Source [Le Figaro] À l’occasion de la parution de son nouveau livre, «Portraits et destins» (Perrin), Franck Ferrand invite à ne pas porter un regard anachronique et moralisateur sur le passé et appelle à célébrer l’héritage que nous avons reçu.
FIGAROVOX.-Dans votre nouveau livre, «Portraits et destins», vous racontez vingt histoires, de la bataille de Salamine aux premiers pas de l’homme sur la Lune. Existe-t-il un lien entre ces épisodes?
Franck FERRAND.-Ce qui les relie les uns aux autres se trouve moins dans les sujets que dans la façon de les envisager et de les traiter. Tous ces moments d’histoire, je les ai d’abord écrits pour le magazine Historia, avec la double ambition d’instruire et de distraire.
Enfant, c’est de la lecture ce magazine que s’est nourrie ma passion pour l’évocation du passé, à l’école de maîtres comme Decaux et Castelot, bien sûr, mais aussi Erlanger, G. Lenotre ou le duc de Castries... Tous étaient attentifs, avant tout, à maintenir et soutenir l’attention du lecteur, mais sans rien concéder à l’exactitude et à la clarté.
Chaque évocation, par ailleurs, se devait de tendre vers une forme de synthèse, tout au moins vers un archétype... Plus j’avance dans ce métier et dans la vie, plus je me dis qu’il n’existe pas de meilleure école.
En rappelant l’extraordinaire envergure du personnage de Colbert, l’on comprend l’aberration que pourrait constituer le fait de « déboulonner sa statue ».
Vous racontez notamment l’épopée d’Alexandre de Macédoine qui fut en quelque sorte la première figure du conquérant victorieux. Pour reprendre votre terme, à quel archétype son parcours se résumerait-il?
La vie du grand Alexandre a été, de diverses façons, vouée à la notion de dépassement. C’est ce qu’il y a, au fond, de fort peu grec chez ce Macédonien. L’influence de sa mère Olympias, sans doute… Son ambition ne connaît pas de limite, jusqu’à l’hybris des dernières années. Certains préféreront peut-être retenir son rêve de synthèse Orient-Occident, rêve avorté de son vivant, et jamais abouti nulle part, depuis. Alexandre n’en reste pas moins un personnage fascinant, très agréable à ressusciter.
Vous avez montré, dans de précédents ouvrages, que la controverse vous effrayait peu. Votre portrait de Colbert est-il une réponse à ceux qui voudraient le réduire au Code Noir, et en profiter pour déboulonner sa statue?
Il me semble que l’ignorance est le terreau sur lequel peut prospérer cette cancel culture qui nous vient d’outre-Atlantique. Pour ce qui est du Code Noir, il suffirait ainsi de le remettre dans son contexte pour comprendre qu’en ce temps-là, et quelles qu’aient pu être les horreurs de la Traite négrière, il marquait plutôt un progrès dans la manière de considérer les esclaves.
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