Source [Le Figaro] Les évêques américains devront trancher cette question à l’occasion, mi-juin, de leur assemblée générale. Le débat vire à la polémique alors que le Vatican est intervenu pour relativiser la portée de cette règle.
Les évêques américains devront trancher cette question à l’occasion, mi-juin, de leur assemblée générale. Une majorité d’entre eux y est hostile, au nom de la «cohérence eucharistique». Le débat vire à la polémique alors que le Vatican est intervenu pour relativiser la portée de cette règle.
La Pentecôte, fêtée ce dimanche dans toute l’Église catholique, commémore la «descente de l’Esprit saint» sur les disciples de Jésus-Christ. Ce qui marqua, d’après les Actes des Apôtres, le début de l’Église puisque, sans peur, ils se mirent à prêcher dans toutes les langues. Ils étaient également animés d’un pouvoir spécial de «discernement» sur les gens et les situations. Vingt siècles plus tard, l’Église catholique semble toujours avoir besoin de ce «discernement». Elle doit trancher dans une délicate affaire engageant le deuxième président catholique des États-Unis -après Kennedy -, Joe Biden, et une partie majoritaire des évêques de son pays à propos de l’avortement. Lors de leur assemblée générale du 16 au 18 juin, les 264 évêques doivent statuer sur une possible interdiction de communion eucharistique qui pourrait frapper… Joe Biden lui-même, catholique pratiquant! Lequel s’est toujours prononcé publiquement pour l’avortement, qu’il a promis de promouvoir, et d’en faciliter le remboursement.
L’argumentation repose sur «la cohérence eucharistique». L’Église dénonce une contradiction entre le fait de se dire catholique et celui de mettre en œuvre l’avortement. Pourquoi? Parce que la communion eucharistique où le fidèle reçoit le «corps du Christ» via l’hostie consacrée, «présence réelle du Christ», est considérée comme le signe intime de la «communion» spirituelle non seulement avec le Christ, mais avec la communauté catholique tout entière. D’où l’exigence de «cohérence» entre la vie du fidèle et sa foi. D’où la dénonciation d’incohérence pour qui travaillerait concrètement à l’avortement. Joe Biden s’est vu une fois refuser la communion pour cette raison. C’était en octobre 2018, par un simple curé de la paroisse Saint Anthony, dans le diocèse de Charleston en Caroline du Sud. Quand il représenta Obama pour l’élection de François, en 2013, il communia, mais pas des mains du pape élu. Cette fois il est président. L’affaire fait donc grand bruit.
Elle vient même de rebondir avec l’intervention directe du Vatican, le 7 mai dernier, qui a cherché à calmer l’ardeur des évêques voulant repousser Joe Biden de la communion eucharistique. Une lettre romaine a été adressée au président des évêques américains, Mgr José H. Gomez, archevêque de Los Angeles, dont Le Figaro a pu se procurer le texte intégral. Cette missive pèse lourd en vertu de son contenu inédit qui semble relativiser cette règle de «cohérence eucharistique». Par l’importance de son signataire aussi: le cardinal Luis F. Ladaria, jésuite, préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi. Au plus haut niveau de l’Église catholique, c’est lui qui est chargé de l’interprétation officielle de la doctrine ou de son adaptation. Cette lettre n’a pas été publiée officiellement. Référencée 3 277/70-82 755, elle est destinée à tous les évêques américains. Elle a même pris le pas sur la polémique du communiant Biden. Elle démontrerait, pour la première fois à ce niveau, que l’Église catholique, sans changer sa morale, modifie sa façon de l’appliquer. Elle passerait d’une morale dite «objective», où le bien et le mal sont clairement définis, à une morale de «situation», où le «discernement» des pasteurs doit juger au cas par cas.
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