Source [Boulevard Voltaire] Les défenseurs des concours passent souvent pour des ringards, des réactionnaires, voire des maniaques de la sélection. Inventés sous l’Ancien Régime (eh oui !), ils ne font pourtant qu’appliquer un principe d’équité et d’efficacité, que l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen a ainsi formulé : « Tous les citoyens étant égaux aux yeux de la loi sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents. » On apprend que, contrairement à ceux de Paris et de Bordeaux, sept IEP de province vont maintenir un concours d’entrée : un choix judicieux et démocratique.
La suppression du concours et son remplacement par l’examen du dossier scolaire et un entretien de motivation sont censés favoriser une plus grande diversité du recrutement. En fait, ces modalités élargissent les possibilités de discrimination positive, déjà pratiquée à Sciences Po Paris avec le dispositif des conventions éducation prioritaire. Sept IEP de province (Aix, Lille, Lyon, Rennes, Strasbourg, Saint-Germain-en-Laye, Toulouse) vont conserver un concours commun écrit à l’entrée de leurs écoles. Il s’agit de maintenir « exigence » et « équité » entre les candidats.
Le concours sera modifié, pour tenir compte des impératifs de Parcoursup, mais trois épreuves écrites subsisteront en histoire, questions contemporaines et langues vivantes. Des écrits nationaux, communs à tous, anonymes, qui permettent de donner « une deuxième chance » à chacun. Dans un concours, chaque candidat donne le meilleur de lui-même. Sa réussite est la démonstration de ses capacités à réfléchir et à organiser ses connaissances dans un temps limité.
Il est certain que le seul examen des dossiers ne permet pas une sélection équitable. Sans compter que les notations sont plus ou moins exigeantes. Le concours, avec des épreuves écrites, donne à tous les mêmes chances. Quand on corrige un écrit, on n’a aucune information sur l’origine sociale ou scolaire des candidats. C’est tout le contraire d’un oral, où les membres du jury cherchent à identifier leurs motivations et seront nécessairement influencés par ce qu’ils apprendront sur eux ou par les instructions qui leur seront données. L’appréciation d’un oral est beaucoup plus subjective que celle d’un écrit.
De quoi s’interroger sur le fameux « grand oral », qui doit couronner les épreuves du futur baccalauréat. Le rapport remis à Jean-Michel Blanquer, le 24 juin, par un « professeur d’art oratoire » à Sciences Po aris, s’intitule « »Faire du grand oral un levier d’égalité des chances », alors qu’il risque de produire tout le contraire. L’expérience prouve que, sauf exception, ce sont les élèves issus des classes favorisées qui sont le plus à l’aise à l’oral. Certes, l’école est censée favoriser son apprentissage, mais comment pourra-t-on le faire au lycée alors qu’aucun horaire n’y est dédié et qu’aucun exercice d’entraînement individualisé n’est prévu ?
Le concours a peut-être des défauts. Il reste cependant le moyen le plus objectif d’apprécier la valeur intellectuelle des candidats, d’autant que les copies sont souvent soumises à une double correction. Le concours est la meilleure façon d’abolir les privilèges. On peut en aménager les épreuves, mais le supprimer, c’est ouvrir la porte à des discriminations nouvelles, à un système de quotas, voire à la pire des injustices : le piston. C’est le contraire de la démocratie et de ce qu’on appelait l’idéal républicain.
La meilleure façon de démocratiser l’accès aux grandes écoles reste le concours, une lutte contre l’autocensure et un enseignement secondaire exigeant.
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