L’immigration n’est une chance pour personne

Pour éviter que ne recommence la tragédie de Lampedusa, il faut retenir une seule idée : l’immigration n’est une chance pour personne. C’est un drame pour tous, un retour du servage et du pillage avec la complicité des bonnes consciences.

Comme ONG consacrée à l’aide aux enfants du Sud-Est asiatique, pour nous qui depuis trente ans avons attaché nos actions quotidiennes à des populations qui fuient la guerre, la faim ou l’oppression politique, nous disons que l’immigration est le drame absolu. Un arrachement pour les parents qui ne reverront jamais leurs enfants, pour les vieux qui n’ont comme sécurité que leur descendance, pour les nations désorganisées qui perdent leurs futures élites. Le cri des évêques d’Orient qui appellent les chrétiens à rester en est le symbole pathétique !

Beaucoup de nos contemporains ne réalisent pas que l’immigration à laquelle ils condamnent des populations affolées enrichit les trafiquants et les exploiteurs. Parmi ces trafiquants, il y a des policiers et des douaniers. On le sait : ces marchands de voyage embarquent à prix d’or des désespérés qui engouffrent des fortunes auxquelles a contribué toute leur parentèle.

Complicités

Les chiffres donnent le vertige. Plusieurs des enfants exilés pris en charge par Enfants du Mékong à Paris retournaient à l’état servile dès leur départ de l’association. Pendant un an ou plus, ils se retrouvaient dans des ateliers clandestins de la Porte de Choisy pour rembourser leur passage. Nos moralistes s’associent à ces trafiquants.

Comparer l’immigration espagnole, italienne ou polonaise avec celle venant d’Afrique est malhonnête. Il y a trop de drames aujourd’hui pour oser dire que l’immigration est une chance. C’est une tragédie. On vide certains pays d’Afrique ou d’Europe centrale de leurs meilleurs médecins parce que les ministères concernés (Santé, Finances) sont incapables de changer la loi. Il suffirait de lever les numerus clausus de nos facultés. Cela permettrait d’avoir plus de diplômés pour nos campagnes. Résultat : on pille les pays pauvres de leurs meilleures ressources, eux qui ont tant besoin de leurs rares médecins !

Oui, l’immigration est un drame. Il faut se décider à aider les enfants à vivre auprès de leurs parents, c’est ce que fait Enfants du Mékong depuis trente ans. Nous l’avons fait alors que la guerre se poursuivait au Cambodge, nous l’avons fait en Birmanie alors que le régime était la dictature que l’on sait, nous le faisons au Tibet.

Il y faut de la volonté, de la fidélité quoiqu’il en coûte. Il suffit parfois d’un seul homme au milieu d’une population pour redonner l’espoir. L’éducation est la priorité. D’où l’urgente nécessité de construire des écoles où l’on enseigne à aimer le bien, à combattre le mal et désirer la loyauté. C’est simple, c’est long, c’est grand, mais nous l’avons fait et les résultats considérables obtenus avèrent que cela est possible.

 

Yves Meaudre est directeur général de l’ONG Enfants du Mékong