Source [Le Figaro] Le secteur industriel français est dans une spirale descendante depuis la fin des «Trente glorieuses», constate l’économiste Claude Sicard. Le Commissaire au Plan aura selon lui fort à faire.
FIGAROVOX.- L’économie française se trouve dans une impasse avec la crise, et le Premier ministre Jean Castex a proposé la mise en place d’un nouveau «Commissaire général au plan». En quoi consiste cette fonction et pourquoi est il nécessaire de remettre en place une structure disparue depuis 2006?
Claude SICARD.- Il va falloir qu’un nouveau «Commissariat Général au Plan» (CGP) soit mis en place, et qu’il s’attelle rapidement à la tâche. On ne parviendra pas à reconstruire le pays autrement. Et l’on se souvient que le général de Gaulle avait parlé, en son temps, d’une «ardente obligation». Le Commissariat au Plan a disparu en 2006, et il a été remplacé par une simple cellule de réflexion et d’analyse, dont le rôle est devenu, les années passant, tout à fait marginal. Cela a résulté du fait que l’on a changé de modèle, comme Jean Louis Beffa l’a expliqué dans son ouvrage La France doit choisir.On a abandonné notre modèle traditionnel qu’il a qualifié de «commercial-industriel» pour adopter le modèle anglo-saxon «libéral-financier», ceci s’explique par la mondialisation et la poussée du libéralisme. En fait, notre pays n’a pas vraiment viré vers le libéralisme, il a opté pour un système mixte dans lequel l’État intervient toujours beaucoup dans la vie économique du pays. On a donc fait une erreur en abandonnant le CGP: c’était un organe d’étude, de réflexion, et de concertation, bien plus qu’un organe de planification, et le mot «Plan» ne signifiait nullement d’ailleurs une planification contraignante et autoritaire à la mode soviétique. Il s’agissait simplement d’une planification indicative qui traduisait les grandes options stratégiques de la puissance publique. Il faut donc en revenir à un tel système.
Quels sont selon vous les secteurs qui nécessitent une action urgente de la part de l’État?
Le gouvernement hollandais dans sa politique d’intervention dans l’économie du pays qualifie de «top- sectors» les secteurs clés qui soutiennent l’activité économique du pays. La construction automobile, l’industrie agro-alimentaire, la machine-outil et la chimie dans le cas de l’ Allemagne ; la construction automobile, l’agro-alimentaire, la construction aéronautique et spatiale ainsi que l’industrie du luxe, dans notre pays. La France, dans le secteur du luxe, est leader au plan mondial, et c’est un secteur qui se remettra sans doute plus facilement de la crise. Il va donc falloir soutenir plus vigoureusement les trois autres filières.
Il faudrait donc placer notre pays au cœur d’une industrie européenne de l’armement, secteur dans lequel nous disposons de beaucoup d’atouts.
Tout d’abord, l’industrie automobile était déjà en difficulté, avant la crise actuelle. Pour deux raisons: le fait que le marché européen soit entré maintenant dans sa phase de maturité, ce qui signifie une croissance zéro, et la mutation rapide et forcée vers le véhicule électrique où la batterie représente 40 % de la valeur d’un véhicule, un composant clé, qui nous vient de Chine. Quant à la filière agro-alimentaire, battue à l’exportation depuis quelques années par les Hollandais et les Allemands, elle était en difficulté bien avant l’arrivée du coronavirus. Il va donc falloir vigoureusement aider ces deux «top-sectors» à se restructurer. Quant au secteur aéronautique, il va devoir passer la crise, étant entendu que la reprise sera très lente. Le secteur automobile est, des quatre top- sectors, le plus préoccupant, et il faudrait donc, dans la ligne de ce que veut faire le Commissaire européen Thierry Breton, placer notre pays au cœur d’une industrie européenne de l’armement, un secteur dans lequel nous disposons de beaucoup d’atouts, et qui pourrait devenir si Thierry Breton pouvait gagner son pari, le cinquième «top- sector» de notre économie, les commandes venant abondamment dans les années prochaines des divers autres pays européens..
Mais ce sera, évidemment, à ce nouveau Commissariat au plan, de déterminer quels seront les secteurs sur lesquels il va falloir miser pour assurer l’avenir de notre pays.Retrouvez l'intégralité de l'article en cliquant ici
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