Résumé : Pour réformer la liberté de l'école en France, on ne pourra pas faire l'économie d'une réflexion de fond sur le rapport de l'éducation à la société et à l'État.

Choix de l'école, dignité des maîtres, diversification de l'offre scolaire, le point sur les orientations du nouveau gouvernement.

 

 

 

COMMENT L'EDUCATION d'un peuple peut-elle se concevoir sans liberté ? Dans une société où l'État est devenu lui-même le garant de la liberté, la question de l'école est foncièrement politique. Elle renvoie à une conception de l'homme et à la confiance que l'on fait ou non à son intelligence pour assurer l'avenir de la nation. Quand l'intelligence est sous contrôle de l'État, que l'État est l'expression d'une volonté collective culturellement affranchie d'une référence objective à un système de valeurs universelles — par conséquent métapolitique — la transmission du savoir ne respire plus qu'au rythme de l'arbitraire administratif.

 

C'est l'honneur des civilisations que d'avoir su élaborer avec la sagesse de l'expérience les conditions d'une éducation la plus respectueuse de l'intelligence humaine, où celle-ci, de l'enfance à l'université, peut se déployer sans contraintes. Et c'est l'honneur de l'Église, aujourd'hui, de défendre le droit inaliénable des parents de choisir librement l'école de leurs enfants.

 

Les élections françaises du printemps 2007 ont montré combien l'enjeu éducatif était central, mais était-ce pour les bonnes raisons ? Le poids considérable de l'Éducation nationale, l'étendue de l'échec scolaire, justifient à eux seuls les plus légitimes préoccupations. Les lacunes de la recherche scientifique française, et ses retards, nécessitent les plus rapides décisions. Mais suffira-t-il de voter d'habiles mesures d'ajustement réglementaires du fonctionnement de l'école et de l'université pour redonner toute sa fécondité à l'intelligence dans notre pays, tant qu'on ne repense pas son rapport à la société et à l'État ?

 

L'avenir de l'éducation en France est une véritable priorité politique, et nous, chrétiens, devons nous atteler à la tâche avec la même vigueur que pour la défense de la vie humaine ou de la famille.

 

C'est dans cette perspective que nous ouvrons ce dossier de Liberté politique, avec l'ambition de mobiliser toute notre vigilance et notre créativité au service de la liberté de l'éducation, selon les priorités arrêtées dans le Guide de l'électeur chrétien 2007 (Liberté politique n° 36) : choix de l'école, dignité des maîtres et diversification de l'offre scolaire.

 

La page des élections tournée, on attend donc les réformes du nouveau gouvernement. Des marges de manœuvre se dessinent, qu'il faut saluer, à défaut, peut-être, d'une réflexion de fond à laquelle il faudra apporter sa pierre. La lettre de mission au nouveau ministre de l'Éducation nationale, Xavier Darcos, signée par le Président Nicolas Sarkozy et le Premier ministre François Fillon, donne des indications sur la portée de la rupture annoncée.

 

I- LA MISSION DU MINISTRE DE L'ÉDUCATION NATIONALE

 

La lettre de mission au ministre commence par un constat, plutôt sombre. L'école en France assure difficilement son rôle : 20% des élèves sortent du système scolaire sans qualification : chaque année, des dizaines de milliers de jeunes affrontent le marché du travail avec un lourd handicap. Les comparaisons internationales en terme de niveau de formation des élèves sont très défavorables à la France. Les qualités intellectuelles requises pour faire face à la bataille mondiale de l'intelligence sont jugées insuffisantes par le monde professionnel. Au-delà, le Président se plaint de différences de niveau entre les établissements [devenues] trop importantes pour garantir à tous les enfants une égalité réelle des chances devant l'enseignement supérieur, l'insertion professionnelle et même tout simplement la réussite de leur vie adulte . Corrélativement, la carte scolaire ne s'impose trop souvent qu'aux familles qui n'ont pas les moyens ou les relations pour la contourner .

Nicolas Sarkozy n'en dit pas plus. Il pourrait ajouter avec Claude Allègre que la France est championne du monde des dépenses pour l'enseignement secondaire. Une situation qui n'empêche pas les syndicats d'en demander "toujours plus". La croissance continue du budget de l'Éducation nationale depuis vingt-cinq ans, qui pèse maintenant 28 % du budget de l'État (le double de celui de la Défense), malgré les contraintes qui pèsent sur les finances publiques et la stagnation, voire la baisse, du nombre d'élèves, s'explique par les horaires exigés des enseignants, globalement faibles et d'autant plus faibles que l'on monte en niveau, et par les multiples décharges qui leur sont accordées pour toutes sortes de bonnes et mauvaises raisons, et pas seulement pour des activités syndicales... Elle s'explique aussi par la lourdeur extrême qu'induit la gestion nationale d'un organisme à la taille démesurée, dont les complexités sont aggravées par les multiples statuts et par le désordre que la décentralisation a introduite, décentralisation des bâtiments et des personnels de service, les fameux ATOSS , mais non des enseignants, effectuée à différents niveaux sans que la cohérence d'ensemble soit assurée, et sans que le ministère n'allège ses propres structures.

 

Sortir de la paralysie

[Fin de l'extrait] ...

 

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