Si François Hollande accède à la magistrature suprême, il élargira l’accès aux méthodes d’assistance médicale à la procréation. Analyse d’une vision ultralibérale aux conséquences dévastatrices pour la famille.
En cas de victoire aux élections présidentielle et législatives, la gauche affranchira les familles « d’un ordre moral qui les renvoie à un état de nature dépassé [1]». Une des premières mesures prises en matière de bioéthique sera ainsi d’ouvrir l’assistance médicale à la procréation (AMP) aux couples de femmes homosexuelles[2].
Depuis la publication en 1987 de la première instruction doctrinale sur la bioéthique Donum vitae confirmée par Dignitas personae en 2008 jusqu’au tout récent discours de Benoît XVI devant l’Académie pontificale pour la Vie le 25 février dernier, l’Eglise a indéniablement fait preuve de courage et de cohérence dans l’évaluation morale des procréations artificielles : en manipulant l’acte conjugal de telle sorte qu’il n’exprime que sa dimension reproductive – excluant de facto le langage des corps et l’union affective et spirituelle des conjoints –, les techniques artificielles de fécondation ne pouvaient que dégrader la signification anthropologique plénière de la sexualité et de la procréation humaine et déboucher sur les pires transgressions : productions et tri d’embryons surnuméraires, irruption d’un tiers dans la relation du couple en la personne d’un donneur de gamètes,... Une enquête très intéressante menée par l’Institut national d’études démographiques (Ined) chez des couples engagés dans un parcours d’AMP a confirmé indirectement l’analyse éthique du magistère il y a quelques années[3]. Les sociologues y évoquaient ainsi dans leur rapport une « activité sexuelle transgressive et non conjugale » dont « la déshumanisation [...] pourrait correspondre à la disparition de l’acte amoureux ».
Nouveau modèle pour la procréation
Jusqu’à aujourd’hui toutefois, la France a continué à s’inspirer du « cadre naturel » de la conception humaine pour encadrer l’insémination artificielle et la fécondation in vitro, notamment en continuant à faire référence à la complémentarité et à l’altérité sexuelle des parents. La loi du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique réserve ainsi l’AMP aux couples hétérosexuels, composés d’un homme et d’une femme, vivants, en âge de procréer et dont l’infertilité est dûment constatée sur le plan pathologique. Même dans le cas où la médecine fait appel à un donneur de gamètes (ovule ou spermatozoïde), l’anonymat efface ce dernier au profit du père ou de la mère stérile qui doit passer aux yeux de la société pour le vrai géniteur, faisant croire à un « enfantement naturel ».
Cette imitation de la nature et du modèle familial traditionnel est devenue intolérable aux « progressistes » de tous poils. En s’obstinant à donner un père et une mère à un enfant, l’assistance médicale à la procréation reste selon eux prisonnière d’une idée du Bien finalisée par la nature. Il est temps d’élaborer un nouveau modèle de procréation qui s’affranchisse de toute référence biologique de la famille, clament-ils en chœur. Et pour cela, rien de tel que d’utiliser les progrès scientifiques de l’AMP qui ont multiplié à l’infini les possibilités d’engendrer.
« Le champ du désir »
Le candidat socialiste à la présidentielle souhaite ainsi reconnaître aux couples homosexuels le droit au mariage, à l’adoption et à l’assistance médicale à la procréation. L’idée générale est bien celle-ci : établir une rupture radicale entre l’ordre biologique ancien qui a servi de principe directeur à la rédaction des lois de bioéthique et un nouveau concept de parentalité où la volonté des adultes primerait pour « avoir des enfants ». La conséquence est que le nouveau « droit de fonder une famille », brandi par la gauche, qui n’est que l’autre nom d’un « droit à l’enfant », sera opposable à toute velléité réactionnaire de borner les possibilités techniques offertes par la médecine.
En s’occupant de l’ « infertilité sociale », une expression typique du jargon socialiste sur la question, l’assistance médicale à la procréation doit désormais prendre en charge le vaste champ du désir[4]. Le professeur François-Xavier Bellamy a dénoncé avec justesse le danger de ce choix de société pour la famille et ses principes structurants de parenté et filiation : « Jouer aux apprentis sorciers en prétendant réinventer les structures familiales pour les plier à l’arbitraire de nos désirs, n’est-ce pas abandonner tout principe de précaution ? Comme toujours, les plus fragiles seront les premiers touchés. Le plus fragile, c’est ici l’enfant, perdu dans une famille décomposée à force d’avoir été recomposée, détruite à force d’avoir été soumise à nos individualismes irresponsables. Tout ce que nous ferons contre la stabilité du modèle familial, nous le ferons contre l’épanouissement des enfants, pour notre propre malheur [5]».
Dans le projet bioéthique de la gauche, le don de sperme deviendra le support technique du projet parental des femmes homosexuelles. Le pendant théorique consisterait à autoriser aux hommes homosexuels l’accès au don d’ovules et aux mères porteuses. Comme s’il voulait donner des gages de modération, François Hollande dit ne pas souhaiter légaliser la gestation pour autrui (GPA). Jusqu’à quand ? On ne voit pas comment les sacro-saints principes d’égalité et de non-discrimination qu’il défend bec et ongles ne conduiront pas à terme à une autorisation de la GPA si l’on veut accorder les mêmes droits aux gays et aux lesbiennes.
Marchandisation des corps
Même si la GPA ne devait pas être autorisée dans l’immédiat, le candidat socialiste s’est imprudemment prononcé en faveur de la reconnaissance juridique des enfants nés de mères porteuses à l’étranger. Il s’agit encore une fois d’une proposition irresponsable et incohérente car cette mesure ne fera que démultiplier le tourisme procréatif des couples homos masculins (et hétérosexuels d’ailleurs) dont souffrent des pays vulnérables comme l’Inde ou l’Ukraine. Ironie de l’affaire, les forces de « progrès » qui se drapent depuis le début de la campagne dans un humanisme de façade, ne feront qu’amplifier la marchandisation des corps, alimenter les réseaux de traite des femmes qui sévissent dans ces pays et aboutiront finalement à une nouvelle forme asservissement où les pauvres louent leur ventre pour l’engendrement des enfants des riches.
Retrouvez tous les articles de bioéthique dans le dossier :
[1] Parti Socialiste, « Fonder le droit de la famille sur une éthique de la responsabilité », Groupe Nouvelles familles, décembre 2010.
[2] Gaëlle Dupont, « Bioéthique : la conception libérale de Hollande », Le Monde, 11 février 2012.
[3] Élise de la Rochebrochard (dir.), De la pilule au bébé-éprouvette, choix individuels ou stratégies médicales ?, Institut national d’études démographiques, Paris, 2008.
[4] Parti Socialiste, « Fonder le droit de la famille sur une éthique de la responsabilité », Groupe Nouvelles familles, décembre 2010.
[5] François-Xavier Bellamy, « La gauche ultralibérale », Valeurs actuelles, 8 mars 2012.
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