Les 27 pays de l'Union européenne et 66 pays africains se sont réunis à Lisbonne la semaine dernière. Le précédent sommet Europe-Afrique remonte à l'an 2000 et depuis, la situation relative des deux continents s'est modifiée : les pays émergents, Chine, Inde, Brésil sont de plus en plus présents en Afrique dont ils lorgnent les richesses minières et énergétiques.

Les entreprises chinoises de bâtiment et de travaux publics raflent les marchés de construction, sans d'ailleurs offrir beaucoup d'emplois aux Africains car elles apportent une grande partie de la main-d'oeuvre. La concurrence politique avec l'Europe devient rude quand la Chine dispense les milliards de dollars sans compter et, surtout, sans exiger, en contrepartie, des efforts de bonne gouvernance. Ces apports financiers incontrôlés sont en passe d'annuler l'effort des Occidentaux pour réduire la dette africaine mais on n'a guère entendu les ONG spécialisées s'élever contre ce mouvement.

La présence de Robert Mugabe, président du Zimbabwe, et fossoyeur de son pays, passible de sanctions européennes, a suscité une intervention courageuse d'Angela Merkel : La situation au Zimbabwe nuit à l'image de la nouvelle Afrique , a dit la chancelière allemande. Mais son discours n'a pas entamé la solidarité proclamée des chefs d'États africains avec le vieux dictateur : ils se sentent visés peu ou prou par les reproches de népotisme, de corruption et de mal-gouvernance qui lui sont faits. Sa présence annoncée avait failli faire capoter la rencontre en raison de l'opposition de la Grande-Bretagne dont le Premier ministre, Gordon Brown, a d'ailleurs boycotté le sommet.

Un autre sujet de discorde est la conclusion de nouveaux accords commerciaux entre les pays européens et africains. Jusqu'à présent, les pays africains liés à l'Europe par les accords de Cotonou bénéficiaient de facilités importantes d'exportation de leurs produits vers l'Europe. Ces avantages sont remis en cause par l'Organisation mondiale du commerce (OMC) qui souhaite une libéralisation totale des échanges. Il est bien évident que dans l'état actuel de faiblesse des économies africaines l'ouverture totale des frontières est suicidaire : ni la production agricole, ni la production industrielle de ces pays ne sont capables de faire face aux exigences d'un marché mondial. Les pays africains ont raison de s'opposer à cette ouverture mais leurs dirigeants sont-ils prêts à mettre en place de véritables politiques de développement à l'abri de leurs frontières économiques ? Les flux d'immigrants clandestins sont le signe de ce que, jusqu'à présent, les pratiques ne sont pas à la hauteur des besoins.

Une fois de plus, il a fallu entendre des discours rejetant sur le passé colonial ou le pillage des ressources tous les maux dont souffre l'Afrique. Tant que les Africains ne se prendront pas en main, le développement ne se fera pas.

L'Église joue un rôle essentiel dans cette éducation des hommes à assumer leurs responsabilités vis-à-vis de leur destinée. Mais c'est un combat difficile. Au Zimbabwe, l'archevêque de Bulawayo, Mgr Pius Ncube, a dû démissionner en septembre dernier à la suite d'accusations d'adultère lancées contre lui par les medias du pouvoir et d'une action en justice. Les évêques catholiques du Zimbabwe et d'Afrique australe ont pris sa défense, affirmant que ces accusations étaient scandaleuses et qu'il s'agissait d'une attaque contre l'Église catholique. L'archevêque quant à lui a déclaré : Ces évènements récents m'ont rapproché de Dieu et m'ont donné un sens plus clair de la mission. Je n'ai pas été réduit au silence par les machinations grossières d'un régime pernicieux. Je me suis engagé à promouvoir les enseignements sociaux de l'Église et à travailler parmi les plus pauvres et les plus démunis au Zimbabwe... mon souhait est d'être un humble serviteur de chacun : comme il fut dit par Jésus, je suis venu non pour être servi mais pour servir.

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