La besogneuse conférence de presse présidentielle du 18 septembre a consacré l’enfermement de François Hollande dans une politique idéologique de gauche anti-populaire. Rarement un gouvernement n’aura tant illustré le mélange ambigu de l’étiquette socialiste et du monde de l’argent.
LE NOUVEAU GOUVERNEMENT Valls est loin de n'être qu'un replâtrage destiné à se débarrasser de quelques forts-en-gueule. Malgré le maintien d'un certain nombre de poids lourds (Fabius, Sapin, Le Drian, Cazeneuve, Ségolène Royal), à des ministères clef, l'annonce du nouveau gouvernement n'est pas neutre : elle représente une triple provocation.
Vis-à-vis de la gauche historique d'abord, par la nomination d'un jeune banquier réputé ultralibéral à l'économie. Hollande ne prend pas un double de Montebourg en plus calme, mais son antithèse.
L'aile gauche du PS et, par-delà, ses anciens alliés d'extrême-gauche, ne sont pas seulement sanctionnés par le départ de quelqu'un qui pouvait passer pour leur porte-parole mais, comme pour bien enfoncer le clou, on le remplace par ce qu'ils détestent le plus : le mélange ambigu, déjà illustré par Strauss-Kahn et Cahuzac, de l'étiquette socialiste et du monde de l'argent. Un mélange qui, certes, n'est pas neuf, qui est même l'essence du pouvoir socialiste actuel mais qui ne s'était jamais affiché aussi ouvertement.
En même temps, cette nomination se veut un signal fort adressé aux marchés financiers et aux instances de Bruxelles. Mais on peut douter qu'il suffise à rétablir la crédibilité du gouvernement Hollande.
La rééducation des enfants
La deuxième provocation est cette fois, vis-à-vis de la droite, en tous les cas du peuple de droite — sans exclure certains éléments venus de la gauche, qui était massivement descendue dans la rue en 2013 pour s'opposer au mariage dit "pour tous".
Le combat s'est poursuivi sur la question de la fallacieuse théorie du genre à l'école. Mise en veilleuse par Benoît Hamon, l'affaire ne pourra qu'être relancée par Najat Valaud-Belkacem qui s'est avérée dans les précédents gouvernements comme une des plus ardentes propagandistes de la subversion des valeurs du mariage et de la famille, au point que non seulement Hervé Mariton a pu la qualifier de "Vietminh souriante", mais que même un Julien Dray la situe "sur la ligne des féministes ultras américaines, qui sont en train d'émasculer les sexes".
Sa nomination porte un message clair : l'Éducation nationale, ce n'est plus l'instruction publique, pourtant si nécessaire, ce sera la rééducation des enfants à toutes les lubies de la gauche libertaire. Que le nouveau ministre soit une féministe sincère ou un agent infiltré de l'islamisme cherchant à subvertir l'héritage chrétien (on a pu noter que quand elle visite son pays d'origine, le Maroc, cette femme prétendue libérée respecte scrupuleusement les prescriptions de la charia !) n'y changera rien : à un moment qui devrait être celui de l'apaisement, sa nomination est ressentie comme une provocation à l'égard de La Manif pour tous et de ses héritiers.
On retrouve là la marque du vrai Valls, non point le prétendu social-démocrate modéré, mais le policier sectaire qui ordonna les poursuites les plus disproportionnées contre les manifestants pacifiques hostiles à la loi Taubira.
On sait à quel point la frange musulmane de la population acquise à la gauche à 90 % en 2012, s'en est détachée au point de s'abstenir massivement aux municipales, entre autres à cause de la théorie du genre, aucun parent musulman ne souhaitant que l'école publique porte atteinte à la virilité de son garçon (comme à la féminité de sa fille !).
Il n'est pas sûr que ses origines sauvent à cet égard Najat Vallaud-Belkacem d'une confrontation, au contraire. Farida Belghoul contre Najat Vallaud-Belkacem, l'empoignade à la sortie des écoles promet d'être rude !
Une justice ultra-permissive
La troisième provocation est le maintien de Christiane Taubira à la justice alors même que l'intéressée, qui concocte toujours sa réforme ultra-permissive de la procédure pénale, n'a guère caché son accord avec les thèses économiques de Montebourg, Hamon et Filipetti.
Il serait trop facile de dire, par souci de symétrie, que cette provocation vise, elle, l'extrême droite sécuritaire, laquelle s'est massivement exprimée aux élections européennes. Mais l'aspiration à une saine justice, qui fasse clairement la distinction du bien et du mal, et à la sécurité est partagée par tous les Français, spécialement les plus modestes, elle n'est l'apanage d'aucun parti politique. Elle est aussi une des missions séculaires de tout pouvoir régalien quel qu'il soit.
Il est ainsi clair que ce remaniement garde du précédent gouvernement ce qu'il avait de plus destructeur.
Contre le peuple
Premier message donc : la gauche restera de gauche, avec tout ce que cela a de plus provocant, dès lors qu'il ne s'agira pas de toucher aux grands intérêts.
Deuxième message : c'est sur le plan sociétal que la nouvelle gauche libérale libertaire trouvera sa légitimité. C'était déjà la ligne de François Hollande, inspirée par la Fondation Terra Nova, mais désormais cette ligne se durcit. Le maintien de Taubira, la promotion de Belkacem sont destinés à équilibrer la droitisation économique et sociale. Des contestataires de gauche, c'est en définitive, la plus nocive que l'on garde.
Mais ces trois provocations, bien dans le style pète-sec de Valls, c'est précisément là ce qui fragilise le nouveau gouvernement. Elles ont en effet en commun de viser le peuple : peuple de droite, peuple de gauche, qu'importe ?
C'est le peuple dans son ensemble qui ne veut pas que la France soit livrée pieds et poings liés aux seules logiques financières.
C'est le peuple dans son ensemble (pas seulement celui des sorties de messe, mais aussi celui des banlieues) qui refuse la théorie du genre.
C'est le peuple dans son ensemble qui veut la justice et la sécurité : ne font même pas exception les jeunes délinquants que Taubira prétend choyer, moins demandeurs en fait de circonstances atténuants que de repères clairs.
Relance de l'action gouvernementale ? Peut-être, mais sur la même ligne durcie : libérale sur le plan économique, libertaire sur le plan des mœurs. Mais aucun gouvernement ne saurait agir efficacement en prenant ouvertement de front, comme le font Hollande et Valls, les aspirations le plus légitimes des Français. Gageons dès lors que ses jours sont comptés.
R. H.
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