À l’occasion des débats suscités par la loi Pécresse sur l’autonomie des universités, le fondateur de l’IRCOM et de l’Institut Albert-le-Grand commentait en décembre 2007 une table ronde ayant eu lieu sur la chaîne parlementaire autour de la ministre de l’enseignement supérieur, Valérie Pécresse. Un commentaire qui demeure d’une totale actualité.
Il est question de l’autonomie des universités, autonomie souhaitée par beaucoup, redoutée par quelques-uns. Mais de quelle autonomie s’agit-il ? Les propos du ministre laissent entendre qu’il s’agit principalement d’une autonomie de gestion aux mains d’un conseil d’administration restreint mais « ouvert », d’un président « stratège » et d’un Directeur général, véritable animateur de l’établissement (choisi par qui ?). Pas question de sélection à l’entrée : la porte reste ouverte à tous les bacheliers, appelés toutefois à la prudence par un bureau d’orientation. Les droits d’inscription et les dotations budgétaires sont fixés par l’État ; et surtout les diplômes restent des diplômes nationaux et sanctionnent des études dont contenu et horaires sont fixés à Paris par un de ces comités de spécialistes dont on connaît les effets. D’ailleurs le baccalauréat dont on paraît contester la valeur, n’est-il pas un diplôme national ?
Un tel cadre, laisse peu de place à l’autonomie véritable et donc à l’invention qui pourrait rajeunir le système. Peut-être convient-il aux établissements public ? C’est leur affaire. Encore que ce soit surtout l’affaire de la France de demain et des contribuables d’aujourd’hui. Mais les établissements privés ? On peut d’autant plus s’inquiéter du sort réservé aux établissements privés qu’on ne parle pas. Or ce serait un comble, avouons-le, de voir brimer la liberté des uns à l’occasion de l’autonomie des autres.
Cette liberté d’ailleurs n’était pas très large, du moins était-elle garantie par l’État, réputé impartial : les étudiants du privé pouvaient prétendre à des diplômes « nationaux » devant des jurys indépendants des établissements publics. Ils étaient interrogés sur des programmes arrêtés dans les mêmes conditions que ceux de leurs camarades du public. Que l’État délègue ses pouvoirs à ses universités autonomes, c’est évidemment une menace. Comme la liberté de la presse, la liberté d’enseignement est à la base de la démocratie. On voit mal un journal local obligé de passer une convention avec « le Monde » pour continuer à paraître.
Avouons que ce serait dommage. Car s’il est souvent privé de ressources, l’enseignement privé ne l’est pas d’imagination. Pour ne parler que d’une ville, la somme des innovations privées à Angers est impressionnante. Qu’on en juge. Dès la promulgation de la loi qui l’autorise, en 1875, la faculté de droit, bientôt suivie des facultés de lettres, de sciences, et de théologie. En 1898, l’école supérieure d’agriculture et de viticulture, et bientôt l’école de commerce, l’école normale sociale, l’école d’éducateurs, l’école technique supérieure de chimie, l’école supérieure d’électronique. En 1966, le centre international d’études françaises. En 1970, les premières filières professionnalisées : institut de formation de professeurs, institut de perfectionnement en langues vivantes, institut de psychologie, institut de mathématiques appliquées suivi de l’Année de recyclage scientifique, institut de formation en éducation physique et sportive. En 1984, institut de relations publiques et de communication, et après les sessions de préparation à l’enseignement supérieur, l’Institut Albert-le-Grand pour la formation humaniste souhaitée par la ministre et tout récemment la Formation management du développement.
Évidemment il n’y a pas qu’Angers et il n’y a pas que le privé qui innove. Mais le bilan paraît tout de même assez spectaculaire pour qu’au moment où l’on cherche, enfin, à sortir du marasme, on reconnaisse et on favorise une liberté qui a fait ses preuves et qui pourrait encore en donner d’autres.
H.M. Houard, Ancien secrétaire général de l’Université catholique de l’Ouest et fondateur de l’IRCOM et des instituts associés.
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