[Document France catholique- À l'occasion de la nomination d'un assistant ecclésiastique pour la congrégation Saint-Jean, certains médias ont tenté de régler son compte à la jeune communauté. Son Prieur général, le père Jean-Pierre-Marie, 41 ans, répond avec des faits vérifiables.
Ce document, disponible sur le site Internet de la Congrégation, sera publié par la Lettre aux amis des Frères de Saint-Jean d'avril 2003.]
La congrégation des Frères de Saint-Jean a été fondée en 1975 par le père Marie-Dominique Philippe. Dans une première étape, elle a été rattachée à l'abbaye cistercienne de Lérins. Après ce temps d'expérimentation, elle a été reconnue en 1986 comme un "institut religieux de droit diocésain", dépendant de l'évêque d'Autun, Chalon et Mâcon, actuellement Mgr Raymond Séguy. Comme tout institut de vie religieuse, elle est aussi placée sous la vigilance du pape, à travers la Congrégation pour les instituts de vie consacrée et les sociétés de vie apostolique, dont le préfet responsable est aujourd'hui le cardinal Eduardo Martinez Somalo.
Pour suivre la vie de la jeune congrégation dans sa croissance et l'aider dans ses tâches de gouvernement et de formation, le cardinal Martinez Somalo a demandé à Mgr Séguy de nommer auprès d'elle un "Assistant religieux". Depuis début janvier 2003, Mgr Joseph Madec, évêque émérite de Fréjus-Toulon, a été désigné par Mgr Séguy pour être cet Assistant, pour une durée de deux ans, qui pourra être prolongée.
Comme Assistant religieux, Mgr Madec est envoyé pour coopérer avec les autorités de la Congrégation, en particulier auprès du Prieur général. Selon les mots du cardinal Martinez Somalo, "il ne doit pas se substituer au gouvernement central de l'Institut, mais, connaissant bien la marche de l'Institut, il a surtout à remplir un service de conseil, de guide et de persuasion". Il sera comme un conseiller, avec droit de vote au Conseil du Prieur général. Il peut, s'il le juge nécessaire et opportun, consulter d'autres personnes, à son libre choix, dont le père Hubert Niclasse, religieux dominicain, indiqué dans le Décret de Mgr Séguy.
Nous remercions vivement Mgr Madec, bien conscients de la générosité qu'il y a à accepter une telle mission, et nous sommes vraiment reconnaissants à Mgr Séguy d'avoir eu à cœur de choisir un évêque qui a bien connu les frères, durant plus de quinze ans, dans le diocèse de Fréjus-Toulon, et d'avoir su le persuader d'accepter.
À l'occasion de cette nomination de notre Assistant religieux, différents médias en France (La Croix, Le Monde, Le Figaro, Europe 1, France 3 Rhône-Alpes...) ont parlé de la Famille Saint-Jean depuis le 6 février 2003. Nous avons été sensibles à la date du 6 février, jour anniversaire du départ de Marthe Robin pour le ciel ! Certains d'entre vous ont pu être troublés par des affirmations et des interprétations alarmistes ; je voudrais ici vous donner quelques éléments de réponse objectifs.
1/ L'Assistant religieux
L'ambiguïté du langage utilisé dans les médias est à noter : "tutelle", communauté "sous contrôle" ou "encadrée".
On est bien loin de la juste compréhension de ce qu'est un Assistant religieux dans l'Église : celui-ci n'est pas directement une autorité de gouvernement, mais son rôle est d'accompagner la vie de la communauté, de conseiller les autorités et de participer aux instances du gouvernement. Et c'est pour donner le temps de la connaissance mutuelle et pour permettre une véritable coopération que sa mission est habituellement assez longue.
Le cardinal Martinez Somalo motivait ainsi la demande qu'il a faite à Mgr Séguy de nommer un Assistant : "La Communauté Saint-Jean est en train de prendre une place importante dans l'Eglise par la croissance de ses vocations et son extension dans les diverses parties du monde. Pour cela, elle mérite une attention particulière afin de pouvoir continuer à se développer et à croître en maturité convenablement."
Cette désignation de Mgr Madec par Mgr Séguy est pour nous signe d'espérance. Dans les épreuves que nous traversons et les défis de la croissance qui sont les nôtres, nous sommes heureux de pouvoir compter sur l'appui que nous offre ainsi l'Église.
2/ Quelques chiffres
Tableaux statistiques au 6 février 2003 :
1/ ETAT ACTUEL
- Nombre de frères actuellement dans la Congrégation (incluant novices, profès temporaires, profès perpétuels, oblats réguliers ; on ne compte donc pas les postulants) : 500, dont
. Oblats réguliers : 36
. Novices : 53
. Profès temporaires : 98
. Profès perpétuels non-clercs : 97
. Profès perpétuels diacres : 37
. Profès perpétuels prêtres : 179
2/ STATISTIQUES SUR 27 ANS (depuis notre fondation le 8 décembre 1975)
- Nombre total de frères entrés en Communauté (= entrés au noviciat) : 795
- Nombre de frères décédés : 14, dont 11 étaient profès perpétuels et 6 prêtres
- Nombre de frères sortis de la Congrégation avant un engagement définitif : 237, dont
. Novices : 102
. Profès temporaires : 109
. Oblats réguliers : 26
- Nombre de frères sortis de la Congrégation après leur engagement définitif : 44 (25 sont encore religieux ou clercs), dont
. Profès perpétuels non-clercs entrés dans une autre Cté religieuse: 2
. Profès perpétuels non-clercs retournés à l'état laïc : 8
. Profès perpétuels diacres partis pour une autre Cté religieuse ou un diocèse : 3
. Profès perpétuels diacres réduits à l'état laïc : 2
. Profès perpétuels prêtres partis pour une autre Cté religieuse ou un diocèse : 20
. Profès perpétuels prêtres réduits à l'état laïc : 9
(N.B. : sont inclus également dans ces chiffres les frères qui ont demandé de sortir et dont la procédure est en cours)
Commentaire. Pour vous aider à lire ces chiffres, voici quelques remarques :
- La proportion de frères sortis avant la profession perpétuelle (29,8 %) s'établit à un niveau normal, en comparaison avec les autres instituts religieux. Ces départs intervenus avant la profession perpétuelle indiquent le sérieux du discernement et la liberté de choix dont disposent les frères.
