Les populistes : des " demeurés de l'Histoire " ?

Source [Dominique LE FLOCH] Ne sommes-nous pas au bord d'une crise démocratique majeure ? Qui, au lieu d'étouffer les extrêmes, tend à les renforcer davantage à chaque scrutin .

Sur la question, Philippe SEGUIN s'est révélé prémonitoire en annonçant que le Front Républicain mettrait un jour le Front National à 40% 

Un parti, le R.N. et désormais " Reconquête " sont considérés par certains comme sans intérêt .Les attentes de quelques 13 millions d'électeurs, leur mal-être, risquent d'être privés de tout mode d'expression dans les Assemblées du fait que leur parti n'est intégré dans aucune coalition .Le scrutin proportionnel, pourtant promis, restant aux " abonnés absents " .Sans parler des 16 millions , 700.000 citoyens qui ont préféré ne pas jouer le jeu de la démocratie " à la française " .Comment a-t-on pu en arriver là ? A-t-il suffi que les électeurs en question soient traités de " populistes " ? La pire injure à la mode ( avec celle de complotiste ).

Pour certains, cracher sur la " lèpre populiste " est devenu un sport national ! Certes, le populisme est en lui-même une source d'inquiétude, du moins pour l'équilibre de nos démocraties. Mais le pire n'est-il pas devant nous, si rien n'est fait vis-à-vis d'une jeunesse largement touchée par ce phénomène ? Mais, ne doit-on pas aussi remarquer qu'islamisme et populisme se nourrissent l'un l'autre ?Mais, à cet égard , comment ne pas considérer cet état de fait  comme un échec des institutions républicaines ? En fait, il s'agit d'une sorte de " posture ", une mode qui ne date pas d'hier, loin s'en faut ! Un coup de rétroprojecteur peut nous en convaincre sans difficulté .                                                                                         

Pour bien comprendre ce phénomène , il n'est pas indifférent de remonter à la GRECE des IVème / XVème siècles .....avant Jésus-Christ .Le populiste du XXIème siècle est à rapprocher de l'" idiot " ( " idiotès " en grec ) au sens ancien du terme , à savoir un esprit imbu de sa particularité .Or , le bon citoyen se caractérise à l'époque par son universalité .ARISTOTE , lui , fait confiance au peuple tandis que PLATON est plus réservé sur ses vertus ....D'autant plus que le " tyran " grec entretient avec lui une complicité passionnée et vénéneuse ......Le " tyran " sort du peuple pour le protéger contre les notables . Par un bond de plusieurs siècles , on en vient à l'époque des " Lumières " .Ses partisans considèrent que leur pensée représente le Bien absolu et ne souffre pas débat : leurs contradicteurs ne pouvant être que des tarés ou des vicieux !Passons à l'époque du Général BOULANGER , sur la fin du XIXème siècle .Sur fond de guerre perdue , de chômage , de scandales politiques, le Général se fait élire dans plusieurs circonscriptions à la fois (tout à fait légalement ).

Mais l'histoire se terminera mal ....Le peuple ayant sans doute eu le sentiment que l'on se sert de lui .....pour mieux le trahir !Vient , toujours en cette fin du XIXème siècle , l'épisode russe des " Narodniki " de Pierre KROPOTKINE .Des " Narodniki " qui vont au peuple .....comme on s'attache à Dieu ! Leurs idées sont reprises , mais détournées , par le Bolchevisme .Enfin , le parti des " Grangers " ( des " petits fermiers " américains ) peut aussi constituer un bon exemple .Ils vont contraindre les 2 principaux partis à adopter une partie de leur programme .....tout en conservant le pouvoir pour eux-mêmes .Pour les Bolcheviques , le peuple peut se réduire aux idéologies qui le façonnent .Autrement dit , si une partie du peuple considère qu'une société ne peut assimiler une population étrangère au-delà d'un certain seuil ( que , dans sa sagesse , un certain François MITTERRAND avait fixé à 5% )( 1 ) c'est , forcément , que cette frange , souvent importante en volume , a été influencée par une idéologie raciste ! ! !

Et non pas en se référant à un bon sens formé tout au long d'une expérience séculaire .Ne se trouve-ton pas ainsi dans la configuration d'aujourd'hui ?Les courants populistes de notre époque défendent les valeurs communautaires de la famille , de l'entreprise , de la vie civique .Les populistes affichent souvent un combat moral , y compris et surtout dans le sens d'une moralisation de la vie politique et des moeurs .Pourquoi donc notre époque , volontiers si moralisatrice , récuse cette moralisation du populisme ?Les mêmes sont sensibles à l'idée de nation ou des groupes d'appartenance , se méfiant de l'intégration du pays dans un ensemble plus vaste .Avec aussi la porosité des frontières qu'elle induit ....Le populiste serait volontiers assimilé à quelqu'un qui a peur de tout , bref un " idiot " au sens grec du terme ( cft. supra )Tels les nazis qui craignaient pour la survie de leur culture ?Ces courants estiment parfois qu'ils osent dire tout haut ce que beaucoup pensent tout bas ....A force de ne plus pouvoir dire , ne s'interdit-on pas , à long terme , de penser ? 

Bien entendu , ils critiquent la " nov-langue " utilisée par l'ensemble de l'élite . Incapables soi-disant de conceptualiser , les populistes se contenteraient-ils de clamer de simples choses de bon sens ?En fait , pour ces derniers , la démocratie est " truquée " .Ce , dans la mesure où sa pratique actuelle limite le pluralisme à une palette d'opinions trop étroite Mais , quoiqu'en disent leurs adversaires , il ne s'agit nullement pour eux de renverser la République .Même pas d'entraîner un nouvel holocauste qui frapperait les immigrés !Assurément , les revendications des identitaires , des " popus " , n'ont pas bonne presse .Car , dans notre Occident contemporain , on espère lisser les caractéristiques particulières pour faire émerger une culture universelle .La construction européenne ne peut être contestée que par des " attardés " animés d'un nationalisme forcément ...rance .Tout juste bons à être de fervents " affidés " du PUY-du-FOU ....!                                                                                       

De fait , la complexité des questions politiques à l'âge moderne nuit au réel débat démocratique engageant les milieux populaires jugés incompétents . ( cft. la thèse de Walter LIPPMANN )PLATON substitué à ARISTOTE , faisant place à une forme de despotisme éclairé .L'enracinement ne serait-il plus désormais que pour les " ploucs " ?Alors que les milieux populaires vivant sous l'emprise de la réalité et de l'expérience réclament de revenir au réel .Et dénoncent une sorte de monopole idéologique qui tend à s'établir au détriment de tout débat démocratique .On peut le remarquer : dans les lieux privilégiés où la défense de l'enracinement a été reconnue et intégrée aux débats , le populisme est quasi absent .Ainsi en est-il au ROYAUME-UNI et en ESPAGNE notamment . ( bien que , dans ce dernier pays , la droite " extrême " ne cesse de monter avec " Vox " )

Conclure ? Il ne faudrait pas que le populisme devienne  le sobriquet sous lequel les démocraties dissimuleraient vertueusement leur mépris pour le pluralisme ! ( un comble ! )