L’ouverture de la procréation médicalement assistée aux «couples de femmes ou aux femmes non mariées », projetée par le gouvernement, ne pose peut-être pas tant une question morale qu’intellectuelle : les sociétés occidentales elles ont-elles encore toute leur raison ?
Inutile de s’attarder sur les arguments les plus connus à l’encontre de cette pratique : à la différence du « mariage homosexuel » qui posait une question de principe mais ne lésait directement personne, la PMA sans père (qu’il serait plus juste d’appeler « insémination artificielle ») va porter un préjudice direct et grave aux enfants qui en seront issus et qui n’auront aucun père de référence identifié : ni vivant, ni mort, ni biologique, ni adoptif. Imaginons la situation de ces malheureux dans les cours de récréation dont on connait la férocité !
S’y ajoute la question du coût pour la collectivité de ce qui ne relève d’aucune nécessité biologique mais d’un caprice : rappelons que cette procédures adresse à des femmes saines, tout à fait capables d’avoir un enfant en faisant l’amour avec un homme, ne pâtissant donc d’aucune discrimination, mais qui, parce qu’elles refusent, pour des raisons qui leur sont propres, généralement idéologiques, ce moyen simple, vont se lancer dans des procédures coûteuses pour la collectivité : 4000 € par essai et il en faut généralement plusieurs dont il est prévu qu’ils seront couvert par la Sécurité sociale, voire la CMU. La grande majorité du corps médical est d’ailleurs hostile au projet.
On pourrait aussi évoquer le risque d’eugénisme si les candidats surdoués au « don » de sperme devaient se presser au portillon, ce qui est peu probable, et si la porte eugéniste n’avait pas été largement ouverte par l’avortement dit thérapeutique ou la PMA à l’usage de couples stériles.
Le principal risque pourrait cependant être la confusion des esprits. Moins que la satisfaction d’une demande, le projet a un but idéologique. L’idéologie est une crise du principe de réalité. Malgré l’évidence , l’idéologie du genre tient que hommes et femmes sont fongibles et interchangeables. Pour aller jusqu’au bout de ce raisonnement il faut que la femme puisse enfanter sans homme ( et l’homme sans femme). Ce que la nature interdit, la loi doit , malgré la nature, le permettre . Réduit au rôle de « donneur » anonyme, le père n’existe pas. Faute d’acte sexuel, c’est à un viol du réel qu’ il est procédé.
Si le déni du réel appartient à toute les idéologies, nous ne trouvons de précédent que dans la théorie de Lyssenko instaurée par Staline, laquelle, contre la biologie moderne, celle de Mendel et de Morgan, prétendait que les caractères héréditaires pouvaient être modifiés par la volonté. Des scientifiques sont morts au goulag pour avoir refusé ce déni de la science.
Par derrière la confusion de genres (si l’on peut dire), une autre confusion : entre différence et inégalité, deux notions tout à fait séparées mais que les idéologues confondent. En soi, les différences n’induisent aucune hiérarchie. Mais partant de cette erreur intellectuelle, on veut abolir les différences pour être sûr de réaliser l’égalité . Mao avait vêtu tous les Chinois d’un pyjama gris. Aujourd’hui les féministes les plus exaltées veulent , pour atteindre l’égalité, abolir toutes les différences entre hommes et femmes et , faute d’y arriver, les dénier.
Inutile de dire qu’ avec le projet de PMA sans père, le reste du monde ( tous les pays sauf l’Europe occidentale et environ la moitié de l’Amérique du Nord ) nous prend pour des cinglés. Il met ce genre de projet sur le compte de notre décadence et, faute de nous comprendre,hausse les épaules. Il sait cependant que, sur impulsion occidentale, des organisation internationales pourraient profiter de la faiblesse de certains pays pour leur imposer ce genre de bizarrerie , comme c’est déjà le cas avec le mariage homosexuel ou , dès que la GPA sera adoptée se servir de leurs femmes comme de nouvelles esclaves en charge de la gestation.
Il faut se demander si des gouvernements qui proposent des choses aussi folles dans l’ordre la vie privée, pourraient être au contraire pleinement rationnels sur d’autres sujets, de politique intérieure ou internationale. Il y a des chances que non. C’est un inquiétant dysfonctionnement de la rationalité politique qu’un tel projet met au jour .
Face à de tels enjeux, on ne peut que se réjouir que la camp des opposants comprenne aujourd’hui des gens de tous bords, comme par exemple Agnès Thill, Sylviane Agacinski ou José Bové.
L’homme a toujours été menacé de folie, au niveau individuel mais aussi collectif. Il lui faut s’accrocher ferme au réel -et donc refuser toute idéologie – pour ne pas y tomber. Le combat qui s’annonce contre le projet gouvernemental de PMA sans père, c’est en définitive un combat contre la déraison.
Roland HUREAUX