Elu président en 2007, Nicolas Sarkozy porte l’espoir d’un redressement de la France. Le candidat a beaucoup promis. Le Président a-t-il été le réformateur que le candidat promettait ? Peu de ses engagements ont été tenus. En fin de mandat, de nombreux chantiers demeurent inachevés. Le quinquennat, il est vrai, a été parsemé de crises nécessitant des réponses d’urgence comme pour la Géorgie ou l’éclatement de la première bulle financière en 2008 pour ne citer que celles-ci.
Un regard rapide sur la législature laisse une impression d’inachevée. Le 10 juillet 2007 Christine Lagarde présentait à la majorité fraîchement élu le Projet de loi dit TEPA : travail emploi pouvoir d’achat. Une loi dont la Ministre déclarait qu’elle était « consacrée à la confiance, à la croissance et à l'emploi", première étape d'une "course pour faire rentrer notre pays dans le XXIe siècle (...) une course que nous allons courir à fond, qui durera cinq ans",
La loi était articulée autour de quatre grandes idées : la défiscalisation des heures supplémentaires; le bouclier fiscal ; le crédit d'impôt sur les intérêts d'emprunt ; la suppression des droits de succession.
Aujourd’hui il n’en reste presque plus rien. Toutes les mesures de la loi TEPA ont été égratignées. Même le bouclier fiscal a sauté lorsque l’affaire Bettencourt révéla aux Français que l’héritière de l’Oréal avait été remboursée par le fisc de 30 millions d’euros. La crise est passée par là.
Un quinquennat sur fond de crise
Depuis cinq ans, Nicolas Sarkozy avec l’aide d’Angela Merkel a dû faire adopter deux plans d’urgence pour éviter une explosion de la zone euro : en 2008, lors de la Présidence française de l’Union européenne, et en 2011 lors du mini-sommet européen de novembre. Le 1er novembre 2011, il est à Cannes en grand ordonnateur d’un « G20 de crise ». Soutenue par l’Allemagne, la France avait fait, à tord ou à raison, de la taxe sur les transactions financières l’une des priorités de sa présidence du G20. Des points ont été marqués dans ce sens mais la France n’a pas pour autant réussi à l’imposer.
Sauver des emplois
Pour lutter contre la crise économique, Sarkozy a tenté de juguler l’hémorragie industrielle en mettant en avant le crédit d’impôt recherche (CIR), en créant un Fonds stratégique d’investissement et en supprimant la taxe professionnelle remplacée par la contribution économique territoriale (CET) composée d'une cotisation foncière des entreprises (CFE) et d'une cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) ; mais ces mesures sont vites apparues insuffisantes voire dommageables pour les entreprises non industrielles. Parallèlement, le candidat du « travailler plus pour gagner plus » voulait améliorer la compétitivité de la France. Il souhaitait remettre les Français au travail. Concrètement, les heures supplémentaires n’ont pas été rémunérées à la hauteur de ce qui était prévu et les zones où le travail le dimanche est autorisé a été étendu.C’est la famille qui en pâtira la première. Heureusement, la résistance contre la réforme s’est organisée au niveau européen.
Dépendance, retraites, universités, représentativité syndicale
Sur toutes les réformes annoncées, nombreuses sont en chantier mais peu sont achevées. D’autres ont été stoppées comme la réforme de la dépendance et le maintien à domicile des personnes âgées. La réforme des retraites, même si elle n’est pas complète, est à mettre à l’actif de la présidence Sarkozienne tout comme celle de la représentativité syndicale conclue par un accord signé en 2008 qui ne reconnaît plus la représentativité qu’à partir d’un certain poids électoral, réforme dont on peut douter de la pertinence et qui ne s’attaque pas aux vraies causes de la crise du syndicalisme français et aux dérives du paritarisme. C’est également grâce au président que les universités ont gagné en autonomie avec une plus grande liberté dans le recrutement, les rémunérations ou la gestion du patrimoine immobilier. En contrepartie de cette réussite, Nicolas Sarkozy a dû éviter de trop s’avancer sur les autres sujets comme ceux concernant l’éducation si ce n’est à la marge avec les internats d’excellence hors de prix… Et la famille ? L’entrée en vigueur de la réforme des régimes ARRCO et AGIRC n’est pas pour la soutenir…
Justice et sécurité, des thèmes chers au président
En janvier 2009, Nicolas Sarkozy avait lancé la réforme très controversée de la procédure pénale et de la suppression du juge d’instruction devant les magistrats de la Cour de cassation à laquelle il a vite dû renoncer… En revanche, en mars 2010, il modifiera profondément le système juridique Français avec la création de la procédure de Question Prioritaire de Constitutionnalité (QPC). Avec la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 renforçant le Parlement dans la procédure législative, le contrôle sur les nominations, le Défenseur des droits et la saisine disciplinaire par les justiciables, la vie démocratique française a-t-elle pris un direction nouvelle.
