[source: Boulevard Voltaire]
Il faut créditer le pape François d’une qualité : sa franchise bonhomme. Il a, pour qualifier la crise migratoire européenne, parlé d’« invasion arabe ». Et comme ce pape est une icône médiatique révérée par la gauche, cette expression n’a pas suscité le tollé qu’elle aurait déclenché si un homme de droite l’avait prononcée. Ou un autre responsable catholique que lui.
Il en a, d’ailleurs, atténué la charge explosive : « Combien d’invasions l’Europe a connues tout au long de son histoire ! Elle a toujours su […] aller de l’avant pour se trouver ensuite comme agrandie par l’échange entre les cultures. »
Et les interprètes autorisés du pape ont enfoncé le clou. Jean-Pierre Denis, directeur de La Vie: « Il nous a dit que si l’on regardait l’histoire de l’Europe, des vagues migratoires, il y en avait eu, et que non seulement l’Europe les a surmontées, mais qu’elles lui ont été bénéfiques. » Et le porte-parole du Vatican : « Le pape n’a pas parlé d’une invasion violente ou préoccupante. » En somme, une invasion « heureuse », pour parler comme M. Juppé.
Il est donc impératif, en tant que catholique, Français et Européen, de rappeler à nos chers « poissons roses » (les catholiques socialistes que recevait le pape) et au souverain pontife quelques vérités.
D’abord, les très nombreuses agressions commises par des migrants musulmans contre des chrétiens, depuis l’Afrique et le Moyen-Orient jusqu’à Cologne et ailleurs, ne permettent plus de nier le caractère violent de cette crise migratoire et de la culture musulmane qui a généré cette violence. Il faut le faire avec raison, à partir des textes d’intellectuels arabes courageux comme Boualem Sansal et Kamel Daoud et, aussi, à partir de la réflexion prophétique de Benoît XVI dans sa conférence de Ratisbonne. Vu l’éradication actuelle de toute présence chrétienne dans les pays musulmans, la rencontre entre les cultures chrétienne et musulmane appelle une réflexion exigeante, et pas seulement des bons sentiments.
Ensuite, il n’est pas vrai, historiquement, que l’Europe se soit toujours enrichie par les invasions qu’elle a subies. Souvent, elle a failli perdre son âme, en plus de millions de victimes : les totalitarismes nazi et communiste, par leur athéisme négateur des racines chrétiennes et leur volonté d’asservissement du continent, ont durement éprouvé l’Europe, et on comprend que les petits pays d’Europe centrale qui ont subi ce double joug soient les plus opposés à la vision irénique de ce pape qui, contrairement à Jean-Paul II et Benoît XVI, n’a pas eu à les connaître de près.
Enfin, si certaines invasions, après des affrontements, ont pu être positives, c’est que l’Europe avait réussi à christianiser les nouveaux arrivants : pensons au rôle déterminant de l’Église dans la christianisation des Francs et dans la transmission de la culture antique. Or, le pape aura bien du mal à actionner ce levier d’intégration, vu la déchristianisation avancée de l’Europe. Déchristianisation dont il semble découvrir l’ampleur, à tous les niveaux, car il regrettait « l’absence d’un de Gaulle ou d’un Adenauer ». Disons-lui que ce n’est pas au Parti socialiste qu’il trouvera un catholique français de cette trempe.
Je ne dirais pas, comme M. Juppé l’avait dit de Benoît XVI :« Décidément, il y a un problème avec ce pape. » Mais je lui conseillerais, avec humour et charité, d’enlever ses lunettes roses et de regarder la réalité telle qu’elle est.
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