[Source : ASAF]
La dissuasion est nucléaire et conventionnelle. Elle repose autant sur des capacités techniques et opérationnelles de haute valeur que sur un chef d’Etat crédible et une nation unie. C’est bien dans l’action politique quotidienne que se forge la dissuasion.
Les capacités opérationnelles.
Une force nucléaire de dissuasion à moderniser.
Tous les candidats à l’élection présidentielle, connus à ce jour, affirment leur attachement sans réserve à la force nucléaire de dissuasion qui fut si longtemps décriée lors de sa création. Cette force nucléaire, qui représente un volet important de « l’assurance vie » de la France et un instrument majeur de son indépendance stratégique, doit être modernisée régulièrement compte tenu des développements technologiques qui pourraient la rendre inefficace. A cet égard, les prochaines années vont être cruciales et nécessiter des investissements en recherche et développement qui s’élèveront annuellement à plusieurs milliards d’euros supplémentaires.
Mais face au spectre des menaces identifiées ou prévisibles, la dissuasion doit être globale. Or si l’arme nucléaire peut dissuader autant une puissance nucléaire qu’un pays disposant de forces conventionnelles importantes, elle est sans effet dans certaines situations de crise notamment contre des adversaires tels que l’Etat islamique ou al-Qaïda ; elle ne dissuadera jamais les émules des tueurs du Bataclan ou de Nice !
La dissuasion nucléaire doit donc être complétée par une dissuasion classique reposant sur des forces conventionnelles robustes.
Des forces conventionnelles à renforcer.
Alors qu’en quatre décennies, la part du budget de la Défense dans celui de l’Etat a été divisée par deux, celle du nucléaire dans celui de la Défense est restée stable. Ce sont donc les forces classiques, c'est à dire les capacités de dissuasion et d’action conventionnelles, qui ont supporté la totalité de ces réductions massives de crédits. Nos forces sont aujourd’hui dans un état de paupérisation accélérée qui nécessite un relèvement d’urgence des ressources qui lui sont consacrées.
La situation actuelle de nos forces et les limites qu’elles ont atteintes, exigent un vigoureux effort financier bien supérieur aux 2% que déclarent viser les candidats à la présidentielle. Outre une part importante de ces ressources financières accrues à consacrer à la modernisation de notre force nucléaire, il faudra financer les effectifs des forces conventionnelles non supprimés à l’issue des attentats, ainsi que leur entraînement et leur équipement ; il deviendra impérieux de rattraper le retard pris dans le renouvellement des matériels les plus anciens, combler les lacunes dont nous souffrons maintenant dans certaines capacités, remonter le niveau de préparation de nos forces, corriger le taux d’indisponibilité dramatique des équipements majeurs, et faire face à l’état de délabrement de nombre d’infrastructures.
Un effort continu et important tendant vers les 3% du PIB à moyen terme doit être engagé en urgence, faute de quoi nos capacités de rétorsion et d’action qui contribuent à notre dissuasion n’auront plus guère de crédibilité.
La dimension humaine de la dissuasion.
Un chef de l’Etat crédible.
Aucune dissuasion n’est possible sans un chef crédible et une nation soudée. Plus que dans d’autres domaines, la force de caractère du chef de l’Etat, l’expression de sa détermination, la maîtrise de ses sentiments et la confiance qu’il suscite dans la Nation sont essentiels. L’élection du prochain président de la République revêt donc une importance capitale, car c’est d’abord sur la personnalité du chef de l’Etat que repose la dissuasion. Dans la période instable et dangereuse qui s’annonce, la France ne saurait se satisfaire d’un homme plein de morgue et d’arrogance qui se révèlerait incapable de rassembler la Nation, et moins encore d’un autre qui se confierait à quelques journalistes jusqu’à divulguer des informations confidentielles. Dans les périodes de gros temps, il faut un capitaine, calme, expérimenté, clairvoyant et déterminé ; un homme ou une femme, qui suscite la confiance parce qu’il possède le sens de l’intérêt supérieur du pays.
- Une nation soudée.
Parallèlement, la compréhension des défis à relever et l’adhésion des Français aux décisions du Président, la volonté de se défendre affirmée par la Nation et le soutien que l’opinion porte à son armée constituent des composantes majeures de la crédibilité de notre dissuasion. La perspective de devoir affronter des forces armées aux ordres d’un chef déterminé et soutenues par tous les Français est de nature à faire plier la volonté de quelque adversaire que ce soit, y compris des terroristes agissant en meutes ; mais cette détermination et cette adhésion se construisent et se renforcent au quotidien. A cet égard, le développement de la jungle de Calais, enclave hors-la-loi en France, acceptée pendant des années en dépit de l’exaspération de nos concitoyens, n’a pu qu’encourager les terroristes à considérer la France comme un pays faible et vulnérable, une cible de choix.
C’est pourquoi il faut viser au-delà du « vivre ensemble » ; il faut affirmer que l’on accepterait de « mourir ensemble » pour défendre « quelque chose » qui nous dépasse et qui s’appelle la France, sa liberté et son indépendance, l’égalité des droits et des devoirs des citoyens, et la fraternité qui doit unir les Français.
C’est donc bien ce produit des deux facteurs, technico-opérationnel et humain, qui détermine notre capacité à dissuader, y compris par l’engagement, et qui garantit notre sécurité. Mais n’oublions pas aussi que le prix de cette paix est le fruit d’un combat sur nous-mêmes au quotidien ; c’est ainsi qu’il y a un siècle la France a su vaincre l’envahisseur, après 52 mois de sacrifices !
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