[Source : Observatoire de la Christianophobie]
Grégor Puppinck, directeur de l’ECLJ (European Centre for Law and Justice, Centre européen pour le droit et la justice, Strasbourg), a diffusé hier un commentaire d’intérêt sur la décision du 9 novembre du Conseil d’État, relative à l’installation de crèches de Noël dans les bâtiments publics, et que j’avais annoncée ici. Voici ce commentaire.
Finalement, le Conseil d’État n’a pas imposé à la France une interprétation radicale de la laïcité, et confirme que les crèches peuvent être exposées dans les bâtiments publics pour Noël.
L’ECLJ salue cette décision qui adopte une interprétation inclusive et positive de la laïcité, respectueuse des traditions et du sentiment des Français.
L’ECLJ souligne que la décision du Conseil d’État s’inscrit parfaitement dans la continuité de celle adoptée par la Cour européenne des droits de l’homme dans la fameuse « affaire des crucifix » (affaire Lautsi c. Italie) qui fait référence en Europe à la question de la présence de symboles religieux dans l’espace public.
Dans cette affaire Lautsi, une vingtaine de pays européens s’était regroupés pour soutenir la légitimité de la présence de crucifix dans les salles de classe des écoles publiques italiennes. Renversant un premier jugement défavorable au crucifix, la Grande Chambre de la Cour européenne avait finalement admis que la présence de crucifix ne viole pas les droits de l’homme. Elle avait considéré en substance que dans les pays de tradition chrétienne, le christianisme possède une légitimité sociale spécifique qui le distingue des autres croyances philosophiques et religieuses et qui justifie que ses symboles puissent légitimement avoir une visibilité prépondérante dans la société. La Cour européenne avait aussi jugé que la présence du crucifix ne suffit pas, en soi, à violer le droit à la liberté de religion des personnes non chrétiennes.
Pour l’ECLJ, la distinction entre le religieux et le politique est un fondement de la « civilisation chrétienne » et européenne, elle est une heureuse exception dans l’histoire de l’humanité. Rejeter la « civilisation chrétienne » amènera inéluctablement à confondre le politique d’une part et le religieux ou l’idéologique qui tient lieu de religion d’autre part. Le laïcisme est une idéologie qui, en matière religieuse, se confond avec le politique et finalement réalise le mélange des genres qu’il dénonce.
Face à cela, la Cour européenne, dans l’arrêt Lautsi contre Italie a utilement souligné que le « laïcisme » est aussi un choix idéologique non neutre. Ainsi, il ne serait pas plus « neutre » d’interdire la crèche ou le crucifix que de les laisser, lorsque leur présence est enracinée dans la tradition du pays.
Enfin, il convient de souligner que la reconnaissance accordée par la société à une religion historique ou majoritaire n’implique pas nécessairement la négation de la liberté de religion des personnes étrangères à cette religion ; elle implique seulement d’accepter que la liberté de religion, comme toute autre liberté, s’exerce dans un contexte culturel donné.
Daniel Hamiche
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