Oublié son “caractère propre”, l’école catholique recherche son propre caractère.
Bercé longtemps par l’illusion de pouvoir garder son caractère propre, sans doute n’est-il pas exagéré de dire qu’aujourd’hui l’enseignement catholique l’a perdu. Inexorable dérapage : pas d’enseignement catholique sans professeurs catholiques. Vous me direz : mais il y en a. C’est vrai, mais, pour de mystérieuses raisons, ils se cachent dans la masse des indifférents. Comme si leur foi (mais est-elle éclairée ?) était une maladie honteuse. On a tellement seriné qu’elle était une affaire privée qu’on a trouvé normal d’en priver les élèves.
On a donc aujourd’hui le tableau d’une école réputée libre, mais liée au système par un contrat de plus en plus contraignant. Toutefois, ce système est encore capable, pour le moment, de prêter plus d’attention aux élèves. C’est à cette attention que se résume souvent, désormais, son “caractère propre”.
Pourrait-on en rester là et faire de ces établissements des promoteurs du PPCD [1] de la pensée unique ? Triste réduction de l’ambition d’être à la hauteur de la destinée humaine. C’est pourtant cette ambition qui a inspiré l’Eglise, à travers les siècles, dans la création d’écoles. En répandant la lumière de la foi, c’est l’humanité, l’humanité dans l’homme qu’elle entendait servir. Ainsi a-t-elle construit ce qu’on peut encore oser appeler la civilisation occidentale. Par elle, nous sommes riches de l’héritage de Jérusalem, d’Athènes et de Rome.
C’est hélas trop oublié au bénéfice d’une “culture” post-moderne, une culture “hors sol” à l’image de certains produits de l’horticulture. Ces considérations ne manquent pas d’intérêt. Peuvent-elles encore être utiles ? Après le tournant et le tourment des “contrats”, c’est sans doute trop tard. Ce serait pourtant une bonne base, une base indispensable pour qui voudrait réinventer, pour aujourd’hui, une ONG [2] d’un nouveau genre : une école catholique.
Pour une telle nouveauté, il faudrait tout d’abord rassembler une équipe motivée. Est-ce possible ? On peut le croire, à voir la générosité des jeunes diplômés. Ils s’engagent, pour un temps, au service des collectivités qui s’éveillent. Ils ne sont pas moins attendus par celles qui se réveillent. Dans le marasme de notre système éducatif, la formation de la jeunesse, à tous les niveaux, ne constitue-t-elle pas la première grande cause nationale ? Et l’on peut y joindre la nouvelle évangélisation, inséparable d’un renouvellement de la culture, après la profonde cassure de la sécularisation. Mais, pas d’erreur, une école catholique n’est pas une école comme les autres assortie d’une information religieuse, elle est une école à la recherche des implications religieuses de toutes les notions profanes. On ne peut découper l’homme en morceaux. Il n’est pas contradictoire de dire qu’une telle école soit ouverte à tous. Il suffit que tous sachent clairement ce qu’on y trouve avant de s’y inscrire.
À travers la diversité des sciences abordées, leur programme c’est l’épanouissement en chacun de toutes les chances que lui donne sa naissance. Elles affectent toutes les facettes de sa nature, de sa physiologie à sa spiritualité. Une telle formation globale ne peut procéder que de “maîtres” encore plus attentifs à ce qu’ils sont qu’à ce qu’ils savent.
Retrouvez tous nos articles sur l'éducation dans notre dossier :
[1] PPCD : Plus Petit Commun Dénominateur
[2] ONG = Organisation Non Gouvernementale, pour célébrer la séparation de l’éducation et de l’état.
Toutes les écoles catholiques sous contrat que je connais sélectionnent en fonction de leur niveau scolaire les élèves qu'elles acceptent, et parfois même n'hésitent pas à mettre à la porte ceux de leurs élèves qui risqueraient de "plomber" leurs résultats au bac. De ce point de vue, l'enseignement public, qui accueille l'ensemble des élèves y compris les plus difficiles et les plus en difficulté, a un comportement plus chrétien !...
Les profs catho se cachent… oui. Quand ils ne sont pas, eux-mêmes, hostiles à la pastorale dans l'établissement, comme j'ai pu le voir. Engagés en paroisse, mais contre toute pastorale scolaire ! J'ai aussi vu des profs hurler en entendant que tel évêque demande à ses directeurs d'être en cohérence avec l'enseignement de l'Eglise. C'est pourtant du bon sens, aussi sur le plan civil : qui signe un contrat avec une entreprise doit en respecter l'identité et l'esprit.
Voir le commentaire en entierLe chanoine Cloupet a amplement participé à la dilution du caractère propre. Qui, dans les instances catholiques a alors désavoué les démarches de ce monsieur ? Evêques ? FNOGEC ? APEL ? Directeurs ? Personne ou presque.
En plus de 20 ans, j'ai vu très peu d'établissements étiquetés catholiques avoir un projet éducatif (que dire de la dimension "mixité" ?Elle est niée par idéologie), un projet pastoral (beaucoup ne proposent plus rien, et beaucoup proposent n'importe quoi à base de bons sentiments), ni un projet de management (pourtant le respect du personnel devrait aussi être important). Mes expériences, en poste ou en recrutement, montrent les faiblesses de ce qui devrait être en pointe (http://failles-ens-catho.over-blog.com/). Mais, vu l'échec de l'Education Nationale, l'enseignement privé n'a pas à se fatiguer pour faire mieux.
L'école sous contrat a perdu son âme. Les alternatives commencent, heureusement, à voir le jour. Quel dommage cependant qu'elles soient si nombreuses à être dans le camp de l'intégrisme (ou presque). Comme si, pour faire un travail de qualité, il fallait se positionner avec des gens qui refusent le Concile.
Le sous-contrat est encore trop englué dans des soucis d'argent. Pourtant, quand ils se plaignent de ne pouvoir accueillir tous les élèves qui le demandant… pourquoi ne pas ouvrir des classes hors contrat ? Beaucoup de familles en ont les moyens. Il n'y a qu'à voir comment sont équipés leurs bambins (téléphones portables à plusieurs centaines d'euros, vacances au ski, etc.).
Professeur en BTS dans l'enseignement catholique depuis 34 ans, je suis tout à fait d'accord avec cet article. La plupart de nos collègues sont très compétents, attachés aux étudiants, consciencieux, etc. mais au mieux indifférents voire hostiles, pour certains, à la foi catholique et à l'Eglise.
Voir le commentaire en entierLes accords Lang-Cloupet ont une grande part de responsabilité. Je me suis beaucoup battu de 1981 à 1984 pour protéger l'Enseignement Catholique, avec la CFTC. Aujourd'hui, je ne le ferai plus car la plupart de nos écoles ont au mieux un vernis vaguement chrétien. Ce qui est un vrai scandale, c'est le recrutement des directions dont certaines (pas dans mon établissement) critiquent les positions de l'Eglise sur tous les sujets "chauds", n'appliquent même pas la Doctrine Sociale de l'Eglise et portent gravement atteinte à la justice sociale au détriment des personnels non enseignants. En 1984, des membres du Grand Orient, nous avaient dit : "on a pas pu vous avoir maintenant, on vous aura de l'intérieur". Ils avaient raison. Hélas !