Source [Le Figaro] Un peu partout dans le monde, des présidents et gouvernements ont mis en place d’inquiétantes solutions pour minimiser, nier ou résoudre la crise sanitaire.
Sur la petite estrade drapée de blanc, jonchée d'un chapiteau aux couleurs vertes et rouges du drapeau malgache, le président Andry Rajoelina attaque son discours. Les journalistes sont venus en nombre assister à la présentation du Covid-Organics, supposé remède miracle contre le coronavirus. Les ambassadeurs de Chine et de Corée du Sud, pays largement touchés par la pandémie, sont également présents. Plusieurs bouteilles de la potion magique, ornée de son étiquette orange à l'allure de sirop pour la toux, ont été entreposées sur une étagère blanche, en différents formats. «Cette tisane donne des résultats en sept jours», se gausse le jeune chef d'État de 45 ans, ingurgitant une dose. «Je vais être le premier à boire ça aujourd'hui, devant vous, pour vous montrer que ce produit guéri et ne tue point», martèle-t-il.
La précieuse lotion, à base d'artemisia, une plante utilisée contre le paludisme, a été mise au point par les chercheurs de l'Institut malgache de recherche appliquée (IMRA). Pour l'heure, elle n'a fait l'objet d'aucune étude scientifique attestant de ses vertus. L'Organisation mondiale de la santé (OMS) a d'ailleurs émis des «réserves», «aucune plante médicinale» n'ayant fait preuve de son efficacité jusqu'ici. Pourtant, selon Andry Rajoelina, deux patients malades du Covid-19 ont été guéris grâce à ce douteux breuvage. Comme d'autres chefs d'État et gouvernements du monde entier, le président malgache semble avoir participé à ce que l'OMS qualifiait «d'infodémie massive». Ce phénomène, loin d'être nouveau, s'est «accru» avec la crise sanitaire, notamment au niveau étatique, observe auprès du Figaro Pauline Ades-Mevel, rédactrice en chef de l'ONG Reporters sans frontières (RSF).
Au Turkménistan, le terme coronavirus a été retiré des brochures médicales distribuées dans les écoles, les hôpitaux et sur les lieux de travail
Pour tenter combattre les «ténèbres» de la maladie, le premier ministre indien, Narendra Modi, s'en est remis au pouvoir des bougies, début avril. «Je veux neuf minutes de votre temps. Éteignez toutes les lumières à la maison. Tenez-vous au balcon ou sur le pas de votre porte avec une bougie, la lampe d'un téléphone portable, une torche ou une lampe à huile», a-t-il incité.
Direction le Burundi désormais. Le petit État d'Afrique de l'Est s'en tire pour l'instant très bien dans cette crise sanitaire, avec un seul décès. Et pour le gouvernement, une seule explication possible à cet heureux bilan : «la grâce divine». Pas question de laisser l'OMS s'immiscer dans les affaires intérieures : une équipe de l'agence a été récemment sommée de quitter le territoire. Au Turkménistan, pays classé juste devant la Corée du Nord en termes de liberté de la presse, le Covid-19 est même un sujet tabou. «Le terme coronavirus a été retiré des brochures médicales distribuées dans les écoles, les hôpitaux et sur les lieux de travail», indique RSF. Aucun cas n'a été déclaré dans ce pays frontalier de l'Iran, où plus de 5000 personnes sont décédées. Du côté du Tadjikistan, vaste État au cœur de l'Asie centrale, la situation est peu ou prou la même. Le ministre de la Santé s'est félicité de ne pas avoir un seul malade, accusant les journalistes de «semer la panique».
Au Brésil, le président Jair Bolsonaro relaie tout un tas de publications non vérifiées sur ses réseaux sociaux. Bon nombre d'entre elles sont même directement supprimées par Facebook et Twitter ou Instagram. Début avril, le truculent leader a partagé une vidéo évoquant une pénurie alimentaire sur un marché de gros, soi-disant causée par le confinement. Avant de s'excuser platement pour son erreur. «Il n'y a pas eu de vérification appropriée de l'événement. Apparemment, dans cet établissement il y avait des travaux de maintenance. Je veux m'excuser publiquement, la vidéo a été rapidement supprimée». À la fois libéral et conservateur, le chef d'État s'est longtemps monté très critique à l'égard des mesures de confinement, qualifiant le Covid-19 de «petite grippe».
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