La Palestine et le Liban font l’objet de bombardements depuis, respectivement, un peu plus d’un an et un mois. Des dizaines de milliers de civils, dont des femmes et des enfants, ont trouvé la mort dans les offensives israéliennes, mais le monde arabe se terre dans le silence ; la fameuse « Oumma », censée prévaloir dans le monde musulman, semble reléguée au second plan, très loin derrière les intérêts géopolitiques des États.
À mesure que le bilan s’alourdit en Palestine et au Liban, la consternation internationale devrait aller crescendo, mais il n’en est rien. Pire, en s’en prenant au Hezbollah, il semblerait qu’Israël ait renforcé sa légitimité auprès de sa population et de ses alliés occidentaux. Quant à la Palestine et ses plus de 40 000 morts en un an, elle est ignorée en Occident, où seuls des résidus de partis gauchistes et communistes prennent la peine de défendre les victimes de ce qui semble s’apparenter à une véritable logique génocidaire. Chez nous, en France, la droite est aux abonnés absents. Le Rassemblement National s’est saisi de l’occasion pour effacer l’ardoise, un peu chargée, du fondateur, mettant au passage la « ligne gaulliste » en veilleuse. Du côté des Républicains, certains auraient apprécié une prise de position équilibrée de François-Xavier Bellamy, eurodéputé attaché au christianisme ; il n’en a rien été. Perdues dans une logique géostratégique schizophrénique, les droites en France pleurent le sort de l’Arménie, mais chérissent la puissance qui arme son oppresseur azéri : Israël. Les défenseurs de « l’identité chrétienne » chez nous sont aussi aux abonnés absents quand Tsahal tue des chrétiens dans des églises en Palestine…
Nos médiocrités déjà largement envisagées dans d’autres éditos, il convient aussi de regarder celles du monde arabe. L’Arabie Saoudite, censée être un véritable sanctuaire de l’islam, n’a ainsi pas bougé le petit doigt en faveur de la Palestine. Il en va de même pour les autres États de la péninsule, trop occupés à gérer leur rente gazière et pétrolière avec l’Occident. S’étant rapprochés d’Israël, ces États dupent leur population, mais battent également en brèche la notion d’Oumma, cette communauté supranationale et supra-étatique censée unir tous les musulmans du monde. En donnant la priorité à leurs intérêts géostratégiques et économiques, les États arabes montrent leur lâcheté vis-à-vis de la Palestine, d’une part, mais aussi du Liban. Cette divergence entre les États et les populations du monde arabe pourrait dessiner une fracture future au cours des décennies à venir. Aujourd’hui, seul l’Iran dans le monde islamique, mais non arabe, s’est rangé du côté des Palestiniens et du Liban dans une certaine mesure. Bien que l’intérêt iranien ne soit pas neutre, car conditionné par son hostilité aux États-Unis et à Israël, Téhéran semble aujourd’hui la seule incarnation étatique islamique à soutenir les peuples victimes d’Israël. Un large front de pays arabes ou musulmans visant à trouver les conditions d’une accalmie aurait probablement été plus efficace, mais apparaît aujourd’hui hautement improbable.
Olivier Frèrejacques
Président de Liberté politique
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