Des immeubles en ruine, des maisons dévastées à perte de vue, des impacts de balles et d’obus innombrables, tel est le spectacle désolant qui attend les visiteurs de villes comme Kusseir.
Étincelle d’espoir, de rares enfants jouent dans les rues, accompagnés de leur mère. Des militaires contrôlent les entrées de la ville, ou de ce qu’il en reste. Elle est un point stratégique du pays, à la fois proche de l’autoroute reliant le nord au sud, et de la frontière libanaise.
Un prêtre nous accueille dans une église presque reconstruite. Il est accompagné de ses trois enfants (les prêtres maronites peuvent se marier) et de quelques paroissiennes. Les sourires chaleureux nous montrent combien les français sont attendus dans ce pays. Nous avons la chance d’entendre le récit de leur incroyable martyr : fuite, hébergement d’urgence, attente infinie, retour chez soi, découverte des ruines, reconstruction. Seules 400 familles sont revenues, la ville comptait 60 000 habitants.
La délégation du diocèse de Fréjus-Toulon, qui compte en son sein Mgr Rey, plusieurs prêtres, journalistes, entrepreneurs et étudiants, a passé cinq jours en Syrie. Objectif : rencontrer leurs frères chrétiens, trouver des moyens de les aider, jumeler le diocèse d’Homs avec celui de Toulon, prendre conscience du drame qui se joue au Moyen-Orient.
Cinq jours marquants, ponctués de visites dans des villes en ruine, de témoignages bouleversants, de rencontres avec les réfugiés. Au pays de Saint-Paul et du Krak des Chevaliers, les chrétiens n’ont pas oublié leurs racines. Leur volonté de rester et de reconstruire est tenace, le travail a déjà commencé.
Les témoignages se suivent et se ressemblent : « aidez-nous à rester ici ! », « nous devons reconstruire notre pays, notre place est ici », « sans les chrétiens, la Syrie n’aura pas le même visage ». Il n’empêche que beaucoup de chrétiens sont partis, découragés, fatigués de la menace permanente que représentent les groupes islamistes intégristes (plus de 350 dans tout le pays).
Le discours sur leurs frères musulmans a de quoi surprendre : « Quoiqu’ils nous aient fait, ou pas fait, nous resterons toujours les mêmes, nous les aimerons et nous les accueillerons » assène le chef de l'Eglise orientale des grecs melkites, sa Béatitude Laham. Le Père Georges Haddad, de Yabroud, est plus dur : « Pour la Syrie […] je suis optimiste. Mais je suis pessimiste pour l’Europe, l’afflux des musulmans vers l’Europe va faire que l‘Europe deviendra musulmane dans très peu de temps ».
Le Père Toufic Eïd, curé de Maaloula, précise quant à lui que « même si ça nous coûte, on ne peut pas, en tant que chrétiens, refuser de vivre avec l’autre. Mais il ne faut pas vivre dans le compromis… ne pas accepter des choses que l’on estime inacceptable. Les conséquences ont été dramatiques, et [nous sommes] en train de l’apprendre en Europe. Le problème est avant tout démographique, comme en Syrie et au Liban ! ». C’est lorsqu’il nous récite le Notre Père en Araméen, langue du christ, que nous comprenons pourquoi ils restent : ils sont le berceau du christianisme.
Stanislas Billot de Lochner
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