Source [Boulevard Voltaire] : Ainsi donc, en quelques semaines, Israël a déraciné le Hezbollah : d'abord les petites mains et les intermédiaires, en piégeant les bippers. Ensuite, ce fut le tour des frappes aériennes massives sur le Liban, lesquelles tuèrent tous les responsables militaires du mouvement chiite… sauf son chef politique, Hassan Nasrallah. C'est du moins ce que l'on pensait jusqu'à ce samedi, puisqu'un bombardement massif sur la banlieue sud de Beyrouth a permis (l'organisation terroriste elle-même l'a confirmé) d'éliminer le dirigeant historique qui, depuis 1992, avait fait du Hezbollah un acteur politique crédible, aux ramifications tentaculaires, inspirées du modèle pasdar iranien, et aux capacités militaires non négligeables, notamment dans le domaine de la guérilla et de la défense d'usure. Israël avait d'ailleurs payé pour le savoir, lors de l'invasion manquée du sud Liban, en 2006. C'est à ce prédicateur habité, porteur d'un turban noir qui le signalait comme descendant putatif de Mahomet, que l'on devait la très habile stratégie du “parti de Dieu”: un mélange d'intransigeance religieuse et politique, d'appel aux valeurs universelles des droits de l’Homme, de financement quasi mafieux, de diversification associative et éducative… le tout porté par une grande proximité avec Téhéran et une aversion farouche, bien sûr, pour l'État d'Israël, « al-aqiyan as-sayouni », « l'entité sioniste », selon les éléments de langage officiels du parti.
Le visage de Nasrallah, de son vivant, était placardé dans tous les villages chiites au sud du fleuve Litani, à côté de ceux des terroristes morts, victimes du devoir en quelque sorte. C'était une figure respectée malgré les dissensions (une spécialité libanaise), un homme qui faisait l'objet d'un quasi-culte de la part de ses partisans. Les chiites, plus encore que les musulmans sunnites, ont une tendresse mystique et démonstrative pour les “Shahid”, les martyrs. Il y a fort à parier que les cérémonies d'hommage qui lui seront consacrées auront cette coloration doloriste que l'on observe chaque année le jour d’Achoura, commémoration de la mort de Hussein à la bataille de Kerbala. Pour autant, ce n'est pas tant de sentiment que de prospective qu'il s'agit : le Hezbollah est presque mort, mais il va peut-être falloir craindre sa réaction, qui risque d'être irrationnelle.
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