Source [Article de Josh Hammer, traduit de l’américain par Constance Prazel] L’équivalent de l’arrêt Roe v. Wade pour les questions de liberté religieuse est arrivé lundi. Et l’arrêt a été soutenu par le prétendu conservateur Neil Gorsuch, nommé en 2017 par l’équipe de Trump en remplacement du défunt Antonin Scalia.
Le juge en chef John Roberts lui a emboîté le pas, permettant d’obtenir une majorité de six juges, qui inclut les libéraux de la Haute Cour. La décision incarne l’incapacité du mouvement juridique conservateur à travailler efficacement pour les conservateurs.
A travers l’arrêt Bostock c.Clayton County, la majorité vient de nous informer que l'interprétation du titre VII de la loi de 1964 sur les droits civils, qui n'a fait l’objet d’aucune contestation entre sa promulgation et l'année 2017, était, en fait, erronée. L'interdiction prévue par la loi contre la discrimination en matière d'emploi fondée sur le sexe, nous a expliqué Gorsuch, s'étend en fait à «l'orientation sexuelle» et à «l'identité de genre».
Ce n'est pas du textualisme. C’est du libéralisme gravé dans le marbre. Et cela est totalement en contradiction avec le principe édicté de toute éternité par la Cour suprême selon lequel le Congrès, lors de la rédaction des lois, ne saurait accorder un sens caché au langage le plus simple : comme le juge Samuel Alito l'a clairement noté en exprimant son désaccord, «sexe», en 1964, signifiait le sexe biologique - homme et femme - non l'orientation et certainement pas l'identité de genre subjective.
Les résultats tangibles vont être terribles. Après l’arrêt Bostock, une école catholique pourra-t-elle refuser un emploi à un enseignant dont le mode de vie sexuel bafoue ouvertement des millénaires d'enseignement moral catholique ? Une école juive orthodoxe peut-elle refuser d'engager un enseignant qui s'identifie comme une femme, contrevenant à l'enseignement traditionnel enraciné dans la Genèse ?
Nancy Pelosi avait tenté de faire adopter une grande partie de ce programme par voie législative en 2019, avec la soi-disant loi sur l'égalité - et avait échoué. Il a suffi d’un juge républicain pour l'imposer à l'échelle nationale par voie judiciaire.
Si l'on met à part les clauses de conscience des employeurs religieux, la loi sur le travail, établie de longue date, est maintenant plongée dans le chaos. Le tribunal admet que des problèmes tels que les toilettes réservées à chaque sexe, les vestiaires ou encore les équipes sportives feront bientôt l’objet de litiges. Comme mon ancien patron, le juge James C. Ho du Cinquième Circuit, le notait dans un cas similaire survenu l'année dernière, les problèmes juridiques sous-jacents « affectent tous les Américains, qui utilisent les toilettes dans n'importe quel restaurant, achètent des vêtements dans n'importe quel grand magasin, ou font des exercices dans n'importe quelle salle de sport. »
La substitution de l'identité de genre subjective au sexe incarné menace particulièrement les femmes biologiques, dont le Congrès a expressément voulu protéger les droits par la loi de 1964. Tout l'édifice de la loi anti-discrimination américaine, après tout, repose sur le principe que les différences corporelles entre hommes et femmes - en compétition sportive, dans des espaces privés ou sensibles - signifient quelque chose. Cet édifice peut-il survivre si sa pierre angulaire est supprimée? Je ne vois pas comment.
L’arrêt Bostock n'est pas une plaisanterie, et il met à nu la faillite morale et intellectuelle du mouvement juridique conservateur.
Disons-le dans les termes les plus directs : le mouvement juridique conservateur et ses divers vaisseaux institutionnels, comme la Federalist Society, ont fait échouer le conservatisme. Il est tout simplement impossible d'éviter cette conclusion simple – surtout à partir du moment où le coup est porté par Neil Gorsuch, qui est soutenu par la Federalist Society.
Des générations d'étudiants en droit ont désormais appris que le seul moyen approprié d'interpréter le droit est de se focaliser sur le texte tout en évitant les questions morales épineuses soulevées par les affaires. Mais comme le montre l’arrêt Bostock, même un juriste «textualiste» conservateur peut triturer un texte suffisamment pour lui donner un nouveau sens qui n’était tout simplement pas là lorsque le Congrès a élaboré une loi comme la loi de 1964. Pendant ce temps, un textualiste plus authentique comme Alito peut arriver à la conclusion opposée.
Le résultat est que la gauche légale fait entendre de bruyants arguments sur la justice et sur le bien, par ses lumières, et triomphe, tandis que la droite légale marmonne sur le textualisme.
Il va falloir quelque chose de plus pour arrêter une révolution judiciaire progressiste qui bouleverse le droit naturel, contrecarre les préférences du peuple et usurpe davantage le droit que nous avons, Nous, le Peuple, de faire voter nos lois au Congrès par des élus.
Les aigles juridiques conservateurs n'ont pas réussi à le faire. Ce dont nous avons besoin, c'est d'un mouvement juridique conservateur plus puissant, tout aussi disposé que la gauche à présenter des arguments moraux devant les tribunaux, fondés sur les principes de justice, le droit naturel (les règles ancrées dans notre nature même d'êtres humains), le bien commun et les traditions religieuses et morales sous-jacentes à l'ordre constitutionnel anglo-américain.
Sinon, le mouvement juridique conservateur ne mérite rien d’autre que de périr.
Article de Josh Hammer, traduit de l’américain par Constance Prazel
Pour retrouver l'article original : https://nypost.com/2020/06/15/neil-gorsuch-slapped-conservatives-by-creating-new-gay-rights/
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