Christian Jacob a dévoilé cette semaine le nouvel organigramme des Républicains. La droite dispose-t-elle encore d'un "logiciel" économique cohérent ? Quelles idées économiques pourraient aider la droite à construire une alternative crédible et solide ?
Atlantico.fr : Christian Jacob a présenté son équipe pour la direction de LR. Une des questions principales qui se pose est celle de la ligne économique de cette équipe, qui reste pour le moins floue. La droite a-t-elle encore un "logiciel" économique cohérent ?
Mathieu Mucherie : Les idées ne sont pas les seules raisons de l'échec de la droite actuellement mais elles importent. De même, au sein de ces idées, il n'y a pas que les idées économiques mais elles importent aussi. Au niveau économique, l'impression que l'on a dans la droite classique, c'est que si elle revient au pouvoir, elle ne ferait pas grand-chose de différent de ce que faisaient les gouvernements précédents depuis deux ans. Elle abaisserait vaguement les charges sociales et compenserait cela par de la CSG ou la TVA. C'est la politique constante de tous les gouvernements depuis 1991.
On a également l'impression qu'on ne bousculerait pas la BCE et qu'il n'y aurait aucun "secouage de cocotier" de l'ordre existant. Il semble que rien ne changerait sur le plan fiscal, budgétaire ou monétaire. A la rigueur, la droite pratiquerait peut-être plus de sortie du capital d'entreprises semi-publiques, elle ferait certaines choses de manière légèrement différente. Ce qui est désespérant pour l'électeur de centre-droit ou de droite classique, c'est que finalement lorsqu'on voit les propos des uns et des autres, il n'y a pas de réelle différence et c'est quelque chose de très démobilisateur. Il n'y a pas de génération d'idées. Avec les têtes pensantes actuelles, que ce soit Pécresse, Larcher ou d'autres, il n'y a aucune différence avec ce qui est fait ces dernières années.
Évidemment, c'est une préoccupation pour qui s'intéresse majoritairement à l'économie et il ne semble pas que cela soit l'alpha et l'oméga de la politique française. Mais c'est important et ça n'est pas très engageant. Avec François Fillon, il y avait cette idée de secouer un peu plus le cocotier sur le côté fiscalo-budgétaire avec ce projet de suppression de 500 000 postes de fonctionnaires, idée considérée comme peu réaliste au vu des précédentes promesses semblables. Mais au moins il y a avait cette idée de bouger les choses.
La question se pose de ce qu'il faut faire. Faut-il revenir à des programmes assez radicaux comme Fillon, au risque de ne pas être crédible, ou faut-il se diriger vers l'équivalent d'une copie de Sciences-Po, à savoir ce que propose la République En Marche ? L'idée doit être de générer de nouvelles idées.
Sébastien Laye : Depuis longtemps - à l'exception de l'épisode Fillon qui a tenté un renouveau thatchérien, peu susceptible de prendre prise en France au delà des milieux économiques, mais allié à un conservatisme puissant et populaire- le logiciel économique de la droite est celui de la technocratie française énarchique: une vague acceptation de l'ordre des choses de la mondialisation et une pratique de la réforme par cliquets, progressive, qui explique notre retard sur les autres pays qui sont souvent passés par de véritable révolution économique. Cette pensée très timorée (qu'on a retrouvé dans le juppéisme) n'était pas très différente de la pensée économique de la seconde gauche, d'où la jonction opérée par Macron entre ces deux mondes: réformisme social libéral bon teint et progressisme libertaire. La Droite a depuis longtemps perdu les racines de sa pensée économique, qui puisaient aux trois droites (orléaniste, bonapartiste et conservatrice), au profit d'un consensus technocratique aligné sur les préconisations du FMI et de Bruxelles. L'esprit gaullien d'un Jacques Rueff a été jeté aux orties depuis deux décennies au moins. A ce sujet, l'alternance étant une donnée démocratique, la Droite est encore plus responsable que la Gauche de l'échec de notre pays, en refusant de s'assumer comme Droite au niveau de la pensée économique.
Pourquoi les personnalités droites sont-elles aujourd'hui, ou semblent-elle dépassées par les questions économiques ?
Sébastien Laye : Pour une raison ontologique et une raison politicienne. Ontologiquement, aucun des leaders actuels de la Droite ne vient du monde de l'entreprise ou de l'initiative privée. Regardez les candidats au poste de Président du Parti ou les putatifs présidentiables, ils ne brillent pas par un vrai parcours dans le monde du privé...D'un point de vue politique, d'aucuns ont considéré que les jeux étaient faits, que Macron allait réformer la France, que les résultats économiques et sociaux seraient au rendez vous, et que donc il fallait uniquement se positionner sur les questions régaliennes ou de société, voire dépasser Macron par sa gauche en économie. Or le miracle n'a pas eu lieu et ls Francais attendront en 2022 qu'on leur explique pourquoi la France n'a pas obtenu les résultats économiques escomptés, et quelles sont les solutions différentes de celles que préconisent Bruxelles et Macron. Il y a je crois, une grande paresse intellectuelle chez de nombreux leaders de la Droite qui est irrémédiable.
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