Paris, le mercredi 19 avril 2006

Monsieur le cardinal,

Je présenterai à l'Assemblée nationale, mardi 2 mai, un projet de loi relatif à l'immigration et à l'intégration.

Ce texte est le produit de plusieurs mois de réflexion.

Au terme d'un travail interministériel approfondi, il a été approuvé par l'assemblée générale du Conseil d'État et adopté par le Conseil des ministres.

Je sais l'attention que l'Église de France porte à la question des migrations. Je connais son attachement à l'accueil de l'étranger et au respect des personnes. Je suis sensible à son expression.

C'est pourquoi j'ai eu plaisir à recevoir, lundi dernier, trois représentants éminents de la Conférence des évêques, Mgr Olivier de Berranger, Mgr Claude Schockert et Mgr Stanislas Lalanne. Et je me réjouis que mes collaborateurs aient été, hier, comme je m'y étais engagé, auditionnés par un groupe de travail présidé par Mgr de Berranger afin de commenter la lecture du projet de loi.

Nous nous sommes, je crois, mutuellement écoutés.

J'espère avoir convaincu de ce qui me paraît essentiel : l'impérieuse nécessité d'une transformation de notre politique d'immigration – dans le respect, naturellement, des principes fondamentaux de notre République.

Nécessaire, la transformation de notre politique d'immigration l'est pour une raison très simple ; les flux migratoires sont, aujourd'hui, sans rapport avec les capacités d'accueil de notre pays. La France n'a pas vocation à être repliée sur elle-même : je rejette la thèse absurde de " l'immigration zéro ". Mais, dans le même temps, j'affirme que la France n'a pas non plus les moyens d'accueillir tous ceux qui voient en elle un eldorado. Le drame de l'immigration, telle qu'elle s'est déroulée à la fin des années 1990 et au début des années 2000, c'est que beaucoup de nouveaux arrivants se trouvent sans logement décent et sans emploi : le taux de chômage des personnes originaires de certaines nationalités atteint 30 à 40 % ! Les conséquences de cet état de fait peuvent conduire à de véritables tragédies. Je pense bien sûr aux incendies des 25 et 29 août 2005, à Paris, qui ont entraîné la mort de 24 personnes originaires d'Afrique, dont de nombreux enfants, logés dans des squats et des taudis insalubres.

L'ambition du gouvernement consiste à redonner une cohérence à la politique d'immigration. Il s'agit de réguler les flux migratoires, de les choisir et d'assumer ces choix en offrant aux migrants des conditions leur permettant de mettre en œuvre, concrètement, leur volonté d'intégration.

Cette ambition se décline en quelque 84 articles.

Vous pourrez trouver, ci-joint, une courte note de synthèse présentant, d'abord, les cinq objectifs du projet de loi et répondant, ensuite, à cinq interrogations qui me sont souvent adressées.

J'ajoute que, au cours du débat parlementaire, je serai attentif à ce que le texte soit utilement amendé.

J'ai d'ores et déjà retenu, de nos échanges, l'intérêt tout particulier que vous accordez à trois questions : la stabilité de la situation des travailleurs étrangers (dont la carte de séjour ne sera pas retirée en cas de rupture du contrat de travail), les délais de recours juridictionnels, ainsi que la protection des femmes victimes de violences conjugales.

Je vous prie de bien vouloir recevoir, Monsieur le cardinal, l'expression de ma respectueuse considération.

Pour en savoir plus :

■ La lettre du Conseil des Eglises chrétiennes au Premier ministre à propos du projet de loi Sarkozy

■ L'appel des associations chrétiennes Ne transigeons pas avec le droit de l'étranger

■ Notre dossier Immigration, ce que dit l'Eglise et le projet de loi Sarkozy

■ L'Instruction Erga migrantes caritas Christi

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