Sur le plan sécuritaire, Sarkozy s’est appliqué à combattre la délinquance sous toutes ses formes : il rapproche la gendarmerie de la police, instaure des peines planchers contre les récidivistes et la rétention de sûreté, renforce la lutte contre la cybercriminalité et met en place des plans de prévention des violences à l’école. Une réussite concrète est la lutte contre la « délinquance routière ». Pour la première fois en 2010, la France est passée sous la barre des 4000 tués par an sur la route. Mais depuis, « l’été sécuritaire », le discours de Grenoble, la stigmatisation d’une population (les Roms) le gouvernement, en dépit de Claude Guéant, adopte un profil plus bas, notamment sur la question de l’application des peines.
Politique étrangère : quel avenir ?
L’Afghanistan, l’OTAN, Kadhafi, la Côte d’Ivoire, la Tunisie, bientôt la Syrie ? Une ingérence prégnante de la France dans les conflits internationaux au nom des droits de l’Homme ou pour assurer l’indépendance énergétique de la France? C’est ainsi qu’après avoir vendu des rafales à Kadhafi, et l’avoir invité au défilé du 14 juillet, la France a soutenu le Conseil national de la résistance libyenne (CNT) et a ainsi favorisé le retour de la charia en Lybie. En Côte d’Ivoire, la France a pris le parti de soutenir le camp de Ouattara, ami d’un président initié de longue date à la Françafrique comme le révèle Gilles Labarthe (Sarko l’Africain, Hugo&Cie, mars 2011), pour permettre aux entreprises et industries françaises de continuer à prospérer. Ce 27 janvier 2012, François Fillon a assuré le président ivoirien de la "totale disponibilité" des entreprises françaises pour investir en Côte d'Ivoire… Et l’Union européenne ? Le gouvernement français a été l’un des artisans du traité de Lisbonne en 2007. Mais depuis, qu’a fait la patrie des droits de l’homme et du citoyen pour que les droits démocratiques des peuples européens cessent d’être négligés ?
Enfin, comme l’écrivait Pierre de Lauzun dans son article du 3 décembre 2010 sur la Fin de mandat présidentiel, « Au-delà des perspectives politiques immédiates, ce qui frappe chez le président Sarkozy est l’absence d’analyse structurelle de la société et des causes profondes de ses déséquilibres. D’où résulte l’incapacité à définir un projet réellement mobilisateur ». « Tout ceci interpelle directement le chrétien. Ce qu’il a devant les yeux est une communauté manquant de boussole et de repères essentiels ».
Tout au long des trois derniers mois de la campagne présidentielle, l’Association pour la Fondation de Service politique fournira quotidiennement un bilan du quinquennat et produira des analyses sur les thèmes de campagne des candidats : éducation, famille, bioéthique, écologie, travail, santé, gouvernance et régulations, diplomatie, défense, justice, sécurité, immigration, Europe, discriminations, urbanisme et ruralité, solidarité et systèmes sociaux, finance, entreprise et croissance… Ces contributions permettront aux lecteurs de Libertepolitique.com de trouver les éléments de réflexion d’un vote plus « mûri » selon les voeux du cardinal Barbarin et de l’Archevêque de Paris, Monseigneur Vingt-Trois.
Astrid Coeurderoy
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