Source [Boulevard Voltaire] : C'était à une époque où la politique étrangère de la France restait encore influencée par un surmoi gaullien qui faisait de la souveraineté un impératif catégorique non négociable.
En novembre 1991, à Rome ,se tenait un sommet de l’OTAN alors que l’URSS se disloquait sous les yeux incrédules des Occidentaux. La question qui se posait alors était celle de l’avenir d’une organisation de défense collective qui trouvait son origine et sa finalité dans la volonté de faire face à une menace soviétique qui disparaissait.
Le rideau de fer était tombé et la fin de la guerre froide semblait ouvrir soudainement la possibilité d’une refondation des relations Est-Ouest transformant l’Europe en un vaste espace de coopération et de sécurité de Lisbonne à Vladivostok.
Mikhaïl Gorbatchev avait proposé de bâtir une « maison commune » paneuropéenne et François Mitterrand, à sa suite, en décembre 1989, avait lancé l’idée d’une « confédération européenne ». Les Américains ne voulaient cependant pas d’une refondation de l’Europe sur des bases susceptibles de menacer leur leadership, voire de les exclure. Redonner un sens nouveau à l’OTAN et neutraliser le projet d’une défense européenne autonome constituaient donc pour eux des enjeux majeurs. Il fallait réformer les structures euro-atlantistes afin d’assurer leur pérennité.
Au sommet de Rome, un « nouveau concept stratégique » de l’OTAN avait alors été proposé qui ne reposerait plus sur une logique de confrontation mais sur une « conception élargie de la sécurité » incluant des risques liés à de « graves difficultés économiques, sociales et politiques » (concept stratégique de l'OTAN, 7 novembre 1991).
Roland Dumas, ministre des Affaires étrangères, présent à l’époque à Rome, avait rapporté dans un livre entretien paru en 2013 (Diplomatie sur le vif, Presses de Sciences Po), les craintes de François Mitterrand de voir les Américains transformer l’OTAN en une « Sainte-Alliance » qui, sur le modèle de celle qui s’était formée en 1815, se donnerait pour mission de régenter tous les problèmes de l’Europe et même au-delà.
George Bush avait en effet déclaré : « L’Alliance a été utile, il ne faut pas la détruire, il faut la consolider et je serai amené, dans l’avenir, à vous faire des propositions sur l’utilisation que l’on peut faire de l’OTAN dans tous les conflits du monde. » À quoi Mitterrand avait répondu : « Dans le fond, ce que vous proposez, c’est une résurrection de l’Alliance de Vienne, la Sainte-Alliance. Pas question que la France entre dans ce système. »
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