source[Boulevard Voltaire]Le projet de loi relatif à l’orientation et à la réussite des étudiants vient d’être présenté en Conseil des ministres.
Le projet de loi relatif à l’orientation et à la réussite des étudiants vient d’être présenté en Conseil des ministres. On ne se plaindra pas que le tirage au sort des étudiants dans les filières sous tension soit supprimé : cette modalité aberrante traitait de manière identique les candidats médiocres et les candidats méritants. Mais, avant même d’être appliqué, le système annoncé montre ses défauts et ses limites.
Les élèves de terminale devront désormais formuler, sans ordre de préférence, dix vœux au maximum, sur lesquels le conseil de classe du deuxième trimestre se prononcera. Les établissements d’enseignement supérieur pourront donner un avis favorable ou non, ou subordonner l’inscription à l’acceptation d’un dispositif d’accompagnement pédagogique ou d’un parcours de formation personnalisée. Le problème, c’est que les universités n’ont pas les moyens de financer cet accompagnement et devront déshabiller Pierre pour habiller Paul.
Les élèves devront remplir, avant le premier conseil de classe, des fiches d’orientation où on leur demande de préciser l’état de leur réflexion par des questions sur leurs « points forts/faibles scolaires et extra-scolaires » ou encore sur leurs « centres d’intérêt » et leurs « activités en dehors du lycée ». Cette intrusion dans la vie privée risque fort d’être discriminatoire, selon le milieu socio-culturel de l’élève et le regard qui sera porté sur ces informations. Les engagements d’un élève à l’extérieur d’un établissement scolaire ne regardent que lui et sa famille.
Il est probable que les meilleurs élèves recevront vite des propositions, notamment dans les filières sélectives, et que les autres devront attendre plus longtemps pour voir un de leurs vœux satisfait, pas nécessairement celui qu’ils préfèrent puisqu’ils ne peuvent indiquer une hiérarchie. Il est irréaliste de penser que toutes les universités pourront se pencher sérieusement sur tous les dossiers, comme cela se pratique pour l’accès aux classes préparatoires aux grandes écoles, compte tenu du nombre de demandes.
Cette réforme constituera sans doute un progrès par rapport à la situation antérieure, mais un progrès tout relatif. Par crainte de se faire accuser de « sélection déguisée », les deux ministères concernés ont soigneusement évité, non seulement le terme de « sélection » (qui est rédhibitoire), mais aussi ceux de « prérequis » ou d’« attendus » qu’ils employaient dans un premier temps. Cette position mi-figue mi-raisin laisse le champ libre aux démagogues de tout poil pour exiger davantage de droits.
La seule solution équitable serait d’instaurer un examen d’entrée à l’université ou de valoriser le baccalauréat pour qu’il devienne un diplôme d’accès à l’enseignement supérieur digne de foi. Peut-être la réforme que Jean-Michel Blanquer a mise à l’étude permettra-t-elle de rendre cet examen plus fiable. Malheureusement, avec le nouveau système, il ne servira à rien puisque les établissements donneront leur réponse avant d’en connaître les résultats. Ce n’est pas le moindre des paradoxes qu’à l’époque de l’informatique, il faille plus de trois mois pour affecter les élèves dans l’enseignement supérieur !
Bref, le « Parcoursup » qui va remplacer « APB » (admission post-bac) est un système bancal qui n’ose pas rompre ouvertement avec l’égalitarisme cher à la bien-pensance. Il va ainsi à l’encontre des élèves d’origine modeste ou défavorisée, qui n’ont que leur travail et leurs résultats pour faire la différence.