Ne revenons pas sur les détails du conflit en cours et remarquons seulement que la Russie fut quelque peu acculée à entrer en guerre.
1- Coup d’État par des intérêts américains
2- Non-reconnaissance du caractère russe de la Crimée et sanctions malgré un référendum dont le résultat est indiscutable et dans un contexte, au moins pour la France, de droit des peuples à disposer d’eux-mêmes
3- Non-respect des accords de Minsk depuis 7 ans au moins
4- Inaction des partenaires du format Normandie envers l’Ukraine (France et Allemagne)
5- Blocage et atermoiements dans le cadre du projet Nordstream 2
6- Incursions régulières dans l’espace aérien russe
7- « Invasion » de la mer Noire
8- Guerre spatiale en 2014 contre la Russie
9- Etc. Regardons aussi brièvement la Syrie, dont les troupes américaines occupent encore une partie, après une révolution de couleur ratée, illégalement. Rappelons la Libye et le Kosovo, sans oublier l’Afghanistan, l’Irak et d’autres interventions non justifiées (les fioles de Collin Powel), le financement des terroristes islamistes (Lafarge, mais pas seulement), amenant les Occidentaux, en avançant toujours davantage leurs pions, à encercler la Russie.
Dans le même temps, ce pays s’est reconstruit de son effondrement, a su utiliser les sanctions pour redévelopper une industrie et une agriculture, a même, un temps, songé à rejoindre l’OTAN, mais en a abandonné l’idée quand il s’est rendu compte qu’on ne lui réservait, comme aux non-Américains, qu’un strapontin. Finalement, il s’est trouvé un allié puissant en la Chine qui est pour lui une source de produits manufacturiers civils (informatique essentiellement) en échange d’énergie et de produits agricoles. Il a aussi établi avec lui une coopération militaire et spatiale.
Après ces prémices, commençons notre analyse. La Syrie a constitué la première anicroche sérieuse. Elle a probablement été un révélateur pour la Russie de la faiblesse occidentale malgré des budgets de défense américains colossaux. Il devenait donc réaliste de contrer l’avancée de l’OTAN et d’essayer de desserrer le « cordon sanitaire » globalement. L’Ukraine était une possibilité qui se concrétise et personne n’osera y intervenir.
Posons-nous brièvement la question du déclenchement si soudain de ce conflit. Au-delà d’une patience extraordinaire, il a dû y avoir un déclic. Comme personne n’aborde ce sujet, je ne vois qu’une raison plausible : lors des transferts d’armes récents de la part des pays occidentaux, il a dû y avoir des éléments jugés inacceptables dans un contexte « d’otanisation » de l’Ukraine. Il faut un certain délai entre leur réception et leur mise en œuvre, ce qui laissait donc très peu de temps à la négociation. Mais ni les Occidentaux ni les Russes ne le diront avant des décennies pour des motivations bien compréhensibles de secret défense.
D’un point de vue plus global, ce conflit ukrainien marque incontestablement un coup d’arrêt à l’expansion de l’OTAN dans le monde entier. Nous allons donc vivre, dans les années et décennies à venir, un reflux géographique de cette organisation. Tout d’abord, à l’inverse de cette entité et des ÉtatsUnis, la Russie apparaît comme un partenaire fiable auprès des gouvernements, y compris ceux mis en place (aussi dictateurs et corrompus qu’ailleurs) par nous-mêmes. L’alliance avec la Chine donne de la crédibilité à une chance de développement à des pays qui n’en ont eu quasiment aucune depuis les 80 dernières années de notre règne. On le voit au Mali ou en Centre Afrique qui sont les prémices d’une certaine généralisation.
L’abandon programmé du dollar, va permettre d’éviter toutes les sanctions scandaleuses issues de l’extraterritorialité du droit américain acceptée sans broncher par l’Europe qui est incapable de s’en émanciper ; ce que nous avons déploré lors de la crise iranienne. C’est donc la liberté qui sera retrouvée par un incontournable nombre d’acteurs. Le centre de gravité économique du monde étant désormais en Chine, cela pourrait se révéler suffisant pour définitivement détrôner le dollar qui ne serait plus la monnaie de référence et s’effondrerait en conséquence étant donné les fondamentaux financiers des USA.
En parallèle, la course à la puissance continue, notamment dans le domaine intellectuel. Là, quand les Chinois travaillent à élever leur niveau, que les Russes tentent de maintenir celui de l’URSS, l’Occident, la France en particulier, a privilégié les hommes d’affaires et le management sur les ouvriers, techniciens et ingénieurs, bref, sur les producteurs. Cela se paiera très cher. Le monde est physique avant d’être virtuel !
La Chine et la Russie ont donc une opportunité historique extraordinaire qui s’ouvre à elles. Si elles savent être des pôles de pouvoir modéré qui organisent un jeu de gagnant-gagnant avec les pays qui les rejoindront, si elles ne s’ingèrent pas dans leurs affaires intérieures en donneurs de leçons, si elles n’y orchestrent pas des révolutions de couleurs, si elles les considèrent non comme des marchepieds, mais de la même manière que de vrais partenaires, alors le glas de la société occidentale aura largement sonné. Ce monde qui assène des leçons à la terre entière, mais qui constitue une authentique dictature ainsi que nous avons pu nous en rendre compte lors de la crise du Covid, tant en Europe qu’en Amérique.
Nous entrons donc dans l’ère du reflux de notre civilisation, reflux dû à l’indigence intellectuelle de nos dites élites et qui ont pu accéder à la direction de l'État grâce à une lente, mais sûre dérive qui a conduit à l’affaiblissement de nos valeurs fondatrices. Quand on entend la caste au pouvoir se réclamer de tel ou tel « ancêtre », on ne peut qu’être affligé ! On nous a tous appris à ne pas mélanger les torchons et les serviettes.
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