Source [Le Figaro]: Dans la compétition qui se joue à droite, c’est un duel télévisé qui pourrait faire date et se révéler décisif.
À un mois jour pour jour du premier tour de l’élection présidentielle, Valérie Pécresse et Éric Zemmour doivent s’affronter en deux temps, ce jeudi soir, plus d’une heure durant. Une première partie, prévue sur TF1 entre 20 h 15 et 20 h 45, sera consacrée à l’Ukraine, puis suivie d’un deuxième volet sur LCI jusqu’à 21 h 30, où seront notamment abordés les sujets régaliens et la question du pouvoir d’achat.
À la peine dans les sondages, l’un et l’autre espèrent renouer avec une dynamique grâce à leur confrontation, alors que la plupart des enquêtes d’opinion les donnent au coude à coude. Selon le dernier «rolling» de l’Ifop en date du 9 mars, Éric Zemmour et Valérie Pécresse sont tout deux donnés à 12 % des intentions de vote, distancés largement par Marine Le Pen (18,5 %) et Emmanuel Macron (31,5 %). La candidate Les Républicains, réticente jusque-là aux débats, a décidé de jouer le tout pour le tout dans l’espoir de faire revenir à elle une part de l’électorat de droite traditionnelle. Elle mise, pour ce faire, sur son bilan de présidente de région. «Beaucoup s’attendent à ce que Zemmour la croque mais s’il ne la croque pas, une autre page s’ouvre», parie le député LR du Vaucluse, Julien Aubert.
Après un important décrochage dans les enquêtes d’opinion depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine, le candidat Reconquête! Espère lui aussi ouvrir une nouvelle séquence. Et parachever son travail de séduction d’une partie des électeurs de François Fillon de 2017. Selon un sondage Ifop, 49 % d’entre eux se reporteraient au premier tour sur un vote pour Valérie Pécresse, 27 % en faveur d’Emmanuel Macron contre 18 % pour l’essayiste. «Éric veut une victoire par KO. Il veut la terminer et la faire descendre à 8 %. Il n’y aura pas de cinéma», témoigne un proche d’Éric Zemmour.
Séances de simulation pour Pécresse
Valérie Pécresse aborde ce match dans un contexte compliqué, qu’elle ne nie pas. La tendance baissière des sondages nourrit des doutes croissants dans son camp mais cette situation ne l’a pas empêchée de préparer ce premier débat majeur avec soin. «Valérie Pécresse débat et ne se dérobe pas, alors qu’Emmanuel Macron refuse», soutient l’un de ses conseillers. La candidate s’est dégagée du temps. Elle a travaillé ses sujets et s’est livrée à plusieurs séances de simulation, comme dimanche dernier quand son directeur de campagne Patrick Stefanini était chez elle à Versailles.
Durant ces exercices de training, elle travaille avec des membres de son équipe rapprochée et se retrouve face à plusieurs collaborateurs (de deux à six), tous chargés de lui lancer des questions en jouant le rôle d’Éric Zemmour. Armée de fiches sur les angles d’attaque de son concurrent, par exemple contre elle ou Nicolas Sarkozy, la candidate a également visionné des émissions où des personnalités ont eu l’occasion de ferrailler contre le polémiste, comme ce fut le cas pour Jean-François Copé.
Comme à la veille de chaque grande émission, Éric Zemmour s’est quant à lui enfermé dans ses bureaux à son quartier général de campagne, dans le 8e arrondissement de Paris. Entouré de ses trois plus proches conseillers. Sarah Knafo, bien sûr, mais aussi Julien Madar et Jonathan Nadler, «Dupont et Dupond», comme il les surnomme. Un temps certain a été consacré à confronter les discours actuels de campagne de Valérie Pécresse à ce qu’elle a pu faire ou dire en tant que présidente de la région Île-de-France. «Il faut souligner leur différence de projet mais aussi d’altitude, défend un soutien d’Éric Zemmour. Lui a une vision haute et elle de gestionnaire.»
Franck Louvrier croit pour sa part que Valérie Pécresse va s’emparer de cette occasion pour aller au fond des sujets. «Elle est bien préparée, concentrée, et elle a un bilan à faire valoir», estime l’ex-conseiller en communication de Nicolas Sarkozy, qui n’exclut pas que la confrontation avec une femme puisse être un problème pour Éric Zemmour. Au sein des équipes de l’essayiste, le sujet est, en effet, loin d’être anodin: «Le principal écueil dans lequel il ne faut absolument pas qu’il tombe c’est de paraître trop brutal ou d’écraser totalement l’adversaire, témoigne un conseiller du candidat. Il ne faut pas nourrir le procès en misogynie ni paraître trop méprisant. Il doit la vaincre, mais proprement. Pas la déchiqueter.» Une retenue dont ne s’est jamais paré l’essayiste lors de ses nombreux débats sur les plateaux de CNews. Son premier cercle prend comme modèle le débat d’entre-deux tours de 2007 entre Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal.
"Chez Zemmour, on prévoit de l’écrabouiller, mais si elle fait jeu égal ce sera une victoire, et si elle prend le dessus cela peut lui donner une occasion de rebondir" [prévoit] Patrick Stefanini
Chez Pécresse, on veut croire que la position de Zemmour sera de plus en plus fragile face à l’Ukraine, quand les images de guerre et de réfugiés se multiplieront sur les écrans au fil du conflit. On se rassure aussi en estimant que les candidatures d’Éric Zemmour comme de Marine Le Pen n’auraient «aucune chance» de décrocher une victoire au second tour. Quand bien même la présidente de région est donnée, elle aussi, largement battue dans l’hypothèse d’un duel avec le chef de l’État au second tour. «Valérie Pécresse, c’est le projet de Macron déguisé maladroitement avec un discours de droite qui sonne terriblement faux», réplique l’eurodéputé Nicolas Bay.
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