôle protecteur des minorités chrétiennes au Moyen Orient. Moscou ne veut à aucun prix voir rejouer le scénario libyen en Syrie, son dernier allié au Proche-Orient. Pendant ce temps, Damas joue contre la montre. La présidence tournante de la Ligue arabe actuellement exercée par le Qatar, grand allié (sunnite) de la France et des Etats-Unis et très hostile à Assad l’hérétique, reviendra le 1er avril à l’Irak, dont les dirigeants chiites ont intérêt à ménager le voisin syrien. A ce moment-là, sauf coup de théâtre, les élections russes auront réinstallé Poutine dans son trône du Kremlin, tandis que la proximité du premier tour de la présidentielle en France et la montée en puissance de la campagne électorale américaine devraient contribuer à desserrer l’étau sur la Syrie. Au grand soulagement des alaouites (13% de la population), des chrétiens (10%), des kurdes (9%) et des druzes (5%) auxquels les insurgés sunnites promettent la valise ou le cercueil.
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La réalité est beaucoup plus terrible que nous ne savons l'immaginer. Notre beau pays, si nous n'y prenons pas garde, est sur le chemin de ce que nous voyons actuellement : Syrie, Egypte, Serbie, Afganistan, etc. Nous nous vendons aux Emirats qui feront leur politique chez nous, sans que nous ne puissions agir, car il sera trop tard. Ce n'est pas une plaisanterie, seule une réèlle prise de conscience peut infléchir les évènements, concrètement, en sortant de l'Euro construit pour nous détruire, pour engendrer la "crise".
Voir le commentaire en entierAvoir la volonté de sortir du comité (Européen) de Bruxelles avec son armée de 50 000 fonctionnaires. Avoir la volonté politique de revenir aux monnaies nationales, et de vouloir l'Europe des Nations. Il n'existe pas d'autre alternative pour éviter le chaos qui nous guette actuellement. Restons optimistes et offensifs. Il n'y a plus de clivage Droite-Gauche. Ou bien nous sommes Nationalistes Européens. Ou bien nous sommes Mondialistes. Le choix nous appartient, et nous n'avons pas le droit de nous tromper.
Je ne comprends pas pourquoi M. Oswald, depuis sa « campagne libyenne », s'obstine à enfoncer des portes ouvertes :
Voir le commentaire en entier- autour de moi je ne vois personne d'enthousiaste à propos des révolutions arabes : elles sont là et, comme toutes les révolutions, elles font des dégâts ; d’ailleurs, le sort des Arabes laisse les gens plutôt indifférents pourvu que ça ne fragilise pas leur propre sécurité et que ça ne dope pas le prix du super ;
- je ne vois pas pourquoi il faudrait trouver de plus grands mérites à la peste (les dictatures arabes) qu'au choléra (l'influence nouvelle des islamistes dans les sociétés arabes) tout cela parce que les dictatures ont ménagé des niches de survie plus ou moins vivables pour les chrétiens. Sous Moubarak la situation des Coptes était déjà épouvantable. Sous Bachar, le sort des chrétiens était toujours précaire. Comme paradis perdu, on fait mieux…
- comme l'a fort bien souligné François Burgat, l'islamisme a un puissant ressort identitaire. C’est ce qui fait son authenticité. Les partis islamistes "surfent" sur une "certaine idée" que les Arabes se font d'eux-mêmes, de leur pays, du monde arabe et qui est pour l'immense majorité d'entre eux, intimement liée à l'islam ;
- tôt ou tard (mais plutôt tard : 2011) il fallait que l'islamisme sunnite soit confronté à la réalité du pouvoir, après des dictatures délégitimées qui ont elles-mêmes prospéré grâce à une culture politique de soumission marquée par l’islam. Qui aurait pu croire que ce serait une transition de velours ? En France, il y a bien 20 % de l’électorat pour sympathiser avec le Front national. Qu’il y ait 20 % d’Egyptiens pour soutenir les salafistes est-il si surprenant ?
- il n’est donc pas d’un très grand intérêt stratégique de se joindre au concert des pleureuses (je vous l’avais bien dit, l’islam c’est épouvantable…) mais de laisser ces peuples se prendre en main et tenter d’ouvrir un espace politique « civique » qui ne soit pas entièrement investi et dominé par une théologie politique islamique. A cet égard, M. Oswald a tort de tourner en dérision l’évolution politique de la Turquie même si le sort des minorités religieuses est loin d’y être enviable. Il est en tout état de cause inopérant de vouloir plaquer sur les mutations en cours une grille de lecture occidentale comme s’obstine à le faire M. Oswald dont je ne me souviens pas, d’ailleurs, qu’il se soit beaucoup inquiété de l’absence totale de démocratie en Libye ou en Egypte avant que Moubarak ou Kadhafi ne soient renversés. Mais ça ne veut pas dire pour autant qu’il faille renoncer aux principes de portée universelle qui sont les nôtres, d’autant plus que la Tunisie et le Maroc, tout comme l’Egypte, pour d’autres raisons, ne sont pas placés dans la même situation que l’Iran par rapport aux pays occidentaux et que nous ne sommes pas privés de moyens d’influence. Chaque pays doit être abordé en fonction de ses spécificités et l’épouvantail afghan n’est d’aucune utilité surtout quand on parle du Maghreb.
- enfin on me permettra de penser que M. Poutine a d’autres soucis que ceux de protéger les Chrétiens d’Orient… Il essaie de sauver l’un des derniers points d’appui des débris de l’empire russe au Proche-Orient, c’est tout. Et si possible d’empêcher que les feux de la contestation contre les régimes politiques illégitimes ne se propagent chez lui. La question n’est pas tellement celle de la réélection de M. Poutine, mais celle de son autorité réelle après les élections même s’il les gagne.
Bref, on n’est pas dans une « débâcle générale » mais dans une période de crise et de mutation qui n’est certainement pas sans danger ni risque de régression. Il ne sert à rien de regretter les stagnations antérieures auxquelles on ne reviendra pas, quoi qu’il arrive.
Ok sur le diagnostic des pays arabes.
En Afghanistan, l'objectif initial n'était pas les populations locales mais le risque pour la sécurité internationale d'un Etat Mollah.
Le diagnostic étant posé, que faire ? La fin (protéger les chrétiens, éviter le risque d'installation de régimes islamistes) justifie-t-elle les moyens (soutien aux dictatures et à leurs exactions) ?