Une rentrée difficile

Personne ne doute que la fin de l’année 2022 soit pleine de sombres menaces pour la France et l’Europe.

Sur le plan strictement économique, deux menaces immédiates  : le glissement vers une inflation de plus en plus forte , la pénurie d’énergie et , par là,  une hausse des prix , voire des goulots d’étranglement qui entraineront l’ensemble de l’économie .

Que va faire Macron ?

Il nous prépare au pire en annonçant, d’un air pénitentiel, la fin de l’abondance : « vous avez assez joui, maintenant vient le temps de se serrer la ceinture », semble-t-il dire,  alors que la crise économique qui frappe l’Europe occidentale  résulte  , non    d’obstacles techniques ou de  pénuries réelles mais de décisions prises dans la sphère occidentale et que  Macron a toutes soutenues : confinement au-delà du raisonnable, politique de décroissance préconisée à Davos sous le prétexte climatique,  sanctions contre la Russie à quoi on peut ajouter le maintien à tout prix  de l’euro. La raréfaction des carburants fossiles ne résulte d’aucune pénurie absolue mais de l’arrêt de la prospection depuis trois ans en raison des bas prix des hydrocarbures et des théories malthusiennes de Davos, facteurs que la spéculation n’a pas manqué d’exploiter.

Dès lors la sitation est claire : si Macron ne remet en question aucune de ces contraintes, toutes plus ou moins internationales mais appliquées avec la plus extrême rigueur en France, les choses ne pourront que s’aggraver sans qu’on sache jusqu’où.

Il n’est même pas sûr que dans ce cas les peuples réagiront : la baisse du pouvoir d’achat, assorti d’une propagande disant qu’elle est une inexorable fatalité, se traduit trop souvent par la résignation et l’abattement. Ce n’est pas ce qu’il faut souhaiter. Pour qu’il en aille autrement, il faut que nos contemporains comprennent que rien de cela n’était   fatal.

L’autre option est que France rompe avec les contraintes internationales, au moins une partie d’entre elles, qui empêchent tout retour à la normale.

Ces contraintes : on peut en compter d’abord trois principales :

-                Les contraintes de l’OTAN qui nous imposent de nous priver du gaz et du pétrole russes. Il faut, sinon lever toutes les sanctions, ce qui reviendrait à un virage géopolitique de première grandeur que personne n’est prêt à prendre dans l’immédiat, au moins les appliquer mollement ou pas du tout.   Déjà , dans l’Europe du Sud, on commence à contourner les sanctions en passant par des pays tiers.  L’Allemagne, loin de nous en vouloir, profiterait du retrait français pour se retirer elle aussi.  Tiraillée entre différentes forces politiques, elle n’a pas encore fait le choix : soit appliquer les sanctions relatives au gaz, lesquelles seraient la fin de la puissance économique allemande, soit ne pas les appliquer, ce qui lèverait une lourde hypothèque mais ne pourrait que provoquer une crise avec les Etats-Unis.  L’alliance franco-allemande serait dès lors plus nécessaire que jamais.

 

-                Les contraintes de l’Europe de Bruxelles. La plus difficile est l’organisation du marché européen de l’électricité : elle est un désastre.  EDF est le producteur d’ électricité, grâce à son parc nucléaire, le plus compétitif d’Europe. La règlementation européenne l’a obligée à se scinder en plusieurs entités, ce qui n’est pas le plus grave, mais aussi à vendre des quantités considérables à prix coûtant, donc sans bénéfice pour elle, à des entreprises purement spéculatives qui n’ont  nullement participé aux investissements colossaux qui se trouvent en amont,  et à appliquer une prix de l’électricité élevé impacté par les insuffisances de   nos partenaires. Autrement dit,  l’avance qu’a prise la France en faisaint l’effort que l’on sait en matière nucléaire   ne profitera pas au consommateur français : son bénéfice sera partagé avec nos partenaires européens. Il est clair que la France a intérêt, pour permettre à sa population de se chauffer cet hiver, à se retirer de ce marché européen de l’électricité, faussement libéral ,  organisé par Bruxelles, sous l’influence de Berlin, pour la priver de son avantage structurel. De même, il faut , quoi qu’en pensent les Allemands relancer Fessenheim.

 

Ces deux ruptures seraient déjà considérables. Il en est une troisième qui le serait encore davantage  : la rupture avec l’euro ou plutôt ( car sans la France, l’euro n’est rien) la rupture de l’euro.

Dans l’analphabétisme économique qui règne aujourd’hui, bien peu comprennent, spécialement en France  (en Grande-Bretagne, tout le monde l’a compris dès le début), combien la monnaie unique est destructrice pour l’économie française ; destructrice pour  l’industrie : les géants du CAC 40 préfèrent investir à l’étranger , les PME délocalisent ou ferment , spécialement en milieu rural ; destructrice pour l’agriculture dont  les coûts sont devenus supérieurs à ceux de l’Allemagne ; les éleveurs se suicident, les fermes disparaissent .  Exprimés en euros, les coûts des produits allemands, hollandais ou finlandais sont en moyenne plus bas  de 25 %. Il en résulte un déficit chronique de la balance des paiements française et une perte d’emploi corrélative, qui ne pourront pas durer éternellement.  Seul le démantèlement de l’euro et un nouveau franc – ou euro-France, dont la valeur serait moindre que celle de l’euro actuel permettrait de rétablir notre compétitivité et donc notre croissance.

Les sanctions, l’énergie, l’euro sont l’essentiel . Il aurait fallu parler aussi de l’obéissance aveugle au GIEC, relayé par Davos et Bruxelles qui prévoit, pour lutter contre un réchauffement climatique hypothétique, le démantèlement de l’essentiel de notre industrie automobile, en particulier l’arrêt des véhicules au gazole pour lesquels nous étions très compétitifs et qui contribuaient   à défendre le niveau de vie populaire. Rappelons-nous la relation entre la hausse du gazole et le mouvement des Gilets jaunes : il semble que les dirigeants français n’en aient rien appris.

Ne nous attardons pas sur l’obéissance aveugle à l’OMS en matière de santé qui n’est pas pour le moment à l’ordre du jour.

L’important est que sur ces sujets : sanctions, énergie , industrie, il n’y a aucune solution sérieuse pour la France que est de rompre avec la dépendance à l’OTAN,  à Bruxelles , à Francfort . La rupture n’a pas besoin d’être complète ni définitive : on peut parler de suspendre certains de nos engagements pour motif d ’urgence : « l’urgence couvre tout » dit-on. Il est possible de rester dans l’Alliance atlantique en en quittant le dispositif intégré comme l’avait fait le général de Gaulle. Il est possible de suspendre notre participation au marché européen de l’électricité tout en continuant certaines politiques communes.

Emmanuel Macron n’est capable, on le sait, d’aucune de ces ruptures.  Seuls les grands hommes savent rompre : le général de Gaulle avec l’Algérie , Mitterrand avec le tabou communiste, Chirac ( au moins sur l’affaire d’Irak ) avec l’ordre occidental . Lui n’en est pas capable.

Il ne faut pas non plus rêver de grand soir.

La France risque de continuer de s’enfoncer dans le marécage. Jusqu’à quand ?

 

Roland Hureaux