À l'heure où la laïcité se décline sur tous les modes (Charte de la laïcité, Observatoire de la laïcité, Code de la laïcité, Fête de la laïcité...), il n'est pas rare qu'on en vienne à la considérer comme un absolu, nouveau commandement éclipsant le vieux décalogue de la morale judéo-chrétienne. Le sécularisme et l'athéisme pratique, qui rendent difficile l'appréhension du fait religieux, peinent à offrir un cadre cohérent à l'enseignement de ce que l'on appelle maladroitement les « valeurs ». Après l'enseignement laïque de la morale, on s'achemine vers l’enseignement d'une morale laïque, et de la laïcité comme religion de la République (V. Peillon). C'est bien un enjeu de civilisation : quel homme est le citoyen et quelle société construit-il ? Or le concept de laïcité, héritage de la culture chrétienne, qui distingue bien le temporel et le spirituel, est à distinguer des formes d'intégrisme laïque qui en sont la caricature. À son sujet se vérifie bien le mot de Chesterton : « Le monde est plein d'idées chrétiennes devenues folles. »
Le divorce entre les institutions européennes et les peuples témoigne d’une crise très profonde, qui dépasse l’ajustement politique. L’Union européenne se conçoit désormais comme un laboratoire expérimental de la gouvernance mondiale, où l’administration tend à remplacer la démocratie. L’urgence est à un retour du politique, c’est-à-dire à la responsabilité enracinée des citoyens et des nations dans leur patrimoine commun. Mais quand l’évidence des fondements n’est plus partagée, il faut revenir aux sources. C’est la mission des chrétiens de reconquérir l’Europe comme espace de liberté pour favoriser la rencontre entre chercheurs de la vérité.
À nos lecteurs Un colloque Morale et Laïcité, pour quoi faire ? par Falk van Gaver
Mgr Dominique Rey — En renonçant à sa responsabilité morale, la République n’est pas neutre. Elle impose un régime de droit qui étend l’espace public aux dépens de la liberté de conscience. C’est par défiance que la nouvelle laïcité impose son prêt-à-penser.
Mélina Douchy-Oudot — Les valeurs de la République peuvent-elles constituer le socle commun d’une société pluraliste ? Les contradictions ne manquent pas entre la laïcité athée, la morale du libre examen et les valeurs humanistes de la République.
Laurent Reverso — La pensée de Ferdinand Buisson, personnage-clé de la IIIe République, est tournée vers la fondation d’une nouvelle religion, la « religion laïque ». Ses piliers sont la séparation de l’Église et de l’État, et la laïcisation de la société par l’éducation nationale.
Pascal Jacob — La laïcité est une forme de sécularisation : c’est la raison, et non la foi, qui préside aux destinées communes dès lors que cette foi n’est pas partagée par tous. Mais le principe de la reconnaissance par le droit civil de la liberté religieuse n’est pas un renoncement à la vérité.
Bénédicte Bernard — Un régime de laïcité équilibrée est possible sous réserve du respect d’un ordre moral universel. Il permet à l’Église de déployer efficacement son action et à l’État de trouver les conditions d’une cohésion nationale authentique et d’un réel progrès social.
DOSSIER
Julián Carrón — La crise européenne est d’abord une crise des fondements de la vie commune. C’est la mission des chrétiens de reconquérir l’Europe comme espace de liberté pour la rencontre entre chercheurs de la vérité.
Christophe Beaudouin — L’Union européenne se conçoit comme un laboratoire expérimental de la gouvernance mondiale, où l’administration tend à remplacer la démocratie. L’urgence est à un retour du politique, c’est-à-dire à la responsabilité des citoyens et des nations.
Laurent Ottavi — Depuis le référendum sur le traité de Maastricht (1992), les partis souverainistes français n’ont pas réussi à créer un rassemblement leur permettant de s’imposer sur la scène politique. Tandis qu'ils aboient… la caravane européenne poursuit sa course folle.
REPERES
Denis Lensel — Le bienheureux Jean Paul II a été canonisé le 27 avril, dimanche de la divine Miséricorde. Qui était ce robuste cardinal polonais qui bouscula les canons de l’ostpolitik ? Retour sur l’action du futur saint dans une Europe orientale toujours en proie aux troubles.
Henri Hude — Un siècle après 1914, la puissance se pense autour d’une Idée universelle se projetant dans l’Histoire sous forme d’un empire du Bien censé s’établir par la Raison, et qui s’impose ensuite par la force et la guerre « hors limites ».
Roland Hureaux — Reconnaître les torts qu’on vous prête injustement n’est pas conforme au véritable conseil évangélique et à la vertu de justice. Défendre les brebis insultées contre les loups par la parole n’est rien d’autre que de défendre la vérité contre le mensonge.
QUESTIONS DISPUTEES
À propos du rapport Théry « Filiation, origines, parentalités - Le droit face aux nouvelles valeurs générationnelles », par Thibaud Collin
FEUILLETONS
Le feuilleton politiqueEuropéennes : la faute de notre classe dirigeante, par Michel Pinton
Le feuilleton internationalLes relations Russie-Vatican à l’épreuve de l’Ukraine, par Frédéric Le Moal
Le feuilleton économiqueTaxis : après les VTC, le covoiturage urbain, par Jean-Yves Naudet
L’esprit du tempsLes blasphèmes de la génération anti-68, par Diego de La Vega
La revue des imagesCristeros… ou les larmes aux yeux, par Cédric Burgun
REVUE DES LIVRES ET DES IDEES
Les idéesLes livres
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Revue : La morale laïque, une nouvelle religion ?
Prix de la revue seule : 20,00 €