- Par rapport au nombre de tous les frères ayant fait profession perpétuelle (368), la proportion de ceux qui sont repartis dans l'état de vie laïc (19) est de 5,16%.
- Par rapport au nombre de tous les frères prêtres et diacres (256), la proportion de ceux qui sont repartis dans l'état de vie laïc (11) est de 4,3% (pour comparaison, un évêque français nous disait que 7,4% des prêtres qu'il avait ordonnés sur une quinzaine d'années avaient quitté le sacerdoce ; bien sûr, on ne peut pas se réjouir de cette comparaison, mais elle évite les interprétations abusives).
- Certains parlent d'une "hémorragie" liée à un malaise intérieur à la congrégation (on a même entendu parler de 70 départs depuis un an). Chaque départ est douloureux pour tous. Depuis début 2002, 6 profès perpétuels prêtres ont demandé à nous quitter pour entrer dans l'ordre dominicain, ainsi qu'un profès perpétuel non clerc et trois profès temporaires. Un profès perpétuel prêtre cherche la congrégation où il pourra vivre son appel (ils sont inclus ci-dessus dans les tableaux des frères sortis).
3/ Les faits incriminés
Dans les articles parus, on nous accuse de différents faits qui permettraient de parler de nombreuses et graves " difficultés " pour la congrégation.
- "Scandales publics". On nous accuse de problèmes de mœurs à Boulogne et aux Pays-Bas.
À Boulogne, suite à une information donnée à la justice, un frère a été mis en examen en juillet 2001 pour "viol par personne ayant autorité". La jeune femme, victime présumée, qui n'a pourtant jamais porté plainte devant la justice ni ne s'est constituée partie civile, a reconnu depuis que ce fait a été inventé et notre frère en est donc totalement blanchi.
Aux Pays-Bas, il n'y a eu aucune accusation en justice. D'entente entre les parties, une procédure ecclésiastique a eu lieu, il y a bientôt 4 ans : les décisions ont été exécutées.
- Nombreux départs "souvent accompagnés de graves dépressions". Que veut-on dire par nombreux ? Compte-t-on les départs avant l'engagement définitif ? Quant aux graves dépressions, quelles sources ?
- Le départ du Collège Stanislas.À la demande de l'archevêque de Paris, la congrégation a rendu pendant 6 ans un service pour l'aumônerie de cet établissement scolaire. À la fin de la convention, l'archevêché a confié d'autres charges aux frères dans le diocèse. Un an plus tard, la congrégation, qui avait d'autres priorités de fondation, d'un commun accord avec l'archevêque, a décidé de se retirer.
- "Deux suicides". Il semblerait qu'il s'agisse d'une part du cas d'une jeune femme lituanienne accueillie temporairement par nos sœurs contemplatives, mais n'étant pas membre de leur congrégation, dans un pays terriblement marqué par le fléau du suicide ; et d'autre part, de sœur Hélène, professe perpétuelle : sa mort, survenue dans l'établissement spécialisé où elle était en soins, est interprétée comme un suicide, mais nous n'en savons réellement rien, car personne n'était présent et qu'elle n'a rien écrit en ce sens. Nous devons laisser ce secret à Dieu. Sa dernière lettre restait pleine d'espérance et elle envisageait son retour prochain à son prieuré d'assignation.-
-"Dérives sectaires". Les chiffres rappelés ci-dessus, qui manifestent l'existence d'un discernement des vocations et le respect de la liberté de choix, fournissent déjà des éléments objectifs de réponse. L'insertion ecclésiale de chaque prieuré dans les diocèses qui nous appellent montre aussi suffisamment l'hypocrisie de cette accusation. À titre d'exemple, voici quelques charges confiées par des évêques à des frères en France et hors de France :
- Nbre de diocèses où la Congrégation des frères est présente : 19 (Etranger = 26)
- Nbre de frères curés ou vicaires : 39 (Etranger = 20)
- Nbre d'établissements universitaires dont les frères sont aumôniers : 0 (Etranger = 7)
- Nbre d'établissements scolaires dont les frères sont aumôniers : 14 (Etranger = 7)
- Nbre de sanctuaires où les frères ont reçu une charge (recteur ou chapelain) : 3 (Etranger = 3)
Ces événements sont permis pour nous renforcer dans l'espérance et dans notre détermination à chercher la vérité, dans l'amour. Sachons aussi les mettre à leur juste place ! Au début de cette année, je participais à la rencontre du Vicariat Europe à Bucarest, quelques jours plus tard, je visitais nos prieurés du Sénégal et du Togo, avant de participer au Forum "Amour et Vie" à Genève : autant d'occasions de rendre grâces pour la vitalité de nos communautés. Et nous avons commencé à travailler avec Mgr Madec ; nos échanges sont marqués d'une grande simplicité. Je confie très spécialement à votre prière la coopération qui s'engage, pour qu'elle porte tous les fruits que la Vierge Marie en attend.
Fr. Jean-Pierre-Marie, prieur général.
Document à paraître dans le numéro 2871 de l'hebdomadaire France catholique, daté du 28 février.
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